Algérie
L’opposition à Bouteflika s’organise
A trois mois de l’élection présidentielle, l’opposition a lancé une sévère mise en garde au président Abdelaziz Bouteflika, exigeant notamment la démission de l’actuel gouvernement ouvertement acquis à la cause de ce dernier, seule garantie à ses yeux de la transparence du scrutin. Cette mise en garde intervient alors que le Front de libération nationale (FLN), principal parti du pays opposé à la candidature du chef de l’Etat, s’est vu interdire toute activité politique et a vu ses fonds gelés. Considérée par de nombreux observateurs comme cruciale pour l’avenir du pays, l’élection présidentielle d’avril prochain a pris depuis quelques mois les allures d’une bataille rangée entre Abdelaziz Bouteflika qui n’a, pour l’instant, toujours pas annoncé officiellement sa candidature, et Ali Benflis, son ancien Premier ministre limogé en mars dernier et candidat officiel du FLN.
La décision de justice interdisant fin décembre les activités du Front de libération nationale et gelant sa trésorerie, suite à une plainte déposée par les proches du président Abdelaziz Bouteflika, semble avoir servi d’électrochoc à l’opposition algérienne. Cet affront, fait au principal parti du pays, n’a en effet pas été sans conséquences sur la classe politique qui semble avoir soudainement réalisé l’importance de la mainmise du clan présidentiel sur les institutions du pays. C’est ce qui explique sans doute que des personnalités politiques aussi différentes que l’actuel secrétaire général du FLN, Ali Benflis, que le général à la retraite, Rachid Benyellès, ou encore l’islamiste modéré Ahmed Taleb Ibrahimi, se soient, une fois n’est pas coutume, unies pour réclamer un scrutin transparent.
Dans un communiqué commun, onze candidats déclarés ou potentiels à la présidentielle d’avril prochain ont en effet réclamé le départ du gouvernement d’Ahmed Ouyahia –dont le parti, le Rassemblement national démocratique, a d’ores et déjà apporté son soutien à la candidature du président sortant– et son remplacement par «un cabinet intérimaire consensuel», dont la mission sera de préparer ce scrutin. Ce cabinet, précise le texte , devra être composé «en concertation avec les forces politiques et sociales» et aura également en charge «la gestion des affaires courantes». Ces personnalités politiques, parmi lesquelles on compte cinq anciens Premiers ministres, réclament en outre «l’installation d’une instance indépendante» pour le suivi et le contrôle de l’élection présidentielle.
La neutralité annoncée de l’armée
Faisant valoir que «la nation algérienne vit une phase historique dangereuse», les signataires estiment que le pays doit coûte que coûte se «doter d’un pouvoir légitime, issu d’une élection sincère, régulière et transparente». Dans ce contexte, ils mettent en garde contre le climat qui prévaut actuellement en Algérie, marqué selon eux par «la transgression des principes constitutionnels, l’instrumentalisation de la justice, la vassalisation de l’administration, les atteintes au pluralisme et la confiscation des médias audiovisuels» par le président Abdelaziz Bouteflika. L’évolution de la situation politique en Algérie inquiète depuis plusieurs mois les démocrates, dont beaucoup n’hésitent plus à dénoncer «une tentation dictatoriale» de l’actuel chef de l’Etat. Ils mettent notamment en cause les moyens financiers mis à la disposition d’Abdelaziz Bouteflika qui n’a récemment eu aucun scrupule à se servir dans les caisses de l’Etat pour distribuer des subventions et lancer des projets de développement à l’occasion de ses voyages à travers le pays.
Dans ce contexte, la question qui occupe tous les esprits en Algérie est aujourd’hui: pour qui votent les généraux ? L’armée, qui a toujours joué un rôle majeur bien qu’officieux sur la scène politique, s’est en effet engagée il y a quelques mois déjà à observer une stricte neutralité lors du prochain scrutin. Le chef d’état-major, le général Mohamed Lamari a ainsi, à plusieurs reprises, assuré d’«une manière claire et solennelle» que la grande muette saurait rester «neutre». Comme gage de bonne foi, un amendement à la loi électorale vient de supprimer début janvier «les bureaux de vote spéciaux» dans les casernes afin de permettre aux soldats de voter librement dans leur lieu de résidence ou par procuration.
