Côte d’Ivoire
Soro de retour à Abidjan
(Photo : AFP)
Guillaume Soro est de retour à Abidjan. Le chef de la rébellion ivoirienne des Forces Nouvelles (FN) est arrivé mardi, à 11 heures du matin, à l’hôtel du Golf, directement de Bouaké à bord d’un hélicoptère militaire français. Il a été accueilli par le chef d’état-major des FN, le général Soumaïla Bakayoko, présent sur place depuis plusieurs jours. Son retour avait été annoncé en milieu de semaine dernière. Invoquant des questions de sécurité, il n’était plus revenu dans la capitale économique ivoirienne depuis octobre 2004, suite au bombardement des positions des Forces Nouvelles dans leur zone par les forces gouvernementales.
Sa sécurité à Abidjan sera prise en charge par l’Opération des Nations unies en Côte d’ivoire (Onuci), appuyée par des éléments de l’opération française Licorne. Guillaume Soro a aussi été autorisé à s’entourer d’une dizaine de gardes du corps ivoiriens, membres de la rébellion. Lundi, il avait déclaré à l’AFP qu’il rentrait à Abidjan pour participer « activement » au processus de paix et reprendre sa place au sein du gouvernement. De fait, le programme de sa première journée abidjanaise était plus que chargé.
Rencontre avec Gbagbo
Peu après son arrivée, il s’est rendu à la présidence pour rencontrer le chef de l’Etat Laurent Gbagbo. Une entrevue qui a duré près d’une heure, avec un tête-à-tête de 15 minutes. « Nous avons naturellement abordé les questions d’actualité, nous avons parlé du processus de paix, les échanges ont été fructueux », a-t-il commenté devant la presse. « Je pars d’ici convaincu que nous avons pris le bon chemin pour réaliser rapidement la paix en Côte d’Ivoire. Nous avons pu, avec le chef de l’Etat, dégager les grands axes, et dans les jours à venir, vous allez voir que ce dialogue politique initié va se prolonger par le dialogue militaire », a-t-il précisé, faisant allusion à une prochaine rencontre entre les états-majors rebelle et loyaliste.
Guillaume Soro a ensuite pris le chemin de la primature pour s’entretenir avec le Premier ministre Charles Konan Banny. Il devait également retrouver en fin d’après-midi Henri Konan Bédié, président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire P(DCI) et Alassane Ouattara, président du Rassemblement des républicains (RDR). Il n’est pas exclu qu’il prenne part au Conseil des ministres de mercredi matin, annonçait mardi la presse ivoirienne. « Ce serait alors le premier auquel il participe depuis la formation du gouvernement. Jusque-là, il était le seul sur les 31 membre à boycotter les séances », rappelle Fraternité Matin.
Un retour très commenté
Ministre de la Communication dans le précédent gouvernement de Seydou Diarra, Guillaume Soro est à présent ministre de la Reconstruction et de la Réinsertion au sein du gouvernement dirigé par Charles Konan Banny. Celui-ci a été désigné en décembre par la communauté internationale pour mener la transition à son terme et organiser des élections générales au plus tard fin octobre 2006. Soro est également le numéro deux de l’équipe gouvernementale. « Ce retour est le résultat de différentes médiations », explique Fraternité Matin. Suite au déplacement à Bouaké du Premier ministre, les 3 et 4 février derniers, Soro avait participé au séminaire gouvernemental sur la feuille de route de Konan Banny du 9 au 11 février à Yamoussoukro. Il était aussi présent au sommet des cinq leaders (28 février, Yamoussoukro), destiné à relancer le processus de paix après plusieurs mois de blocage.
Son retour sur les bords de la lagune Ebrié est diversement perçu. « Cette arrivée se situe dans la dynamique de paix dans laquelle s’inscrivent tous les acteurs politiques. Elle fait suite à la table ronde de Yamoussoukro et constitue une étape importante dans le processus de paix », annonçait dimanche un communiqué de la primature. « Le retour de Soro à Abidjan donnera sûrement un coup d’accélérateur au processus de paix. Dans son entourage, ce come-back est perçu comme un ‘défi’. Selon un membre de son cabinet, ce challenge se situe à la fois autant au niveau de ses responsabilités ministérielles qu’au niveau de la décrispation de la situation socio-politique », note Le Front. Alors que Le Courrier d’Abidjan explique que Soro ne pouvait plus tenir longtemps sa position, car il est « aujourd’hui corseté par un certain nombre de contraintes diplomatiques et internes ». Le journal rappelle notamment que, selon le Groupe de travail international (GTI), « si un ministre ne participe pas pleinement audit gouvernement, son portefeuille doit être repris par le Premier ministre ».
En parallèle à ce retour attendu et que certains qualifient de « définitif », Charles Blé Goudé, le chef des Jeunes patriotes (partisans de Laurent Gbagbo) a déclaré mardi qu’il ne croyait pas à l’organisation d’élections générales d’ici à fin octobre, critiquant le « manque de volonté de l’opposition politique et armée ». En effet, un débat fait rage en ce moment : le camp Gbagbo exige en priorité le désarmement alors que les FN revendiquent l’identification des populations. Ses combattants posent comme préalable le fait d’obtenir des papiers d’identité avant de déposer les armes.
par Olivia Marsaud
Article publié le 14/03/2006 Dernière mise à jour le 14/03/2006 à 17:05 TU