Reconstruction de l''Irak
Petite concurrence entre amis
Les Etats-Unis ont décidé de restreindre les appels d’offres pour 26 nouveaux contrats de reconstruction en Irak aux pays de la coalition. France, Allemagne, Russie et Canada sont donc exclus pour des raisons «touchant à la sécurité des Etats-Unis».
Paul Wolfowitz, secrétaire d’Etat adjoint à la Défense précise, dans une circulaire publiée sur le site internet du Pentagone, que les appels d’offres pour 26 contrats de reconstruction en Irak, d’une valeur totale de 18,6 milliards de dollars, seront limités à des entreprises américaines, irakiennes, celles des pays de la coalition ou ayant envoyé des troupes sur le terrain. Cette restriction sur l’origine des entreprises ne concerne cependant pas la sous-traitance. Elle est justifiée par «la protection des intérêts vitaux touchant à la sécurité des Etats-Unis». Ainsi, 63 pays sont éligibles à concourir mais pas la France, ni l’Allemagne, la Russie, le Canada, ni aucun pays opposé à l’intervention américano-britannique en Irak.
L’Allemagne a immédiatement réagi à cette exclusion la qualifiant de «pas acceptable» si elle se confirmait. La France a fait savoir qu’elle allait étudier la légalité de cette mesure d’ostracisme au regard du droit international de la concurrence, en liaison avec l’Union européenne qui, élargie à 25 pays, compte en ses rangs 14 membres favorables à la coalition et 11 opposants à l’intervention armée. L’Union européenne a débloqué 1,3 milliard de dollars pour participer au financement de la reconstruction en Irak, mais la France et l’Allemagne ont refusé d’apporter des contributions individuelles supplémentaires. La Russie a fait savoir, opportunément, qu’elle n’envisageait pas d’annuler la dette de 8 milliards de l’Irak envers elle.
Des modalités d’attribution critiquées
Etre admis à concourir dans les appels d’offres ne suffit cependant pas à rassurer totalement les Britanniques. Ecartées de la première phase d’attribution des contrats, immédiatement après la fin des combats, les entreprises de Grande-Bretagne souhaitent emporter cette fois une part significative du gâteau, mais n’est sont pas certaines. Le Royaume-Uni a déployé 10 000 hommes en Irak mais Mike O’Brien, secrétaire au Foreign Office chargé du commerce a dû se rendre en personne à Washington, début novembre, pour défendre les entreprises britanniques auprès des responsables américains chargés de la reconstruction en Irak. De plus, une réunion avec des industriels a été organisée à Londres, à l’occasion de la visite du président Bush, fin novembre, pour se rappeler au souvenir des Américains.
Aux Etats-Unis, non plus, les modalités d’attribution des milliards de dollars consacrés à l’Irak ne font pas l’unanimité. L’opposition démocrate, notamment, se plait à souligner que l’administration Bush a déjà attribué des contrats pour des millions de dollars, sans aucun appel d’offres, à des entreprises comme Halliburton et Bechtel qui ont des liens connus avec les Républicains. Pour répondre à ces accusations et éviter, dans l’avenir, les reproches de gabegie et de détournements de fonds, le président Bush a créé un poste d’inspecteur général chargé de contrôler le versement de l’aide américaine en Irak.
De leur côté, les responsables irakiens veulent préparer l’avenir et entendent attirer les investissements étrangers. Le ministre des Finances irakien Kamal Al-Kilani a appelé investisseurs et exportateurs à engager des relations économiques à long terme avec l’Irak et pas seulement «avec une mentalité de ruée vers l’or». Déjà, les 35 premières offres de privatisation d’entreprises irakiennes dans les secteurs alimentaire, chimique, textile, construction ou ingénierie, ont reçu plus d’une centaine d’offres. Il est d’ores et déjà acquis que l’Egypte participera à la modernisation des centrales électriques et que la Jordanie fournira son assistance dans le secteur électrique. Le ministre ukrainien des Affaires étrangères, dont le pays a déployé 1 600 militaires en Irak, effectue ces jours-ci un voyage à Bagdad afin, entre autres sujets, d’évoquer la participation des sociétés ukrainiennes à la reconstruction.
