Proche-Orient
Abbas et Sharon s'engagent à mettre fin aux violences
(Photo: AFP)
Mahmoud Abbas s'entretient avec Saeb Erakat, responsable des négociateurs palestiniens. (Photo: AFP) |
Sharon annonce la libération de centaines de prisonniers
Mais si la primeur de l’annonce de l’arrêt des violences est revenue au chef de l’Autorité palestinienne, le Premier ministre israélien a lui aussi fait quelques déclarations très remarquées. Ainsi, après avoir confirmé l’engagement de son pays à mettre fin «partout» aux opérations militaires contre les Palestiniens, Ariel Sharon a indiqué avoir «accepté de transférer la responsabilité de plusieurs secteurs» aux services de sécurité de Mahmoud Abbas, allusion directe à certaines villes de Cisjordanie où doivent très bientôt être déployés les forces palestiniennes, comme cela fut le cas il y a quelques semaines dans la bande de Gaza. Il a également annoncé la prochaine libération de centaines de prisonniers palestiniens, une mesure très attendue par Abou Mazen qui espère par ce biais convaincre les groupes radicaux palestiniens de renoncer enfin aux armes et de transformer la période d’accalmie pour laquelle ils se sont engagés en une véritable trêve.
«Nous avons informé M. Abbas de notre volonté de prendre des mesures pour établir la confiance. Dans peu de temps, Israël va libérer des centaines de prisonniers palestiniens», a notamment déclaré le Premier ministre israélien en annonçant la constitution d’une commission commune qui sera chargée à l'avenir d’établir les critères pour examiner la remise en liberté des détenus. Cette dernière initiative représente à elle seule une avancée considérable. La dernière fois qu’un comité de ce genre avait été mis en place remonte en effet à 1994, une époque où l’espoir d’un règlement du conflit israélo-palestinien se nourrissait encore des accords d’Oslo signés quelques mois auparavant.
Sharon prêt à cordonner le retrait de Gaza avec les Palestiniens
Tout aussi significatives ont été les références systématiques à la Feuille de route, ce plan de paix international au point mort depuis son lancement par le président George Bush au sommet d’Aqaba en juin 2003. Si le chef de l’Autorité palestinienne a estimé que la proclamation de la fin des violences était partie intégrante de ce plan, le Premier ministre israélien a pour sa part tenu à lui subordonner son projet de retrait de la bande de Gaza et semble plus que jamais déterminé à le mettre en application dès l’été prochain. «Ce retrait peut ouvrir la voie à l'application de la Feuille de route», a ainsi fait valoir Ariel Sharon qui s’est déclaré prêt, sous certaines conditions, à y associer les Palestiniens. «C'est certes une décision unilatérale. Mais si surviennent des changements réels et concrets du côté palestinien, ce plan peut servir de tremplin pour un processus coordonné et réussi», a-t-il expliqué.
Les propos tenus à Charm al-Cheikh par les différents protagonistes marquent certes un réchauffement spectaculaire des relations israélo-palestiniennes. Ils suscitent sans conteste l'espoir d'une relance du processus de paix au sujet duquel pourtant les analystes des deux bords mettent en garde contre un excès d'optimisme. Car si les déclarations d’intention dans le domaine sécuritaire constituent une avancée indéniable, il n’en va pas de même pour les questions politiques qui ont été soigneusement évitées pendant le sommet. La question de la barrière de séparation érigée par Israël en Cisjordanie et celle du retrait de l'armée israélienne jusqu'aux lignes d'avant l'Intifada de septembre 2000 ont ainsi été tout simplement éludées, de même que celle de l'arrêt de la colonisation juive dans les Territoires palestiniens.
Mise en garde des radicaux palestiniensDans ce contexte, les engagements pris à Charm al-Cheikh pourraient bien être très vite mis à l’épreuve sur le terrain. Prélude aux difficultés qui attendent notamment le président Mahmoud Abbas, deux groupes radicaux ont d’ores et déjà rejeté l’annonce sur la fin des violences entre Israéliens et Palestiniens. Le Hamas a ainsi fait valoir que cette déclaration «n’exprimait que la position de l’Autorité palestinienne et n’engageait pas la résistance palestinienne». Un de ses porte-parole, Mounir al-Masri, a même explicitement condamné l’attitude d’Abou Mazen qui, selon lui, s’était engagé à consulter les mouvements palestiniens «avant de faire une telle annonce». «Le Hamas maintient donc sa position qui n'a pas changé: il n'y aura pas de trêve véritable avec Israël sans contrepartie véritable et nous agirons vis-à-vis de cette trêve en fonction de l'engagement de l'ennemi sioniste en faveur de nos conditions, en commençant par la libération de tous les prisonniers» palestiniens, a-t-il menacé.
Plus mesuré, le Jihad islamique a suspendu sa réponse sur l’arrêt des violences au retour de Mahmoud Abbas. Un des responsables de ce mouvement radical n’en a pas moins estimé que le sommet de Charm al-Cheikh n’avait «rien apporté de nouveau». Mohammed al-Hindi a en effet estimé qu’«Israël n'était pas sérieux car il veut la tête de la résistance et de l'Intifada». Autant dire qu’Abou Mazen n’est pas au bout de ses peines.
par Mounia Daoudi
Article publié le 08/02/2005 Dernière mise à jour le 08/02/2005 à 17:53 TU