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Irak

L’opposition exclue de la conférence internationale

William Burns et Hosni Moubarak. C'est après une entrevue entre les deux hommes que la présidence égyptienne a officiellement lancé la conférence irakienne sur l'Irak. 

		(Photo: AFP)
William Burns et Hosni Moubarak. C'est après une entrevue entre les deux hommes que la présidence égyptienne a officiellement lancé la conférence irakienne sur l'Irak.
(Photo: AFP)
La conférence internationale sur l’Irak se tiendra finalement les 22 et 23 novembre dans la station balnéaire de Charm el-Cheikh, sur les rives de la mer Rouge. Prévue un temps pour se dérouler en octobre -juste avant les élections américaines- cette rencontre avait très vite été repoussée pour la fin novembre. Elle doit se pencher essentiellement sur les moyens d’aider l’Irak à organiser les élections générales de janvier prochain. Alors que la France avait pourtant largement insisté auprès de l’hôte de cette conférence, le président Hosni Moubarak, pour que la participation y soit la plus large possible, les organisations et partis irakiens n’ont pas été invités à se rendre en Egypte. Le secrétaire d’Etat américain, Colin Powell, a pour sa part d’ores et déjà annoncé son intention de se rendre à Charm el-Cheikh.

C’est à l’issue d’une visite au Caire de William Burns, l’envoyé spécial américain au Proche-Orient, que la présidence égyptienne a officiellement lancé les invitations pour la conférence internationale sur l’Irak. Cette rencontre, qui doit se dérouler au niveau ministériel, accueillira l’Irak et ses voisins, les pays industrialisés du G8, la Chine, la Ligue arabe ainsi que l’Organisation de la conférence islamique. L’ordre du jour, tout comme la liste des participants à cette réunion, semblent avoir largement été imposés par la Maison Blanche. C’est d’ailleurs William Burns qui les a annoncés lors d’une conférence de presse tenue à l’issue de sa rencontre avec le président Hosni Moubarak. «Cette réunion traitera de la façon d'appliquer la résolution 1546 du Conseil de sécurité de l'Onu pour permettre aux Irakiens de contrôler la situation dans leur pays, avec l'aide de l'Onu, et de tenir les élections prévues début janvier 2005», a notamment indiqué le représentant américain qui a également précisé que «la reconstruction économique» du pays ainsi que «la situation sécuritaire notamment le long des frontières irakiennes» seraient également à l’ordre du jour.

«Cette rencontre comme nous le comprenons est limitée aux représentants de gouvernements», a ensuite conclu William Burns, coupant court à toute idée d’y convier quiconque en Irak n’appartiendrait pas aux autorités mises en place par Washington. Le porte-parole de la présidence égyptienne, Magued Abdel Fattah, s’est contenté d’acquiescer aux propos de l’envoyé spécial de George Bush affirmant : «Telle est la vision américaine et l’Egypte partage cette vision. Nous, en Egypte, nous voyons qu’il s’agit d’une conférence de gouvernements». Le responsable égyptien a cependant expliqué qu’une réunion parallèle pourrait être tenue en marge de la rencontre pour permettre aux parties irakiennes exclues de la conférence de transmettre leurs demandes. «Des représentants de la société civile irakienne pourraient à cette occasion soumettre des recommandations à examiner lors de la réunion des gouvernements», a notamment précisé Magued Abdel Fattah.

Bagdad affiche sa satisfaction

L’ordre du jour de la conférence internationale, tout comme la liste des participants à cette réunion, sont un désaveu pour l’approche prônée notamment par la France qui avait souhaité que les Irakiens soient représentés le plus largement possible à cette rencontre. Le ministre français des Affaires étrangères, Michel Barnier, avait en effet insisté il y a quelques semaines  pour que la question du retrait des forces étrangères d’Irak soit bien inscrite «à l’ordre du jour» des débats. Il avait également souhaité que toutes les forces politiques irakiennes «y compris celles qui ont choisi la voie de la résistance par les armes» et qui seraient prêtes à renoncer à la violence soient conviées à la conférence. Mais ces deux demandes, présentées par la France officiellement dans le but de «garantir un plus grand succès» de la rencontre de Charm el-Cheikh –il ne s’agit pas de «conditions» pour une participation française avait tenu à préciser l’Elysée– n’ont par été retenues. Réagissant à l’annonce de la présidence égyptienne, le ministère français des Affaires étrangères s’est contenté de souligner que Paris «prenait note avec intérêt» de la possibilité évoquée par l'Egypte d'organiser une réunion rassemblant «des représentants de la société civile irakienne». Aucun commentaire sur l’ordre du jour ou sur les participants à la conférence internationale n’a été fait.

A Bagdad en revanche, le gouvernement d’Iyad Allaoui s’est ouvertement félicité des choix de Washington et du Caire. «Il s'agit d'une conférence officielle à laquelle participeront les gouvernements étrangers et les organisations internationales», a ainsi approuvé le chef de la diplomatie Hoshyar Zebari, insistant sur le fait qu’il n'y aura ni partis politiques ni organisations irakiennes à cette réunion. «En matière de participation, ces organisations peuvent toujours s'essayer au champ politique intérieur qui est ouvert devant eux», a-t-il ajouté les mettant au défi de venir «mesurer leur popularité en affrontant l'épreuve des urnes au lieu de se livrer à des décapitations et des enlèvements».

Ces déclarations du ministre irakien interviennent alors que plusieurs dignitaires religieux et responsables politiques sunnites ont officiellement appelé à boycotter les élections de janvier prochain si le chef du gouvernement, Iyad Allaoui, mettait à exécution sa menace de lancer une opération militaire d'envergure contre Falloujah. La ville rebelle, considérée comme le bastion de la résistance sunnite à faire tomber pour pouvoir organiser le scrutin dans tout le pays, subit depuis plusieurs semaines déjà les bombardements de l’aviation américaine. Les responsables sunnites réunis à Bagdad ont à ce titre estimé qu’il était «inacceptable d'utiliser le prétexte des élections pour envahir les villes». Ils ont donc appelé tous les Irakiens à boycotter le scrutin et «à considérer ses résultats comme nuls et non avenus» si les violences dans le triangle sunnite se poursuivaient.



par Mounia  Daoudi

Article publié le 21/10/2004 Dernière mise à jour le 21/10/2004 à 14:17 TU

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Nahla Chahal

Chercheuse en sociologie politique du Moyen Orient contemporain

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[11/10/2004]

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