Irak
Washington plus conciliant avec les anti-guerre
Succès incontestable pour l’administration Bush, la capture de l’ancien dictateur irakien pourrait être également l’occasion pour la France et les autres pays hostiles à une intervention militaire contre le régime de Saddam Hussein de trouver le chemin de la réconciliation avec les Etats-Unis qui semblaient s’être, jusqu’à présent, faits un point d’honneur à les écarter de la reconstruction de l’Irak. Le président américain, qui a dépêché en Europe son envoyé spécial James Baker qu’il a chargé de tenter de renégocier l’imposante dette contractée par l’ancien pouvoir de Bagdad, a fait lundi un geste vers Paris et Berlin en affirmant que Washington voulait «travailler avec la France et l’Allemagne sur toute une série de questions». Une bonne disposition que semblent partager ces pays qui se sont déclarés prêts à revoir les créances de l’ancien régime irakien si les conditions étaient réunies.
La brusque crispation dans les relations entre Washington et les pays hostiles à la guerre qui a accompagné la semaine dernière la volonté du Pentagone d’exclure les entreprises allemandes, françaises et russes des premiers contrats pour la reconstruction de l’Irak semble s’être atténuée. L’arrestation du dictateur déchu pourrait en effet avoir réconcilié tout le monde. Certes, George Bush a une nouvelle fois justifié lundi la mise à l’écart de ces pays. «L’idée, a-t-il déclaré, de dépenser l’argent du contribuable américain en accordant des contrats à des entreprises n’ayant pas participé à la poussée initiale était une chose que je ne pouvais décider». Mais, a-t-il aussitôt ajouté, «cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas d’autres moyens de participer à la reconstruction de l’Irak et nous sommes impatients de les inclure dans le processus». Plus direct encore, George Bush a même affirmé que les Etats-Unis «tendaient maintenant la main» à la France et l’Allemagne, deux pays, personne ne s’en étonnera, qui comptent parmi les principaux créanciers de l’ancien régime irakien.
L’administration Bush a en effet conscience que si l’arrestation de Saddam Hussein constitue un succès incontestable, elle ne résoudra pas pour autant le problème de l’insécurité qui prévaut en Irak. Elle sait en outre que la dette colossale contractée par l’ancien régime, si elle n’est pas réduite, sera un frein important à la reconstruction d’un pays miné par trois guerres et treize années de sanctions internationales draconiennes. Et si aujourd’hui les Etats-Unis peuvent se prévaloir d’avoir remporté une importante victoire en capturant vivant Saddam Hussein à moins d’un an de l’élection présidentielle américaine, ils savent aussi que ce succès ne résistera pas à un nombre croissant de victimes dans les rangs de leurs troupes. C’est ce qui pourrait sans doute expliquer cette volonté affichée de rallier de nouveaux soutiens internationaux et d’élargir la coalition en Irak à d’autres pays. Cela permettrait en effet à Washington d’accélérer le transfert du pouvoir aux Irakiens et de commencer à symboliquement se désengager militairement du pays.
Le «oui mais» des anti-guerre
Cette nouvelle attitude de l’administration américaine a été favorablement accueillie par le front des anti-guerre, pour qui l’arrestation de Saddam Hussein pourrait représenter une opportunité de revenir dans le jeu irakien. Paris et Moscou ont ainsi émis des signes de bonne volonté en se déclarant prêts à revoir le traitement de la dette irakienne. Recevant lundi le président du Conseil de gouvernement transitoire irakien, le chef de la diplomatie française a même affirmé que les autorités françaises pourraient «envisager des annulations de dette appropriées et compatibles avec la capacité de financement de l’Irak». «La France, a déclaré Dominique de Villepin, en liaison avec les autres créanciers du Club de Paris estime qu’un accord pourrait intervenir dès 2004 si les conditions sont réunies». A Moscou, le vice-ministre des Affaires étrangères Iouri Fedotov a émis un message similaire en estimant que les mécanismes du Club de Paris devaient s’appliquer à l’Irak. Selon lui, le Club constitue un «système moderne et civilisé de règlements des problèmes de dettes extérieures».
