Iran
Interrogations persistantes sur le programme nucléaire
(Photo: AFP)
Les experts de l’AIEA ont annoncé la découverte dans une usine à Farayand, de traces d’uranium hautement enrichi, un matériau pouvant être destiné à la fabrication d’une bombe nucléaire. Des particules similaires avaient d’ailleurs déjà été trouvées, il y a un an, sur deux autres sites à Natanz et Kalaye. Le rapport rendu le 1er juin aux gouverneurs de l’agence, indique, d’autre part, que l’Iran continue de fabriquer des pièces de centrifugeuses, qui servent à enrichir l’uranium, alors qu’il a affirmé avoir stoppé cette production depuis le mois d’avril. L’AIEA affirme encore que Téhéran a aussi reconnu avoir importé «quelques aimants », éléments de centrifugeuses, mais aurait, en fait, cherché «en vain» à s’en procurer des quantités plus importantes à l’étranger.
Téhéran doit s’expliquerMalgré ces éléments troublants, le directeur général de l’agence, Mohamed ElBaradeï, a déclaré que «rien ne prouve concrètement qu’un programme militaire est lancé» et qu’il est donc «prématuré» de s’avancer sur ce point. Il a néanmoins prévenu les autorités iraniennes que si les soupçons concernant l’existence d’un lien entre le programme nucléaire civil et militaire se confirmaient, il n’hésiterait pas à transmettre le dossier au Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (ONU).
Pour le moment, les explications avancées par Téhéran sont, en effet, jugées «changeantes et contradictoires». En tout cas, peu convaincantes. Hassan Rohani affirme que «les contaminations [à l’uranium hautement enrichi] proviennent de pièces importées de l’étranger». Il reprend ainsi les arguments utilisés il y a un an pour expliquer la découverte d’autres traces de ce matériau. Concernant les centrifugeuses, il affirme que la production a continué dans trois ateliers privés, hors du contrôle de l’Etat, en raison des compensations financières demandées qui n’ont pu être accordées. Mais il a déclaré qu’en aucun cas, il ne s’agissait d’éléments de centrifugeuses de technologie avancée destinés à enrichir l’uranium à des fins militaires.
Téhéran a aussi fait mine de menacer d’arrêter sa collaboration avec l’AIEA si sa bonne foi n’était pas reconnue lors de la réunion de Vienne, consacrée à ce dossier, le 14 juin prochain. Le ministre des Affaires étrangères, Hamid Reza Assefi, a ainsi déclaré : «Nous attendons que, dans la ligne de notre coopération avec l’agence, elle examine cette affaire sans la politiser et prépare le terrain pour que le dossier de l’Iran soit refermé le plus vite possible». Le président Mohammad Khatami a même précisé que si ce n’était pas le cas, l’Iran pouvait toujours «revenir sur les décisions volontaires» qu’elle avait prise dans le domaine nucléaire.
Cette tentative d’intimidation a été jugée malvenue par les Etats-Unis qui accusent sans ambiguïté Téhéran de développer en secret un programme nucléaire militaire. Richard Boucher, le porte-parole du département d’Etat, a expliqué que du point de vue américain l’Iran n’a pas «coopéré avec l’AIEA pour résoudre des sujets en suspens concernant son programme nucléaire» et a «clairement fait savoir… qu’il ne se sent pas lié par sa promesse de suspendre toutes les activités liées à l’enrichissement d’uranium».
par Valérie Gas
Article publié le 02/06/2004 Dernière mise à jour le 02/06/2004 à 15:27 TU