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Algérie

Les activités du FLN suspendues et ses fonds gelés

Les activités du Front de libération nationale, formation majoritaire à l’Assemblée du peuple, sont frappées depuis mardi d’interdiction. La justice algérienne, à l’origine de cette décision, a également imposé le gel de la trésorerie de l’ancien parti unique. Ces mesures, qui interviennent à quatre mois de l’élection présidentielle, handicapent en premier lieu le secrétaire général du FLN, l’ancien Premier ministre Ali Benflis et candidat déclaré pour son parti à la magistrature suprême. Elles lui ôtent en effet le soutien de la formidable machine électorale que représente le Front de libération nationale.
Ces interdictions qui frappent le premier parti du pays ne sont que le dernier épisode de la guerre que se livrent depuis des mois le président Abdelaziz Bouteflika et son ancien Premier ministre Ali Benflis limogé le 5 mai dernier. Les partisans du chef de l’Etat, en minorité depuis le dernier congrès du FLN qui avait élu triomphalement au mois de mars M. Benflis avec des pouvoirs élargis à la tête de l’ancien parti unique, ont contre-attaqué devant la justice algérienne en contestant les résolutions de ce huitième congrès. Ces militants, regroupés au sein d’un mouvement de «redressement» du parti, dont le chef de file est l’actuel ministre des Affaires étrangères Abdelaziz Belkhadem, accusent l’actuelle direction d’avoir «confisqué» le FLN. Ils réclament l’organisation d’un nouveau congrès.

Pour motiver sa décision d’interdire les activités du FLN et de geler sa trésorerie, la justice algérienne a déclaré non légitime son dernier congrès pour non respect des statuts du parti. Le verdict considère ainsi «les résultats du huitième congrès comme nuls et non avenus». A ce titre, «tous les comptes bancaires du parti sont gelés jusqu’à ce que la situation soit mise en adaptation et conformité avec la loi». L’actuelle direction a la possibilité de faire appel de cette décision devant le Conseil d’Etat. Ce dernier lui avait certes donné raison en octobre dernier lorsque les partisans d’Abdelaziz Bouteflika avaient obtenu d’un tribunal d’Alger l’interdiction de la tenue d’un congrès extraordinaire du parti convoqué dans le but de plébisciter la candidature d’Ali Benflis à l’élection présidentielle d’avril. Le Conseil avait en effet annulé cette interdiction, légitimant à posteriori un congrès qui s’était tenu quasi-clandestinement dans les bureaux du parti à Alger.

Vers un congrès du «redressement»

Mais ce cas de figure ne risque pas de se reproduire au vu de la valse des fauteuils qu’a connue, il y a quelques semaines, la magistrature algérienne. Abdelaziz Bouteflika avait en effet limogé le 3 novembre dix présidents de cours et onze procureurs généraux, ce que la presse indépendante algérienne avait interprété comme une sérieuse reprise en main de la justice par le pouvoir.

Les partisans d’Abdelaziz Bouteflika, qui depuis des mois dénoncent le caractère stalinien du huitième congrès du FLN, ont désormais les mains libres pour convoquer une nouvelle réunion du parti. Magnanimes, ils ont tout de même invité leurs adversaires pro-Benflis à y participer en tant que simples militants, les consultations qu’ils ont l’intention d’organiser dans les semaines qui viennent étant à leurs yeux les seules garantes de la légitimité des instances du FLN.

Si l’on ignore pour l’instant le nombre des partisans acquis à l’un ou l’autre camp, certains observateurs s’inquiètent de voir la crise qui secoue l’ancien parti unique déborder dans la rue. En août dernier déjà, une réunion organisée par les hommes du président dans la banlieue d’Alger s’était transformée en bataille rangée avec les partisans d’Ali Benflis. La police avait dû intervenir pour séparer les militants des deux bords.

Avec ce rebondissement judiciaire, le FLN est sans doute entré dans la crise la plus grave de son histoire depuis les émeutes sanglantes de 1988 qui avaient conduit à l’abandon du régime du parti unique et modéré son monopole sur la vie politique du pays.

A écouter également :

Amar Ben Salem, correspondant permanent de RFI à Alger au micro de Philippe Perdrix, 3'



par Mounia  Daoudi

Article publié le 30/12/2003