Chine
Inquiétude sur le sort de deux syndicalistes emprisonnés
(Photo : AFP)
De notre correspondant à Pékin,
L’histoire remonte au 11 mars 2002. L’entreprise d’Etat d’alliages ferreux de Lioayang petite ville du nord Est de la Chine déposait alors son bilan. Des milliers d’employés descendent protester contre cette mise en faillite et appellent les autorités à enquêter sur la corruption de plusieurs cadres de cette entreprise et du gouvernement local. Très vite le mouvement prend de l’ampleur avec plus de 40 000 ouvriers dans les rues, et devient en quelques jours la plus grande manifestation en Chine depuis celles de 1989.
Le gouvernement local prend peur, fait encercler la ville par l’armée et arrête quatre leaders. Parmi eux figurent les syndicalistes Yao Fuxin et Xiao Yunliang. Quelques mois plus tard, et suite à un procès éclair dénoncé par le Bureau International du travail et de nombreuses organisations de défenses des droits de l’homme, ils sont tous les deux condamnés pour « subversion du pouvoir de l’Etat » et « organisation de manifestations illégales ». Verdict : sept ans pour Yao Fuxin, quatre ans pour Xiao Yunliang et trois ans de perte de leurs droits civiques et politiques.
Depuis le début de leur détention, les deux syndicalistes « ont été changé une dizaine de fois de prison et à chaque fois les conditions sont pires. En fait les officiels cherchent à les pousser à bout. Monsieur Xiao est gravement malade, il a des problèmes cardiaques, des brulures d’estomac et surtout il souffre de problèmes respiratoires. Quand la police l’a arrêté ils lui ont cogné la tête contre leur voiture et lui ont donné des coups de pieds. Depuis il a les yeux qui fonctionnent à peine. Il a subi une opération mais ne peut pas voir à plus de dix mètres » raconte la femme de Yao.
D’après madame Yao, son mari serait soumis à de mauvais traitements par ses geôliers tout comme Xiao Yunliang : « A la suite d’une bagarre entre détenus c’est lui qui a été puni. Ils lui ont placé une barre entre les chevilles pour qu’il ne puisse plus bouger. Il a été enchaîné comme ca pendant quinze jours et ne pouvait plus aller aux toilettes. Quand on est allé les voir la dernière fois, la tête de Xiao Yunliang avait gonflé c’était terrible . Ils ont aussi interdit à mon mari de mettre des chaussures et de se laver les dents pendant plusieurs jours » tempête madame Yao.
Plus discrète mais tout aussi désespérée, madame Xiao confirme en effet ne plus reconnaître son mari lors de la visite mensuelle qui lui est accordée. Yao Fuxin et Xiao Yunliang sont incarcérés dans la prison de Lingyuan à la frontière des provinces du Hebei, de la Mongolie intérieure et du Liaoning. Une prison réputée très dure en raison de ses pensionnaires, la plupart étant des dissidents ou des prisonniers politiques. Suite aux arrestations et incarcérations qui ont suivi la répression du 4 juin 1989, des cas de tortures ont été rapporté de cette prison.
En pleine session parlementaire
Madame Yao et madame Xiao ont dû déjouer les plans de la police de la province du Liaoning pour se rendre à Pékin. Depuis l’emprisonnement de leur mari, il leur est fortement « déconseillé » d’aller demander justice dans la capitale. A bout de ressources et sans espoir, elles ont quand même bravé l’interdit alors que se tient à Pékin la session parlementaire de l’assemblée nationale populaire. Réuni en conclave, les 3000 députés chinois s’enorgeuillissent d’avoir amélioré les droits de l’homme dans leur pays. A 55 ans, madame Yao et madame Xiao, des anciennes ouvrières au chômage, demandent la libération de leur mari pour raison de santé. En dépit des pressions internationales et des tentatives de leur avocat à Pékin, aucune libération n’est envisagée.par Michael Sztanke
Article publié le 14/03/2005 Dernière mise à jour le 14/03/2005 à 11:14 TU