Mais ironie du sort et alors qu’en 1999 les candidats à la présidentielle revendiquaient en vain que l’armée reste en dehors du scrutin et ne favorise aucun prétendant à la présidence du pays, il semblerait que sa neutralité affichée d’aujourd’hui fasse l’objet de toutes les critiques. «C’est une fausse neutralité car elle laisse les mains libres au président de la République pour utiliser les moyens de l’Etat en vue de sa réélection», affirme-t-on dans les milieux de l’opposition. Ainsi pour le secrétaire général du Rassemblement pour la culture et la démocratie, Saïd Saadi, «la neutralité ne vaut que si elle s’impose à l’ensemble des institutions. Si un seul segment de l’Etat est invité au désengagement, cela n’est plus une neutralité mais une neutralisation».
Avec la mise à l’écart de la formidable machine électorale qu’est le Front de libération nationale –et de son secrétaire général, Ali Benflis, seul rival sérieux du chef de l’Etat– et la neutralité bienveillante de l’armée, la réélection du président sortant Abdelaziz Bouteflika –même si ce dernier n’a toujours pas annoncé officiellement sa candidature– paraît n’être aujourd’hui qu’une formalité.
Dans un communiqué commun, onze candidats déclarés ou potentiels à la présidentielle d’avril prochain ont en effet réclamé le départ du gouvernement d’Ahmed Ouyahia –dont le parti, le Rassemblement national démocratique, a d’ores et déjà apporté son soutien à la candidature du président sortant– et son remplacement par «un cabinet intérimaire consensuel», dont la mission sera de préparer ce scrutin. Ce cabinet, précise le texte , devra être composé «en concertation avec les forces politiques et sociales» et aura également en charge «la gestion des affaires courantes». Ces personnalités politiques, parmi lesquelles on compte cinq anciens Premiers ministres, réclament en outre «l’installation d’une instance indépendante» pour le suivi et le contrôle de l’élection présidentielle.
La neutralité annoncée de l’armée
Faisant valoir que «la nation algérienne vit une phase historique dangereuse», les signataires estiment que le pays doit coûte que coûte se «doter d’un pouvoir légitime, issu d’une élection sincère, régulière et transparente». Dans ce contexte, ils mettent en garde contre le climat qui prévaut actuellement en Algérie, marqué selon eux par «la transgression des principes constitutionnels, l’instrumentalisation de la justice, la vassalisation de l’administration, les atteintes au pluralisme et la confiscation des médias audiovisuels» par le président Abdelaziz Bouteflika. L’évolution de la situation politique en Algérie inquiète depuis plusieurs mois les démocrates, dont beaucoup n’hésitent plus à dénoncer «une tentation dictatoriale» de l’actuel chef de l’Etat. Ils mettent notamment en cause les moyens financiers mis à la disposition d’Abdelaziz Bouteflika qui n’a récemment eu aucun scrupule à se servir dans les caisses de l’Etat pour distribuer des subventions et lancer des projets de développement à l’occasion de ses voyages à travers le pays.
Dans ce contexte, la question qui occupe tous les esprits en Algérie est aujourd’hui: pour qui votent les généraux ? L’armée, qui a toujours joué un rôle majeur bien qu’officieux sur la scène politique, s’est en effet engagée il y a quelques mois déjà à observer une stricte neutralité lors du prochain scrutin. Le chef d’état-major, le général Mohamed Lamari a ainsi, à plusieurs reprises, assuré d’«une manière claire et solennelle» que la grande muette saurait rester «neutre». Comme gage de bonne foi, un amendement à la loi électorale vient de supprimer début janvier «les bureaux de vote spéciaux» dans les casernes afin de permettre aux soldats de voter librement dans leur lieu de résidence ou par procuration.
Mais ironie du sort et alors qu’en 1999 les candidats à la présidentielle revendiquaient en vain que l’armée reste en dehors du scrutin et ne favorise aucun prétendant à la présidence du pays, il semblerait que sa neutralité affichée d’aujourd’hui fasse l’objet de toutes les critiques. «C’est une fausse neutralité car elle laisse les mains libres au président de la République pour utiliser les moyens de l’Etat en vue de sa réélection», affirme-t-on dans les milieux de l’opposition. Ainsi pour le secrétaire général du Rassemblement pour la culture et la démocratie, Saïd Saadi, «la neutralité ne vaut que si elle s’impose à l’ensemble des institutions. Si un seul segment de l’Etat est invité au désengagement, cela n’est plus une neutralité mais une neutralisation».
Avec la mise à l’écart de la formidable machine électorale qu’est le Front de libération nationale –et de son secrétaire général, Ali Benflis, seul rival sérieux du chef de l’Etat– et la neutralité bienveillante de l’armée, la réélection du président sortant Abdelaziz Bouteflika –même si ce dernier n’a toujours pas annoncé officiellement sa candidature– paraît n’être aujourd’hui qu’une formalité.
par Mounia Daoudi
Article publié le 13/01/2004