Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Etats-Unis

Volonté française de rapprochement

Les relations entre Paris et Washington seraient-elles à la détente ? La visite aux Etats-Unis de la ministre française de la Défense, Michèle Alliot-Marie, pourrait être un signe du réchauffement de ces relations, sérieusement mises à mal par la guerre contre le régime de Saddam Hussein à laquelle les autorités françaises s’étaient violemment opposées. Et cela d’autant plus qu’en début de semaine, le secrétariat d’Etat américain a laissé entendre que la France pourrait participer, «si les circonstances changent», aux appels d’offre qui seront prochainement lancés dans le cadre de la reconstruction de l’Irak.
Michèle Alliot-Marie se veut optimiste. «Mon sentiment, c’est qu’il y a une véritable volonté de tourner la page des tensions entre les Etats-Unis et la France», a en effet affirmé la ministre française à l’issue de ses entretiens avec son homologue, Donald Rumsfeld, et avec la conseillère de George Bush pour la sécurité, Condoleezza Rice. Elle en outre souligné avoir remarqué «une grande capacité d’écoute» de la part de ses interlocuteurs avec qui, a-t-elle dit, elle a pu avoir «de vraies discussions» sur notamment l’Europe de la Défense. «J’ai vraiment eu l’impression que la situation s’était débloquée et qu’il y a une envie de reprendre les relations normales», a même insisté la ministre, visiblement enchantée de l’accueil qui lui a été réservé.

Concernant le sujet qui fâche, à savoir l’Irak, Michèle Alliot-Marie a saisi l’occasion de sa visite pour rappeler une nouvelle fois la position de Paris. «Il n’est pas question que la France envoie des soldats en Irak», a-t-elle affirmé soulignant que le souhait des autorités françaises était de voir les Irakiens retrouver le plus rapidement possible leur souveraineté. «Quand cela sera fait, a-t-elle ajouté, alors nous serons disponibles pour participer, par exemple, à la formation de la future armée, de la future police et de la future gendarmeries en liaison avec les Allemands». La ministre a en outre rappelé la disponibilité de la France à participer à la reconstruction de l’Irak, une fois le pouvoir transmis à une autorité représentative.

Le chef de la diplomatie française, Dominique de Villepin, a précisé depuis Paris que la France travaillait «d’ores et déjà» à la possibilité de répondre à une éventuelle demande de l’Irak d’une assistance dans le domaine de la sécurité, une fois que le transfert de souveraineté, prévu le 30 juin prochain, sera effectif. Il a également rappelé que l’actuel problème auquel est confronté la France est «la question du vide politique actuel» en Irak.

L’Elysée reste prudent

Cette mise au point française intervient alors que les Etats-Unis semblent mieux disposés envers la France après des mois de tensions. La France, qui a été l’un des pays les plus en pointe contre une intervention militaire en Irak, affichait depuis plusieurs mois déjà la volonté de tourner la page sur ses profondes divergences avec Washington. Mais les faucons de l’administration Bush s’y sont violemment opposés. La semaine dernière encore, Richard Perle, l’un des principaux conseillers du Pentagone, dénonçait dans un nouvel ouvrage intitulé Une fin au diable «l’ambition» française de faire de l’Europe «un contrepoids anti-américain». Il y qualifie en outre la diplomatie française d’«hostile» et propose de «limiter la coopération militaire et en matière de renseignement» avec l’Hexagone.

Ce point de vue, partagé par d’autres conseillers de l’administration Bush, ne semble toutefois plus aujourd’hui majoritaire à Washington. Le porte-parole du conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, Sean McCormack, qui accompagnait la semaine dernière le président George Bush au sommet des Amériques à Monterrey, a en effet indiqué que la France ainsi que d’autres pays pourraient être impliqués dans la reconstruction de l’Irak. «Le président a indiqué qu’il souhaite que l’on reconnaisse la contribution du Canada apportée à Madrid –lors de la conférence des donateurs– et que si la France et d’autres pays veulent s’unir à nos efforts en Irak, les circonstances changeront», a-t-il notamment déclaré. A Washington, un haut responsable du Pentagone annonçait parallèlement qu’une deuxième série d’appels d’offre pour des contrats en Irak allait bientôt être ouverte à davantage de pays que la première mais que la liste de ces pays n’avait toujours pas été arrêtée. Les Etats-Unis avaient exclu les entreprises des pays qui s’étaient opposés à la guerre en Irak de la première tranche d’appels d’offre qu’ils financent.

La présidence française a toutefois réagi avec prudence à ce changement de position inattendu. L’Elysée s’est en effet contenté d’indiquer que la France avait «été informé qu’une redéfinition des conditions d’appels d’offre américains était en cours» et qu’elle en avait «pris note». Le conseiller diplomatique de Jacques Chirac doit se rendre à la fin du mois à Washington.

A écouter :

Michèle Alliot-Marie, ministre française de la Défense, invitée de Noëlle Velly (le 19/01/2004).



par Mounia  Daoudi

Article publié le 16/01/2004