Justice
FNSEA : scandale financier politico-agricole
Deux anciens dirigeants du principal syndicat agricole français sont mis en examen pour détournements de fonds présumés. Cette nouvelle «affaire» trouble le secteur agricole et pourrait bien avoir des répercussions politiques rapides en raison des liens privilégiés de la FNSEA avec les différents gouvernements depuis 40 ans.
Après les «affaires» de financement illégal des partis politiques, la mise en examen de deux anciens dirigeants de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) ouvre une nouvelle voie aux scandales financiers, dans le milieu du syndicalisme agricole cette fois. Luc Guyau, ancien président de la FNSEA, de 1992 à 2001, et Yves Salmon, ancien directeur général de 1993 à 2001, se voient reprocher d’éventuels «abus de biens sociaux, complicité et recel» dans une enquête portant sur des détournements de fonds au profit de leur organisation.
A l’origine, un rapport de la Cour des comptes, en 1998, soulignant que la Confédération nationale de l’élevage aurait reçu des fonds d’un organisme professionnel alimenté par tous les agriculteurs afin de payer sa cotisation à la FNSEA. Il s’agirait donc là d’un financement indirect du syndicat agricole par le biais de prélèvements obligatoires. En 2000, l’Organisation des producteurs de grains (OPG) qui fait partie d’un petit syndicat concurrent de la FNSEA, la Coordination rurale, porte plainte. Quatre ans après, l’instruction aboutit à ces deux mises en examen qui relancent la polémique sur le caractère hégémonique de la FNSEA dans le milieu du syndicalisme agricole et la protection dont elle ferait l’objet de la part des ministres de l’Agriculture, notamment de droite, depuis les années 60.
Cogestion, coresponsabilité
José Bové, porte-parole de la Confédération paysanne, principal adversaire de la FNSEA, jubile. Il dénonce la «cogestion de plus de trente ans» entre la FNSEA et les pouvoirs publics. La FNSEA utiliserait «l’argent de tous les paysans à ses propres fins pour promouvoir sa logique économique». Et la FNSEA «a toujours été l’outil des gouvernements de droite comme de gauche pour mener à bien leur politique». Selon lui, il y a donc «coresponsabilité» de la part des partis politiques et des gouvernements qui se sont succédé en cautionnant le système. Pour le leader de la Confédération paysanne la FNSEA a été, jusqu’en 1999, l’unique interlocuteur des pouvoirs publics. Depuis cette date et la reconnaissance du pluralisme syndical agricole, les élections aux chambres d’agriculture enregistrent un recul progressif de la FNSEA. Toutefois cette organisation a encore obtenu 53% des suffrages des agriculteurs en 2001.
Opposée à la FNSEA sur l’avenir de l’agriculture française et la mondialisation, la Confédération paysanne a souvent comparé la mansuétude, voire l’impunité, dont bénéficie son concurrent avec les condamnations de ses propres militants dans les affaires de destruction d’OGM. Ainsi, le saccage en 1999 du bureau de Dominique Voynet alors ministre écologiste de l’Environnement par cinq militants de la FNSEA n’a donné lieu à aucune poursuite.
L’actuel président de la FNSEA Jean-Michel Lemétayer veut voir dans cette affaire l’attaque d’un syndicat concurrent. Mais il ne s’arrête pas là. Il rappelle que la gestion de ces fonds agricoles «se fait depuis une vingtaine d’années sous la tutelle des ministères de l’Agriculture et des Finances». Il demande donc que les ministres et anciens ministres concernés soient entendus par la justice pour faire toute la lumière.
Ainsi, les répercussions politiques de ce nouveau scandale financier ne devrait pas tarder. En effet outre les liens «privilégiés» du syndicat avec les différents gouvernements, des passerelles ont souvent joué entre les deux. Deux anciens présidents de la FNSEA sont devenus ministres de l’Agriculture : Michel Debatisse, dans le gouvernement Raymond Barre de 1979 à 1981, et François Guillaume, dans le gouvernement Jacques Chirac de 1986 à 1988. Plus récemment Luc Guyau lui-même vient d'être nommé responsable des questions agricoles et agroalimentaires de l’UMP, le parti présidentiel.
A l’origine, un rapport de la Cour des comptes, en 1998, soulignant que la Confédération nationale de l’élevage aurait reçu des fonds d’un organisme professionnel alimenté par tous les agriculteurs afin de payer sa cotisation à la FNSEA. Il s’agirait donc là d’un financement indirect du syndicat agricole par le biais de prélèvements obligatoires. En 2000, l’Organisation des producteurs de grains (OPG) qui fait partie d’un petit syndicat concurrent de la FNSEA, la Coordination rurale, porte plainte. Quatre ans après, l’instruction aboutit à ces deux mises en examen qui relancent la polémique sur le caractère hégémonique de la FNSEA dans le milieu du syndicalisme agricole et la protection dont elle ferait l’objet de la part des ministres de l’Agriculture, notamment de droite, depuis les années 60.
Cogestion, coresponsabilité
José Bové, porte-parole de la Confédération paysanne, principal adversaire de la FNSEA, jubile. Il dénonce la «cogestion de plus de trente ans» entre la FNSEA et les pouvoirs publics. La FNSEA utiliserait «l’argent de tous les paysans à ses propres fins pour promouvoir sa logique économique». Et la FNSEA «a toujours été l’outil des gouvernements de droite comme de gauche pour mener à bien leur politique». Selon lui, il y a donc «coresponsabilité» de la part des partis politiques et des gouvernements qui se sont succédé en cautionnant le système. Pour le leader de la Confédération paysanne la FNSEA a été, jusqu’en 1999, l’unique interlocuteur des pouvoirs publics. Depuis cette date et la reconnaissance du pluralisme syndical agricole, les élections aux chambres d’agriculture enregistrent un recul progressif de la FNSEA. Toutefois cette organisation a encore obtenu 53% des suffrages des agriculteurs en 2001.
Opposée à la FNSEA sur l’avenir de l’agriculture française et la mondialisation, la Confédération paysanne a souvent comparé la mansuétude, voire l’impunité, dont bénéficie son concurrent avec les condamnations de ses propres militants dans les affaires de destruction d’OGM. Ainsi, le saccage en 1999 du bureau de Dominique Voynet alors ministre écologiste de l’Environnement par cinq militants de la FNSEA n’a donné lieu à aucune poursuite.
L’actuel président de la FNSEA Jean-Michel Lemétayer veut voir dans cette affaire l’attaque d’un syndicat concurrent. Mais il ne s’arrête pas là. Il rappelle que la gestion de ces fonds agricoles «se fait depuis une vingtaine d’années sous la tutelle des ministères de l’Agriculture et des Finances». Il demande donc que les ministres et anciens ministres concernés soient entendus par la justice pour faire toute la lumière.
Ainsi, les répercussions politiques de ce nouveau scandale financier ne devrait pas tarder. En effet outre les liens «privilégiés» du syndicat avec les différents gouvernements, des passerelles ont souvent joué entre les deux. Deux anciens présidents de la FNSEA sont devenus ministres de l’Agriculture : Michel Debatisse, dans le gouvernement Raymond Barre de 1979 à 1981, et François Guillaume, dans le gouvernement Jacques Chirac de 1986 à 1988. Plus récemment Luc Guyau lui-même vient d'être nommé responsable des questions agricoles et agroalimentaires de l’UMP, le parti présidentiel.
par Francine Quentin
Article publié le 09/02/2004