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Politique française

Un ministre, mis en examen, démissionne

Le secrétaire d’Etat auprès du ministre de la Justice, Pierre Bédier, a quitté le gouvernement après avoir été mis en examen pour corruption passive et il a été immédiatement remplacé par Nicole Guedj. Il paye l’application du principe qui prévaut depuis le début des années 90 selon lequel un ministre mis en examen doit démissionner.
Pierre Bédier a démissionné de ses fonctions de secrétaire d’Etat aux Programmes immobiliers de la Justice dès sa mise en examen par le juge d’instruction du pôle financier de Paris, Philippe Courroye. L’ancien député-maire UMP de Mantes-la-jolie, en banlieue parisienne, est soupçonné d’avoir perçu des fonds en espèces de la part du patron d’une société de nettoyage en échange de l’attribution des marchés de sa ville à cette société. Le juge y a vu matière à mise en examen pour «corruption passive et recel et abus de biens sociaux».

C’est la huitième fois depuis le début de la V° République qu’un ministre quitte ses fonctions en raison de sa mise en cause dans une affaire judiciaire. Le premier cas s’est produit en 1972 dans le gouvernement Chaban-Delmas pour Philippe Dechartre, secrétaire d’Etat auprès du ministre du Travail. Mais, depuis 1992, c’est devenu un principe initié par le Premier ministre Pierre Bérégovoy et qui a été repris ensuite par tous les gouvernements qu’ils soient de droite ou de gauche. En vertu de ce que l’on a pris coutume de nommer la «jurisprudence Bérégovoy-Balladur» six ministres avant Pierre Bédier ont été contraints de renoncer à leur maroquin : Bernard Tapie en 1992, Alain Carignon, Gérard Longuet et Michel Roussin en 1994, Dominique Strauss-Kahn en 1999 et Renaud Donnedieu de Vabres en 2002.

Cette manière de se retirer momentanément doit permettre au ministre mis en cause de se défendre devant la justice et met par ailleurs le gouvernement à l’abri des éclaboussures éventuelles. Comme l’a rappelé le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin en acceptant la démission de Pierre Bédier, cela ne remet pas en question la présomption d’innocence qui prévaut dans le droit français tant qu’un accusé n’a pas été condamné. D’ailleurs, parmi ceux qui ont du quitter leurs fonctions dans ces conditions la plupart ont ensuite bénéficié d’un non-lieu comme Bernard Tapie ou Michel Roussin ou ont été relaxés, comme Gérard Longuet ou Dominique Strauss-Kahn. Seul Alain Carignon a été condamné à une peine de prison ferme.

Candidature aux régionales maintenue

Gênante pour Pierre Bédier à titre personnel et pour la majorité à laquelle il appartient cette mise en examen ne vaut donc pas aveu, ni culpabilité. Poussant cette logique jusqu’au bout l’UMP a décidé de maintenir sa candidature aux élections régionales des 21 et 28 mars en Ile-de-France. Le candidat UMP à la présidence de la région Ile-de-France, Jean-François Copé, a fait savoir que Pierre Bédier conservait sa confiance et qu’il continuerait donc à mener la campagne du parti lié à Jacques Chirac dans le département des Yvelines.

Cet incident, à deux mois des régionales, n’est cependant pas le bienvenu car le leader de la liste UMP Jean-François Copé est actuellement devancé dans les sondages par son rival UDF André Santini. Par ailleurs il a subi cette semaine une autre déconvenue avec le refus de Cécilia Sarkozy, l’épouse du populaire ministre de l’Intérieur, de figurer sur sa liste alors qu’il en attendait un «plus» dans la bataille électorale au sein de la droite parlementaire.

La rapidité avec laquelle Pierre Bédier a été remplacé au gouvernement par l’avocate Nicole Guedj est un signe que le président de la République et le Premier ministre ont renoncé à procéder à un remaniement ministériel plus large avant les échéances électorales. Voilà qui laisse un peu de répit à ceux des ministres que l’on dit en danger : Roselyne Bachelot à l’Environnement, Jean-François Mattéi à la Santé ou Luc Ferry à l’Education.



par Francine  Quentin

Article publié le 22/01/2004