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Indonésie

Yudhoyono gagne la présidentielle

Susilo Bambang Yudhoyono a battu la présidente sortante Megawati Soekarnoputri. 

		(Photo : AFP)
Susilo Bambang Yudhoyono a battu la présidente sortante Megawati Soekarnoputri.
(Photo : AFP)
Le général à la retraite Susilo Bambang Yudhoyono est donné largement vainqueur de l'élection présidentielle en Indonésie. Les premières estimations lui accordent plus de 60% des suffrages.

De notre correspondant à Djakarta

Le 20 octobre prochain, le plus grand pays musulman du monde ne sera plus gouverné par une femme. Ce jour-là, Megawati Soekarnoputri, la fille du père de la nation indonésienne, transmettra le flambeau à Susilo Bambang Yudhoyono.

L’ancien ministre de la Sécurité est en effet donné gagnant du deuxième tour des élections présidentielles indonésiennes, les premières au suffrage universelle dans l’histoire de l’Archipel, par les projections de tous les médias locaux. La fin du décompte n’interviendra que dans une dizaine de jours, mais la tendance de ces premiers résultats ne devrait pas s’inverser. « SBY », comme le surnomme les Indonésiens, est un général à la retraite de 54 ans, qui cultive avec succès une image de soldat « intellectuel » polie dans les écoles militaires américaines et européennes. Il n’a jamais exercé de commandement dans des zones de conflit en Indonésie, ce qui le fait passer auprès de certains de ses pairs pour un « général en chambre », mais qui, d’un autre côté, lui a évité d’avoir du sang sur les mains. 

Il  dirige le contingent indonésien des forces de maintien de la paix en Bosnie dans les années 1990 avant d’être placé à la tête de la garnison de Djakarta. Après la chute de la dictature Suharto, un régime vis à vis duquel il a toujours su garder quelques distances, il prend la tête d’un comité militaire de « réflexion sur la réforme du système politique » avant de devenir  ministre de la Sécurité en 1999. Il sera démis de ses fonctions pour avoir refusé de soutenir l’ancien président Abdurrahman Wahid qui avait tenté de décréter l’état d’urgence pour empêcher son « impeachment » par le Parlement. Cette opposition permettra à Yudhoyono de soigner son image de leader ferme mais soucieux des acquis démocratiques. Récupérant son poste sous la présidence Megawati, élue par le Parlement en juillet 2001, il va se retrouver en première ligne de la lutte contre la Jemaah Islamiyah, l’organisation responsable des attentats de Bali en octobre 2002 qui a fait 202 morts en majorité de jeunes touristes occidentaux. Il se forge alors une stature internationale en établissant des relations de confiance avec l’Australie et les États-Unis qui, dans le même temps, critiquent Megawati pour son manque de fermeté à l’égard des milieux fondamentalistes.

Le candidat de la rupture

Candidat préféré des milieux d’affaires occidentaux, qui le perçoivent comme le champion de la lutte anti-terroriste, SBY s’est également beaucoup investi dans les négociations de paix à Aceh, une région du Nord de Sumatra agitée par un conflit séparatiste depuis 1976. Cet engagement lui vaudra des inimitiés parmi les durs de l’institution militaire qui profitent de l’instabilité pour se livrer à de multiples trafics très lucratifs (drogue, armes, prostitution) mais il conforte son image de leader responsable auprès d’une partie de la population indonésienne qui réclame la fin des combats et le retour à la stabilité.

Sa démission forcée en mars 2004 va renforcer cette sympathie populaire sur laquelle il va bâtir la percée électorale (9%) de son petit parti démocrate au scrutin législatif d’avril puis sa campagne pour les présidentielles. Il se présente alors comme le candidat de la rupture et du renouveau face des grandes formations politiques décrédibilisées par la corruption.  Le discours séduit d’autant plus qu’il n’a lui-même jamais été impliqué dans aucun scandale financier. Mais la principale force de sa candidature résidait peut être dans la faiblesse de la présidente sortante. Megawati a du assumer un bilan économique très critiqué dans les classes populaires, son électorat traditionnel. On lui reproche notamment l’accroissement des inégalités, le développement endémique de la corruption et l’absence de réformes de l’institution judiciaire qui se vend toujours, comme aux enchères, au plus offrant. La présidente, souvent décriée pour son manque de charisme, paye aussi son attitude distante vis à vis du petit peuple.



par Jocelyn  Grange

Article publié le 20/09/2004 Dernière mise à jour le 21/09/2004 à 06:47 TU