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Justice internationale

La CPI reconnaît le rôle des victimes

(Carte SB/RFI)
(Carte SB/RFI)
Six victimes de crimes commis en République démocratique du Congo (RDC) vont pouvoir participer à la procédure enclenchée en juin 2004 par le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), aujourd’hui au stade de l’enquête. Une première, qui consacre le rôle et la place des victimes dans la justice internationale.

De notre correspondante à La Haye

Les juges de la Cour pénale internationale ont décidé, mardi 17 janvier, de donner « une voix » aux victimes des crimes commis en République démocratique du Congo (RDC). Jusqu’à ce jour, les victimes ne disposaient que d’un rôle limité. Contrairement aux tribunaux pour l’ex-Yougoslavie, le Rwanda ou la Sierra Léone, le statut de Rome, fondateur de la Cour pénale internationale, leur confère cependant un rôle actif. Mais jusqu’à la décision de mardi, leur place dans les procès engagés par la Cour se résumait à l’article 85 d’un code de procédure pénale inusité. La décision consacre désormais leur place centrale.

Suite à une demande, déposée le 26 mai 2005 par la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH), la chambre a autorisé six victimes de crimes commis en Ituri et au Nord-Kivu, régions minières de l’Est de la République démocratique du Congo, à participer à la procédure. Pour se faire, les juges ont pour la première fois donné une définition précise au statut de victime : pour participer au procès et se constituer parties civiles, les candidats sont d’abord tenus de démontrer qu’ils ont subi un préjudice moral ou matériel découlant d’un crime pour lequel la Cour est compétente. Cette décision précède les procès sur le fond, qui ne devraient pas débuter avant juin prochain, mais qui ouvriront le droit, pour les victimes, à obtenir réparations.

Tortures, esclavage, meurtres, pillages…

Les six victimes, deux femmes et quatre hommes, dont les noms restent à ce jour confidentiels pour des raisons de sécurité, ont perdu des membres de leur famille, subi les pillages et la destruction de leurs biens lors d’attaques conduites par des miliciens. Un homme a été enlevé, réduit en esclavage, un autre a été illégalement détenu, torturé. L’une de ces victimes, couverte par le pseudonyme VPRS 3, « a marché en transportant un lourd fardeau, sans manger ni boire, parcourant une distance d’environ 500 kilomètres », peut-on lire dans la décision des juges.

Ni alliées du procureur, ni ennemies, les victimes restent indépendantes du Parquet, le ministère public, devant la Cour. Mais elles pourront désormais présenter « leurs vues et leurs préoccupations au cours de l’enquête », « déposer des pièces », ou « demander à la chambre d’ordonner des mesures spécifiques ». L’affaire RDC est toujours au stade de l’enquête et le procureur n’a, pour l’heure, délivré aucun mandat d’arrêt. Ils seraient cependant imminents puisque le procureur avait indiqué, début décembre, que les premiers procès devraient démarrer en juin 2006. L’enquête sur les crimes commis en République démocratique du Congo avait été ouverte le 16 juin 2004, suite à une saisine du président de la République démocratique du Congo, Joseph Kabila, le 3 mars 2004.

Justice et transition politique

A ce jour, le procureur a concentré ses enquêtes sur la région de l’Ituri, en proie à de violents combats depuis l’automne 1997. Le Parquet devrait inculper « les plus hauts responsables » des crimes commis dans la région, donneurs d’ordres et chefs de milices. Reste que sa tâche est compliquée par le processus de transition en cours en RDC et auquel participent des responsables présumés de crimes. Le nom de Jean-Pierre Bemba, aujourd’hui vice-président de RDC et patron du Mouvement pour la libération du Congo (MLC), avait, dans le passé, été régulièrement évoqué.


par Stéphanie  Maupas

Article publié le 19/01/2006 Dernière mise à jour le 19/01/2006 à 14:48 TU