Etats-Unis
Rice en première ligne pour défendre Bush
(Photo: AFP)
Trois heures durant, l’ex-étudiante prodige, l’ancienne universitaire brillante que fut Condoleezza Rice a passé le «grand oral» le plus éprouvant de toute sa carrière. Témoignant sous serment devant la commission parlementaire d’enquête sur les attentats du 11 septembre, la conseillère pour la sécurité nationale du président Bush s’en est tirée plus qu’honorablement.
L’exercice était pourtant périlleux. Pour elle d’abord. Car témoignant sous serment, elle devait répondre aux questions gênantes posée par le témoignage accablant de l’ancien responsable de la lutte antiterroriste de la Maison Blanche Richard Clarke. Elle a réussi à éviter de répondre directement à ses mises en cause, tout en suggérant une orientation fondamentalement différente. Pour elle, dès sa prise de fonction, le président Bush était conscient de la menace terroriste d’Al Qaïda et n’était pas obsédé par le désir d’en découdre avec l’Irak. D’ailleurs, affirme Condoleezza Rice, aucun de ses conseillers ne lui a jamais recommandé de s’en prendre à l’Irak. (A noter que ni le vice-président Cheney, ni le secrétaire adjoint à la Défense Paul Wolfowitz ne sont à proprement parler des conseillers).
L’actuelle conseillère nationale à la sécurité a rendu un hommage aussi appuyé qu’inattendu au travail mené dans la lutte contre Oussama Ben Laden par l’administration Clinton et son prédécesseur Samuel berger. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la nouvelle administration a conservé une partie de l’équipe précédente, dont le directeur de la CIA George Tenet et Richard Clarke lui-même.
Mission accomplie
Maîtrisant son sujet sur le bout des doigts (dates des mémos, emails, réunions) pour répondre à ses dix questionneurs qui lui posaient des questions précises, elle a répondu le plus souvent précisément, admettant une fois ou deux ne plus se souvenir, restant en toute occasion souriante et sûre d’elle-même, sauf en une brève occasion, lorsqu’un parlementaire l’a coupée plusieurs fois pour lui demander de répondre précisément à une question sans digressions. Plus d’une fois, la salle a éclaté en applaudissements pour appuyer l’un des membres de la commission contredisant Rice. Il en fallait plus pour démonter cette dernière, qui a néanmoins souligné à plusieurs reprises qu’il existait des désaccords entre elle et tel ou tel membre de la commission. Histoire de faire comprendre aux millions de téléspectateurs, rivés devant leur poste, que la moitié de ses tourmenteurs sont des Démocrates, adversaires du président Bush qui a tant fait pour la sécurité du pays et que les arrières-pensées politiques ne sont pas absentes de cet interrogatoire auquel la Maison Blanche s’était dans un premier temps refusé.
C’est qu’au-delà du sort personnel de Condoleezza Rice, c’est celui de George Bush qui se jouait. En novembre prochain, il va demander aux électeurs américains de le reconduire à son poste en tant que «président de guerre». Rien ne serait plus désastreux qu’une mise en évidence qu’au début de sa présidence, il a négligé les signaux qui auraient permis d’éviter les attentats du 11 septembre 2001.
Au sortir de l’audition, Condoleezza Rice peut estimer qu’elle a rempli son contrat. Elle n’aura sans doute pas réussi à faire changer d’avis les adversaires du président Bush, mais elle aura contenu les dommages causés par le témoignage de son ancien adjoint Richard Clarke. Mission accomplie, George Bush pouvait difficilement espérer davantage.
par Olivier Da Lage
Article publié le 08/04/2004 Dernière mise à jour le 08/04/2004 à 14:05 TU