Mais les conditions de sécurité en Irak sont l’élément fondamental dans la décision des investisseurs et entreprises étrangères de s’y engager. La signature d’un contrat de co-entreprise entre Coca-Cola et trois sociétés irakiennes est entièrement conditionnée au retour de la sécurité. L’installation du premier réseau de téléphonie mobile dans le sud du pays par une compagnie koweïtienne a été repoussée pour les mêmes raisons. Plusieurs dizaines de salariés d’une compagnie sud-coréenne travaillant à la remise en état de lignes électriques ont quitté le pays, après l’attentat mortel contre deux de leurs collègues sur une route proche de Tikrit.
Des attaques de plus en plus fréquentes ont lieu contre les personnels civils travaillant à la reconstruction, Irakiens ou étrangers, et non plus seulement contre les militaires américains ou britanniques de la coalition.
A lire également :
Irak : la France exclue des chantiers de reconstruction
(Chronique économique de Norbert Navarro du 10/12/2003)
L’Allemagne a immédiatement réagi à cette exclusion la qualifiant de «pas acceptable» si elle se confirmait. La France a fait savoir qu’elle allait étudier la légalité de cette mesure d’ostracisme au regard du droit international de la concurrence, en liaison avec l’Union européenne qui, élargie à 25 pays, compte en ses rangs 14 membres favorables à la coalition et 11 opposants à l’intervention armée. L’Union européenne a débloqué 1,3 milliard de dollars pour participer au financement de la reconstruction en Irak, mais la France et l’Allemagne ont refusé d’apporter des contributions individuelles supplémentaires. La Russie a fait savoir, opportunément, qu’elle n’envisageait pas d’annuler la dette de 8 milliards de l’Irak envers elle.
Des modalités d’attribution critiquées
Etre admis à concourir dans les appels d’offres ne suffit cependant pas à rassurer totalement les Britanniques. Ecartées de la première phase d’attribution des contrats, immédiatement après la fin des combats, les entreprises de Grande-Bretagne souhaitent emporter cette fois une part significative du gâteau, mais n’est sont pas certaines. Le Royaume-Uni a déployé 10 000 hommes en Irak mais Mike O’Brien, secrétaire au Foreign Office chargé du commerce a dû se rendre en personne à Washington, début novembre, pour défendre les entreprises britanniques auprès des responsables américains chargés de la reconstruction en Irak. De plus, une réunion avec des industriels a été organisée à Londres, à l’occasion de la visite du président Bush, fin novembre, pour se rappeler au souvenir des Américains.
Aux Etats-Unis, non plus, les modalités d’attribution des milliards de dollars consacrés à l’Irak ne font pas l’unanimité. L’opposition démocrate, notamment, se plait à souligner que l’administration Bush a déjà attribué des contrats pour des millions de dollars, sans aucun appel d’offres, à des entreprises comme Halliburton et Bechtel qui ont des liens connus avec les Républicains. Pour répondre à ces accusations et éviter, dans l’avenir, les reproches de gabegie et de détournements de fonds, le président Bush a créé un poste d’inspecteur général chargé de contrôler le versement de l’aide américaine en Irak.
De leur côté, les responsables irakiens veulent préparer l’avenir et entendent attirer les investissements étrangers. Le ministre des Finances irakien Kamal Al-Kilani a appelé investisseurs et exportateurs à engager des relations économiques à long terme avec l’Irak et pas seulement «avec une mentalité de ruée vers l’or». Déjà, les 35 premières offres de privatisation d’entreprises irakiennes dans les secteurs alimentaire, chimique, textile, construction ou ingénierie, ont reçu plus d’une centaine d’offres. Il est d’ores et déjà acquis que l’Egypte participera à la modernisation des centrales électriques et que la Jordanie fournira son assistance dans le secteur électrique. Le ministre ukrainien des Affaires étrangères, dont le pays a déployé 1 600 militaires en Irak, effectue ces jours-ci un voyage à Bagdad afin, entre autres sujets, d’évoquer la participation des sociétés ukrainiennes à la reconstruction.
Mais les conditions de sécurité en Irak sont l’élément fondamental dans la décision des investisseurs et entreprises étrangères de s’y engager. La signature d’un contrat de co-entreprise entre Coca-Cola et trois sociétés irakiennes est entièrement conditionnée au retour de la sécurité. L’installation du premier réseau de téléphonie mobile dans le sud du pays par une compagnie koweïtienne a été repoussée pour les mêmes raisons. Plusieurs dizaines de salariés d’une compagnie sud-coréenne travaillant à la remise en état de lignes électriques ont quitté le pays, après l’attentat mortel contre deux de leurs collègues sur une route proche de Tikrit.
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(Chronique économique de Norbert Navarro du 10/12/2003)
par Francine Quentin
Article publié le 10/12/2003