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Terrorisme

L’Union européenne resserre les rangs

Après les sanglants attentats de Madrid, les menaces directes reçues par plusieurs pays européens (France, Grande-Bretagne, Italie) ont ravivé les craintes de voir les terroristes s’en prendre à d’autres cibles sur le continent. Les vingt-cinq pays de l’Union européenne ont donc décidé immédiatement de renforcer leur coopération en matière de lutte contre le terrorisme. Les ministres de l’Intérieur et de la Justice se sont rencontrés le 19 mars, à Bruxelles, pour étudier un arsenal de mesures susceptibles notamment de permettre l’échange d’informations entre les différents services de renseignement et la nomination d’un «monsieur Terrorisme».
Le projet de «CIA européenne» est loin de faire l’unanimité. La proposition de créer dans le cadre européen une structure d’échange et de traitement des renseignements, un peu sur le modèle de l’agence américaine, émise par l’Autriche et la Belgique dès après les attentats de Madrid le 11 mars dernier, a été de nouveau étudiée lors de la réunion des ministres de l’Intérieur et de la Justice des Vingt-cinq, à Bruxelles. Mais il semble qu’elle n’a pas obtenu l’écho souhaité auprès de pays comme la Grande-Bretagne, l’Allemagne ou la France. Ces derniers demeurent soucieux de préserver leurs prérogatives en matière de renseignement et craignent d’être contraints dans le cadre d’une telle structure d’échanger des informations sensibles sans garanties d’efficacité.

Les ministres de l’Intérieur du G5 (France, Royaume Uni, Allemagne, Espagne, Italie) qui se sont réunis, à l’occasion d’un petit déjeuner de travail avant l’ouverture de la réunion avec les autres représentants de l’UE, se sont quant à eux déclarés plutôt favorables à la formalisation de rencontres entre les chefs des services de renseignement dans le but de faciliter les échanges d’informations sans créer un nouveau «machin». Nicolas Sarkozy, le ministre français de l’Intérieur, a proposé que ce rapprochement ait lieu dans le cadre du Groupe d’action anti-terroriste (les 25 avec la Norvège et la Suisse), créé après les attentats du 11 septembre, pour éviter une dérive bureaucratique dans un domaine où il est avant tout nécessaire de devenir plus opérationnel. Les ministres du G5 ont d’ailleurs annoncé, dans la foulée de leur rencontre en comité restreint, que les chefs des services de renseignement de leurs pays, allaient se réunir dès le lundi 22 mars à Madrid pour «évaluer la menace et encore mieux travailler ensemble». Cette première rencontre doit être suivie d’une réunion identique mais élargie à tous les pays membres de l’UE, dès les jours suivants. Les directeurs des polices des vingt-cinq pays de l’UE doivent eux aussi se rencontrer à Dublin lundi pour discuter de la menace terroriste.

Réactiver Europol et Eurojust

Le ministre allemand de l’Intérieur, Otto Schilly, a d’autre part plaidé pour la mise en œuvre d’un «réseau d’information» européen contre le terrorisme pour permettre la mise en commun rapide et sécurisée de données telles que les visas, les traces d’ADN, les empreintes digitales. Le principe de cette proposition a été adopté par les Vingt-cinq. Mais aucune décision n’a été prise pour le moment concernant le cadre dans lequel cette instance va s’insérer. La France estime qu’il n’est pas nécessaire de créer une nouvelle institution et prône l’utilisation de structures existantes. Europol, un organisme qui a vocation à coordonner les renseignements policiers en fait partie. Tout comme son équivalent pour la justice, baptisé Eurojust. Ces structures devraient être réactivées et pourraient mettre leurs infrastructures au service de la lutte anti-terroristes.

Des mesures concrètes ont aussi été annoncées. D’ici 2005, c’est à dire au moins un an avant la date prévue à l’origine, les données biométriques comme les empreintes digitales, la reconnaissance faciale ou l’iris de l’œil, par exemple, devraient être incluses dans les passeports grâce à une puce électronique.

La principale nouveauté sur laquelle l’ensemble des ministres des Vingt-cinq se sont mis d’accord concerne la proposition de nommer un «monsieur Terrorisme». Ce nouveau poste devrait être confié à un haut fonctionnaire et placé sous l’autorité du Haut représentant pour la politique étrangère, Javier Solana. De ce fait, il dépendra directement des Etats et non de la Commission européenne. Sa mission sera de coordonner la lutte anti-terroriste et de s’assurer notamment que les Etats membres respectent les accords communautaires dans ce domaine. A titre d’exemple, le mandat d’arrêt européen qui facilite les mesures d’extradition n’a pas encore été adopté par cinq des quinze pays européens actuels (Italie, Allemagne, Autriche, Pays-Bas, Grèce). L’ensemble de ces propositions doivent être examinées par les chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union lors de leur prochain sommet, les 25 et 26 mars, à Bruxelles, qui sera largement consacré à la lutte contre le terrorisme.



par Valérie  Gas

Article publié le 19/03/2004