Mais ces gestes de conciliations des anti-guerre ne signifient pas pour autant que ces pays soient prêts à s’engager à n’importe quel prix en Irak. Le président français a ainsi insisté sur le fait que «la communauté internationale devait agir dans le seul objectif de la reconstruction politique et économique de ce pays et de sa stabilisation». Pour cela, a-t-il souligné, «elle sera d’autant plus efficace qu’elle aura retrouvé son unité et qu’elle veillera à donner toute leur place aux Nations unies». Jacques Chirac a par ailleurs insisté sur la nécessité de mettre en place rapidement «un gouvernement irakien souverain qui seul permettra à la solidarité internationale de s’exprimer pleinement». Cette position semble d’ailleurs aujourd’hui trouver un large écho auprès des autorités intérimaires irakiennes, désormais débarrassées de Saddam Hussein, et soucieuses d’échapper à la mainmise de la coalition dirigée par les Américains sur les affaires du pays.
A écouter :
Farida Ayari, journaliste à RFI revient sur la tournée européenne de James Baker en vue de la réduction de la dette irakienne (17/12/2003).
L’administration Bush a en effet conscience que si l’arrestation de Saddam Hussein constitue un succès incontestable, elle ne résoudra pas pour autant le problème de l’insécurité qui prévaut en Irak. Elle sait en outre que la dette colossale contractée par l’ancien régime, si elle n’est pas réduite, sera un frein important à la reconstruction d’un pays miné par trois guerres et treize années de sanctions internationales draconiennes. Et si aujourd’hui les Etats-Unis peuvent se prévaloir d’avoir remporté une importante victoire en capturant vivant Saddam Hussein à moins d’un an de l’élection présidentielle américaine, ils savent aussi que ce succès ne résistera pas à un nombre croissant de victimes dans les rangs de leurs troupes. C’est ce qui pourrait sans doute expliquer cette volonté affichée de rallier de nouveaux soutiens internationaux et d’élargir la coalition en Irak à d’autres pays. Cela permettrait en effet à Washington d’accélérer le transfert du pouvoir aux Irakiens et de commencer à symboliquement se désengager militairement du pays.
Le «oui mais» des anti-guerre
Cette nouvelle attitude de l’administration américaine a été favorablement accueillie par le front des anti-guerre, pour qui l’arrestation de Saddam Hussein pourrait représenter une opportunité de revenir dans le jeu irakien. Paris et Moscou ont ainsi émis des signes de bonne volonté en se déclarant prêts à revoir le traitement de la dette irakienne. Recevant lundi le président du Conseil de gouvernement transitoire irakien, le chef de la diplomatie française a même affirmé que les autorités françaises pourraient «envisager des annulations de dette appropriées et compatibles avec la capacité de financement de l’Irak». «La France, a déclaré Dominique de Villepin, en liaison avec les autres créanciers du Club de Paris estime qu’un accord pourrait intervenir dès 2004 si les conditions sont réunies». A Moscou, le vice-ministre des Affaires étrangères Iouri Fedotov a émis un message similaire en estimant que les mécanismes du Club de Paris devaient s’appliquer à l’Irak. Selon lui, le Club constitue un «système moderne et civilisé de règlements des problèmes de dettes extérieures».
Mais ces gestes de conciliations des anti-guerre ne signifient pas pour autant que ces pays soient prêts à s’engager à n’importe quel prix en Irak. Le président français a ainsi insisté sur le fait que «la communauté internationale devait agir dans le seul objectif de la reconstruction politique et économique de ce pays et de sa stabilisation». Pour cela, a-t-il souligné, «elle sera d’autant plus efficace qu’elle aura retrouvé son unité et qu’elle veillera à donner toute leur place aux Nations unies». Jacques Chirac a par ailleurs insisté sur la nécessité de mettre en place rapidement «un gouvernement irakien souverain qui seul permettra à la solidarité internationale de s’exprimer pleinement». Cette position semble d’ailleurs aujourd’hui trouver un large écho auprès des autorités intérimaires irakiennes, désormais débarrassées de Saddam Hussein, et soucieuses d’échapper à la mainmise de la coalition dirigée par les Américains sur les affaires du pays.
A écouter :
Farida Ayari, journaliste à RFI revient sur la tournée européenne de James Baker en vue de la réduction de la dette irakienne (17/12/2003).
par Mounia Daoudi
Article publié le 16/12/2003