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Proche-Orient

L'image dégradée d'Israël

La politique répressive d’Israël à l’encontre des Palestiniens contribue à la dégradation de son image dans le monde. 

		(Photo : AFP)
La politique répressive d’Israël à l’encontre des Palestiniens contribue à la dégradation de son image dans le monde.
(Photo : AFP)
Un rapport secret du ministère israélien des Affaires étrangères prédit que l’image de l’Etat hébreu va se dégrader dans les années à venir, isolant de plus en plus le pays sur la scène internationale. Ce document, dont la radio militaire s’est faite l’écho, met notamment en garde contre les conséquences à moyen terme de cette situation qui pourrait conduire à un affrontement avec l’Europe.

Le ministère israélien des Affaires étrangères s’est refusé à faire le moindre commentaire sur ce rapport pourtant réalisé au mois d’août dernier sur ses instructions et par ses propres analystes. Les indiscrétions de plusieurs sources politiques ont cependant permis d’en connaître les principaux enseignements qui portent sur une période couvrant les dix prochaines années. Intitulé «l'arène internationale dans la prochaine décennie», ce document prédit ainsi que l’image d’Israël durant cette période risque non seulement de se détériorer mais pourrait très prochainement être comparée à celle de l'Afrique du Sud lors de l'apartheid. Isolé sur la scène internationale, à moins que le conflit israélo-palestinien ne soit résolu à court terme, l’Etat hébreu perdrait en effet sa légitimité et serait frappé d'ostracisme à l'instar de l’ancien régime ségrégationniste, indique notamment le rapport.

Les analystes israéliens se sont en particulier penchés sur les relations futures d’Israël avec l’Union européenne. Ils affirment notamment que l’Etat hébreu pourrait très bientôt se heurter à l’Europe des vingt-cinq si cette dernière décidait d'adopter une politique commune. «Cela pourrait mettre Israël dans une situation de conflit avec l'UE», explique le rapport qui insiste sur le danger de négliger les liens avec l’Union. «Cela pourrait surtout avoir des conséquences politiques et économiques graves pour le pays», précise-t-il. Il est vrai que les liens entre l’Etat hébreu et l’Europe se sont considérablement dégradés au cours de ces dernières années. Déjà tendue en raison du favoritisme supposé de l’UE envers les Palestiniens, la situation a empiré ces derniers mois avec les critiques virulentes des Européens à l’encontre de la politique répressive menée par le gouvernement d’Ariel Sharon ou encore de la construction de la «barrière de sécurité» –appelée «mur de l’apartheid» par les Palestiniens– que l’Etat hébreu est en train d’ériger en Cisjordanie.

Cette dégradation des relations avec l’Union européenne risque par ailleurs de ne pas rester sans conséquence sur les rapports d’Israël avec le reste du monde, mis à part son allié de toujours, les Etats-Unis. Le rapport du ministère des Affaires étrangères prédit en effet que les Etats asiatiques, mais aussi la Russie, seraient plus à même de tisser dans les années à venir des liens plus étroits avec les pays arabes plutôt qu'avec l’Etat hébreu.

Appel pour une suspension de l’accord d’association

Les résultats de cette étude semblent avant tout montrer les inquiétudes grandissantes d’Israël de devenir un Etat paria. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que cette préoccupation est évoquée. En janvier dernier déjà, le ministre israélien de la Justice, Joseph Lapid, avait en effet mis en garde, à l’occasion des violentes polémiques qui entouraient la construction de la barrière de séparation en Cisjordanie, le gouvernement contre un boycottage international. Quelques mois plus tard, l’Assemblée générale des Nations unies votait à une majorité écrasante –comprenant les vingt-cinq pays européens– une résolution exigeant de l’Etat hébreu qu’il démantèle la barrière controversée.

Cette volonté de sanctionner la politique israélienne est récemment revenue à l’ordre du jour après le lancement fin septembre de l’opération Jours de pénitence dans le nord de la bande de Gaza. Cette offensive particulièrement meurtrière –plus de cent Palestiniens sont morts parmi lesquels vingt-cinq enfants et quelque 400 personnes ont été blessées– a été condamnée par les Nations unies et par les agences de l’organisation internationale qui opèrent dans les Territoires palestiniens.

Réagissant à la situation qui prévaut sur le terrain depuis plusieurs mois, le rapporteur de l’ONU pour le droit à l'alimentation, Jean Ziegler, a ainsi appelé jeudi l'Union européenne à suspendre son accord d'association avec Israël, seul moyen selon lui de faire respecter le droit à l'alimentation des Palestiniens. Le sociologue suisse a notamment rappelé que le texte signé en 2000 par Israël et l'UE – qui absorbe 62% des exportations de l'Etat hébreu– était soumis au respect des droits de l'homme. «Il y a une seule arme possible pour lutter pour le droit à l'alimentation, c'est l'article 2 du contrat de la convention d'association entre Israël et l'Union européenne», a lancé, au cours d’une conférence de presse à Genève, le diplomate pour qui «des violations graves du droit à l'alimentation sont constatées, avérées» dans les Territoires palestiniens. Tout en reconnaissant le droit d'Israël à l'autodéfense, Jean Ziegler a par ailleurs estimé que les destructions de logements –70 maisons ont été totalement détruites lors de la dernière opération de Tsahal à Gaza et quelque 200 autres partiellement démolies–, les expropriations de terres et les entraves à la circulation imposées par l'armée israélienne dans les territoires occupés provoquaient une crise alimentaire.



par Mounia  Daoudi

Article publié le 15/10/2004 Dernière mise à jour le 15/10/2004 à 15:37 TU