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Irak

L’ONU juge impossible des élections avant 2005

Kofi Annan a indiqué lundi que des mois de travail seront encore nécessaires avant de pouvoir organiser des élections «crédibles» en Irak. Le secrétaire général de l’organisation internationale avait dépêché au début du mois une équipe d’experts chargée d’étudier la faisabilité ou non d’un scrutin avant le 30 juin, date à laquelle la coalition au pouvoir doit transférer le pouvoir aux Irakiens. Un rapport de son envoyé spécial en Irak, Lakhdar Brahimi, a été remis lundi au Conseil de sécurité.
L’un des principaux acquis de ce rapport des Nations unis aura été de désamorcer la grave crise qui couvait depuis des semaines entre les autorités de la coalition et la communauté chiite, majoritaire dans le pays et qui réclamait la mise en place d’élections générales rapides. L’organisation internationale a en effet réussi à convaincre toutes les parties qu’il était impossible de préparer dans un délai aussi court un scrutin qui soit «crédible». Kofi Annan a ainsi rappelé lundi qu’«il serait extrêmement difficile et peut-être même dangereux» de tenter de le faire. Il a notamment souligné que la sécurité en Irak devra avant toute chose être «considérablement améliorée de manière à garantir l’honnêteté des opérations électorales et la crédibilité du processus».

Autre soulagement pour les autorités de la coalition, les Nations unies ne remettent pas non plus en cause le transfert du pouvoir aux Irakiens que l’administration Bush, échéance électorale oblige, ne souhaite pas différer. Le rapport de Lakhdar Brahimi fait en revanche voler en éclats les dispositions prises en ce sens par l’administrateur américain Paul Bremer et signées en hâte par le gouvernement provisoire irakien le 15 novembre dernier. Ces dispositions prévoyaient dans un premier temps la mise en place d’une Assemblée nationale transitoire désignée par un scrutin indirect fin mai et dont la principale mission aurait été de rédiger une constitution. Une Assemblée constituante devait ensuite être élue en mars 2005 au suffrage direct, cette deuxième instance ayant notamment en charge la préparation des élections générales à la fin du mois de décembre.

Dans son rapport, l’envoyé spécial de Kofi Annan suggère donc de simplifier radicalement le processus en proposant l'élection au suffrage universel d'une seule assemblée qui rédigera la Constitution et aura une fonction législative. Pour ce faire, un accord doit être trouvé par les forces politiques irakiennes d’ici le mois de mai afin de pouvoir organiser des élections au plus tôt en janvier 2005. L’ONU, qui estime qu’il faudra établir de nouvelles listes électorales, conseille aux parties en présence un scrutin à la proportionnelle par listes car, estime-t-elle, cette méthode est «plus rapide et plus aisée» qu'un système de vote par circonscriptions.

Un nouveau «rôle vital» pour les Nations unies ?

Visiblement soulagé de voir l’ONU reprendre du service en Irak, l’administrateur américain Paul Bremer a qualifié le rapport de Lakhdar Brahimi de «contribution constructive». «Nous partageons les positions de l'ONU sur l'importance des élections directes aussi tôt que possible et en même temps nous partageons aussi ses préoccupations sur la faisabilité de tenir un scrutin directe honnête dans les prochains mois», a-t-il notamment souligné. Rompant avec ses positions passées, le responsable américain a même affirmé souhaiter «voir l'Onu impliquée dans les prochaines étapes, y compris l'établissement d'un gouvernement provisoire pour la période suivant le 30 juin».

L’exécutif provisoire irakien semble également approuver ce retour au premier plan de l’organisation internationale. «Le rapport de l'Onu va dans la bonne direction» a ainsi estimé son porte-parole. Le Conseil de gouvernement transitoire s’est réuni dès mardi pour étudier ce texte et certains de ses membres préconisent d’ores et déjà un rôle primordial pour les Nations unies. «Il y a plusieurs moyens pour que l'Onu aide les Irakiens dans les discussions intensives sur la mise en place d'un gouvernement provisoire», a notamment affirmé Adnane Pachachi. Selon lui, «le moyen idéal serait de demander à l'organisation internationale d'envoyer un représentant dès à présent et de commencer les discussions pour décider comment choisir le cabinet provisoire qui restera en place 6 à 7 mois». Cet appel à un retour rapide des Nations unies en Irak constitue une belle revanche pour l’organisation internationale qui avait été écartée par l’administration Bush de la gestion de l’après-guerre.



par Mounia  Daoudi

Article publié le 24/02/2004