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Education

Le développement passe par la scolarisation des filles

Le dernier rapport de l’Unicef sur l’état de l’enfance à travers le monde révèle que quelque 121 millions d’enfants, parmi lesquels une majorité de filles, restent privés d’école. L’organisation onusienne, qui fait le lien entre la scolarisation des filles et le développement, prévient que si dans les deux ans à venir des dispositions ne sont pas prises allant dans le sens d’une meilleure intégration à l’école des petites filles, les objectifs mondiaux visant à réduire la pauvreté et améliorer les conditions de vie resteront hors d’atteinte.
L’Unicef a choisi de présenter son rapport lors du sommet mondial sur la société de l’information qui s’est ouvert mercredi à Genève. «Les progrès de la technologie de l’information depuis 25 ans sont véritablement étonnants», a ainsi déclaré Carol Bellamy, la directrice générale de l’organisation, sans doute pour mieux insister sur le fait que «chaque année plus de 121 millions de d’enfants ne voient jamais une salle de classe». Dans son rapport, l’Unicef a choisi de pointer en priorité le cas des petites filles qui sont, chaque année, au moins 9 millions de plus que les garçons à être privées d’école. Sans compter que lorsqu’elles ont la chance d’être scolarisées, elles abandonnent beaucoup plus tôt leurs études. Et c’est en Afrique subsaharienne que la situation est la plus préoccupante puisque le nombre des fillettes non scolarisées y est passé de 20 millions en 1990 à 24 millions en 2002. La Somalie enregistre ainsi le pourcentage de scolarisation le plus faible avec seulement 11% pour la période allant de 1996 à 2002.

L’organisation onusienne a voulu insister cette année sur le fait que la lutte contre le sous-développement passait nécessairement par la scolarisation des filles, aujourd’hui à ses yeux largement négligée. «Les initiatives internationales en faveur du développement n’ont pas suffisamment tenu compte des filles et des millions de femmes se retrouvent sans instruction et incapables d’améliorer leur situation, celle de leurs enfants ou de leur communauté», souligne notamment le rapport qui fait valoir que les filles qui ne sont pas allées à l’école sont les plus exposées à la pauvreté, la faim, la violence et la maladie. Elles sont souvent à ce titre soumises aux mauvais traitements, à l’exploitation et à la traite des êtres humains.

Le rapport démontre en outre qu’en permettant aux filles de recevoir une éducation de base de qualité, on améliore les autres indicateurs du bien être humain. Ainsi la majorité des pays se prévalant des taux de scolarisation des filles les plus bas dans le cycle secondaire ont également les taux de mortalité infantile les plus élevés avec 15% des enfants qui meurent avant leur cinquième anniversaire. «Lorsqu’une fille n’a pas le bagage de connaissance et l’appréhension de la vie que l’école peut apporter, cela entraîne des effets immédiats et des effets à long terme puisqu’elle est exposée à un nombre de risques bien plus grand que les filles instruites et la génération suivante en paie les conséquences», souligne ainsi l’Unicef. L’organisation prend notamment pour exemple certaines maladies, comme le sida, qui selon elle ne pourront être combattues sans que ne soit garanti le droit à l’éducation pour tous, filles et garçons.

Des mesures urgentes à prendre

L’Unicef pointe également le manque de financement de l’éducation des filles dans les pays en développement. L’organisation souligne ainsi que globalement les institutions financières et les pays industrialisés n’ont pas tenu leurs promesses alors que la parité à l’école était pourtant l’un des objectifs fixé pour l’année 2005. Dans ce contexte, elle prévient que si dans les deux ans rien n’est fait pour remédier à cet état des choses, les engagements pris lors du sommet mondial pour les enfants de 1990 en vue d’améliorer leurs conditions de vie ne seront jamais atteints. «En réalité, en dépit des promesses faites en 1990 par les pays donateurs qui s'engageaient à fournir des fonds supplémentaires pour l'éducation et de leur engagement, en 1996, de garantir l'éducation primaire pour tous d'ici à 2015, le montant total de l'aide aux pays en développement a diminué pendant les années 1990, et le déclin des fonds bilatéraux en faveur de l'éducation a été encore plus spectaculaire», constate ainsi le rapport.

L’Unicef se veut toutefois optimiste et affirme qu’il est encore possible d’accomplir des progrès si des initiatives stratégiques sont prises au niveau national dans certains pays grâce à un soutien accru de la communauté internationale. «Scolariser les filles sur un pied d’égalité avec les garçons n’est pas un investissement facultatif», a ainsi insisté Carol Bellamy faisant valoir qu’«aucune des nations les plus riches du monde ne s’est développée sans faire d’importants investissements dans l’éducation». «Que nous réussissions ou que nous échouions, cela aura d’importantes conséquences à long terme», a-t-elle ajouté.

Dans ce contexte et pour réaliser des avancées en matière de développement dans les pays pauvres, l’Unicef propose un plan d’action. Il préconise notamment «la création d’une véritable éthique nationale qui reconnaît la valeur de l’éducation des filles autant que celle des garçons». Selon l’organisation, si l’éducation est enfin reconnue comme un droit et non comme un privilège, alors les Etats seront obligés de mobiliser les ressources nécessaires pour que tous les enfants puissent être scolarisés. Le plan d’action appelle par ailleurs à ce que soient abolis tous les frais de scolarité et que l’éducation soit insérée dans tous les plans nationaux de lutte contre la pauvreté. Sur le plan international, il insiste auprès des pays industrialisés et des institutions financières sur la nécessité d’accroître leurs aides au profit de l’éducation.



par Mounia  Daoudi

Article publié le 11/12/2003