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Turquie

Tony Blair reçu à Ankara

Le premier ministre britannique Tony Blair et son homologue turc, Recep Tayyip Erdogan. 

		(Photo: AFP)
Le premier ministre britannique Tony Blair et son homologue turc, Recep Tayyip Erdogan.
(Photo: AFP)
La visite de Tony Blair en Turquie est essentiellement consacrée au dossier chypriote, à la coopération antiterroriste et à la candidature d’Ankara à l’Union européenne. Mais M. Blair arrive dans un pays majoritairement hostile à sa politique étrangère, estimée trop alignée sur Washington.

C’est dans une ambiance marquée par une série d’attentats visant les intérêts britanniques que Tony Blair aura effectué sa courte visite de travail en Turquie. Les quatre bombes ont en effet explosé dimanche soir à Ankara et Istanbul (deux dans chaque ville) aux abords des agences de la banque britannique HSBC. Les engins, de faible puissance, ont occasionné quelques dégâts matériels, mais il n’y a pas eu de victimes. Rien à voir, donc, avec les puissantes déflagrations qui, au mois de novembre, avaient notamment ravagé le siège de la HSBC, et qui avaient tué 61 personnes, dont le consul de Grande-Bretagne.

Ces attentats montrent en tout cas que Londres demeure une cible dans la région en raison du soutien de ses autorités à la politique extérieure américaine, en particulier en Irak où les soldats britanniques apportent une contribution capitale à la coalition dirigée par Washington. L’opinion publique turque, majoritairement hostile au recours à la guerre contre Saddam Hussein, a également été profondément choquée, de même que ses dirigeants, par les révélations sur le traitement infligé aux détenus irakiens et deux manifestations ont eu lieu, l’une à Ankara et l’autre à Istanbul, pour protester à l’appel des organisations de gauche contre la visite de M. Blair. Il n’y a pas eu d’incidents.

Mais Londres ne compte pas, loin de là, que des adversaires à Ankara. Indépendamment de leur politique étrangère, jugée trop alignée sur celle de Washington, les autorités britanniques comptent parmi les avocats les plus fervents de l’entrée de la Turquie au sein de l’Union européenne (UE), au moment où le débat vient de resurgir à moins d’un mois de l’élection des députés du parlement de l’UE. La Turquie poursuit, à marche législative forcée, l’adoption des réformes qui devraient rendre possible, à partir de la fin de l’année, l’examen de sa demande d’adhésion. Et elle dispose de l’appui plus ou moins prononcé d’un certain nombre de «poids lourds» européens, parmi lesquels, l’Allemand Gerhard Schröder, le Français Jacques Chirac et le Britannique Tony Blair.

Attentat contre l’Otan déjoué

La Turquie et la Grande-Bretagne ont en charge une histoire et des problèmes communs. Tous deux sont des piliers de l’organisation militaire occidentale Otan qui tiendra son prochain sommet à Istanbul, les 28 et 29 juin. Tous deux sont impliqués dans la lutte contre le terrorisme international et l’islamisme radical: Londres en participant à des opérations extérieures, Ankara en affrontant un terrorisme intérieur présenté comme l’oeuvre d’Al-Qaïda et dont les autorités ont annoncé qu’elles avaient récemment déjoué un attentat islamiste en préparation contre le sommet de l’Otan. La Turquie est également présente en Afghanistan où ses soldats participent aux opérations militaires au titre de la forceinternationale Isaf.

Londres est d’autre part l’ancienne puissance coloniale de l’île méditerranéenne de Chypre, sur laquelle les Turcs ont longtemps exercé une forme de souveraineté par l’intermédiaire d’une autorité locale devenue aujourd’hui encombrante, incarnée par l’administration chypriote turque de M. Rauf Denktash. Mais Chypre, entrée dans l’UE avec 9 autres pays le 1er mai, ne constitue plus un obstacle diplomatique depuis le ralliement d’Ankara à la réunification de l’île sous la bannière de l’UE, rendez-vous néanmoins manqué en raison du rejet grec au plan de l’ONU, alors que la communauté turque l’approuvait massivement. Fortes de ce retournement, et de la multiplication de ses gestes de bonne volonté, les autorités turques devaient également évoquer avec le Premier ministre britannique la levée des sanctions prises contre la République autoproclamée de Chypre-Nord, après une intervention de l’armée turque en 1974.

Enfin Ankara entretient de bonnes relations de coopération et diplomatiques avec Israël. C’est une dimension qui compte pour les Européens, surtout de la part d’un pays majoritairement musulman. C’est pour les défenseurs d’une Turquie européenne la démonstration qu’il n’y a pas d’automatisme, ni de fatalité et que les préjugés ne doivent plus être à l’ordre du jour. Même si l’adhésion est encore une perspective lointaine.



par Georges  Abou

Article publié le 17/05/2004 Dernière mise à jour le 17/05/2004 à 16:10 TU