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Proche-Orient

Israël annexe de nouvelles terres en Cisjordanie

Un ouvrier travaille sur un chantier de construction de la colonie israélienne de Maale Adoumim en Cisjordanie.(Photo: AFP)
Un ouvrier travaille sur un chantier de construction de la colonie israélienne de Maale Adoumim en Cisjordanie.
(Photo: AFP)
A peine terminée l’évacuation des civils israéliens de ce territoire, les autorités ont annoncé la confiscation de quelque 120 hectares de terres palestiniennes en Cisjordanie. Officiellement, il s’agit de poursuivre la construction du «mur», cette barrière de sécurité censée protéger Israël de l’infiltration de kamikazes. Dans la réalité, le tracé de cette clôture va englober des terres autour de plusieurs colonies et isoler un peu plus Jérusalem-Est dont les Palestiniens veulent faire la capitale de leur futur Etat.

Le Premier ministre Ariel Sharon avait prévenu. Le retrait de la bande de Gaza ne signifie en aucune façon la fin de la colonisation des terres palestiniennes. Le 17 août, jour du début de l’évacuation forcée des colons de ce territoire occupé au lendemain de la guerre des Six-Jours, le chef du Likoud déclarait en effet que la colonisation allait «se poursuivre et se développer» en Cisjordanie. Et de préciser : «il s’agit d’un programme sérieux». Ce qui aurait pu apparaître comme un discours de circonstance destiné à contrer les attaques particulièrement virulentes de ses adversaires, a pris tout son sens mercredi. En homme de parole, Ariel Sharon, en effet, n’aura pas attendu longtemps avant de dévoiler ses plans. Dès le lendemain de la fin de l’évacuation des vingt et une colonies de la bande de Gaza et des quatre petites implantations du nord de la Cisjordanie, son gouvernement annonçait l’annexion de nouvelles terres palestiniennes.

En tout quelque 120 hectares vont ainsi être confisqués afin de permettre la poursuite de la construction de la très controversée barrière de sécurité qu’Israël érige en Cisjordanie. Un édifice jugé illégal par la Cour internationale de Justice de La Haye et que l’Etat hébreu justifie pour empêcher l’infiltration de kamikazes palestiniens sur son territoire. Le tracé de cette barrière a été approuvé au plus haut niveau de l’Etat, par le conseiller juridique du gouvernement Menahem Mazouz. Il devrait permettre l’élargissement de la colonie de Maale Adoumim et relier cette implantation –la plus importante de Cisjordanie avec quelque 28 000 habitants– aux quartiers juifs construits à Jérusalem-Est qu’Israël occupe et annexe depuis juin 1967. Il devrait également englober les colonies voisines de Mishor Admoumim, Kedar, Almon et Allon. Une fois le feu vert donné par le conseiller juridique, l’armée israélienne a commencé à émettre les ordres de confiscation des terres palestiniennes. Leurs propriétaires ont une semaine pour faire appel.

Un nouveau QG de la police israélienne en Cisjordanie

La décision d’Israël de poursuivre sa politique de colonisation a, comme il fallait s’y attendre, soulevé un tollé chez les Palestiniens qui accusent l’Etat hébreu de «vouloir couper le nord de la Cisjordanie du sud de ce territoire et modifier ainsi la démographie de Jérusalem à son profit». Selon Khalil Toufaqjin un expert palestinien également cartographe, le nouveau tracé de la barrière de sécurité va en effet s’enfoncer en Cisjordanie sur 15 à 20 km en direction de la mer Morte et sur une largeur de 20 km. Selon lui, en érigeant ce «mur», Israël va mettre définitivement en péril l’édification d’un Etat palestinien viable.

Au risque de s’attirer de nouvelles critiques du grand allié américain –en mars dernier la décision d’Ariel Sharon de construire 3 500 logements à Maale Adoumim avait été vivement condamnée par la Maison Blanche–, les autorités israéliennes ont annoncé jeudi leur intention de bâtir le quartier général de la police pour la Cisjordanie dans cette implantation située à une dizaine de kilomètres de Jérusalem. «Ce projet a obtenu toutes les autorisations nécessaires et va bientôt être lancé», a affirmé un responsable du gouvernement qui a précisé que «le QG de la police sera érigé sur des terres domaniales palestiniennes». L’annonce a été violemment critiquée par le Premier ministre palestinien Ahmed Qoreï pour qui ce projet «constitue une opération criminelle». «Aucun musulman, aucun Arabe, personne qui souhaite la paix ne peut accepter un tel plan. Il faut une initiative internationale rapide», a-t-il insisté. Le chef des négociateurs, Saëb Erakat, n’a pour sa part pas caché son pessimisme. «Nous espérions que le retrait de la bande de Gaza et d’une partie de la Cisjordanie préfigurerait une époque de paix et de progrès vers la Feuille de route, mais il est clair qu’Israël continue à parler le langage de l’agression», a-t-il déploré.

Plus impliquée que jamais dans le processus en cours au Proche-Orient, l’administration Bush, qui espérait que le retrait de Gaza relancerait la Feuille de route, a pris ses distances avec le gouvernement Sharon dans cette affaire. Le porte-parole du département d’Etat, Sean McCormack, a en effet rappelé aux autorités israéliennes leurs obligations en vertu des engagements qu’elles avaient elles-mêmes pris. «Le président Bush et le Premier ministre Sharon se sont accordés, dans un échange de lettres en avril 2004, sur le fait que la barrière érigée par Israël devait être une mesure de sécurité et non une mesure politique et que son itinéraire devait tenir compte de l'impact sur les Palestiniens qui ne sont pas engagés dans des activités terroristes», a souligné le responsable américain. «Nous avons clairement fait savoir que la barrière ne devait ni préjuger des frontières finales, ni confisquer des terres palestiniennes ou affecter davantage le peuple palestinien», a-t-il ajouté dans ce qui s’apparente à une condamnation nette de la politique de colonisation relancée par le gouvernement Sharon.


par Mounia  Daoudi

Article publié le 25/08/2005 Dernière mise à jour le 25/08/2005 à 17:51 TU