Guinée
Incertitude sur l’état de santé de Lansana Conté
(Photo : AFP)
A en croire les autorités guinéennes, les «médias étrangers» ont fait état «d’informations fantaisistes» sur l’état de santé de Lansana Conté. Selon le communiqué diffusé à la télévision guinéenne samedi soir, le président s’est rendu en Suisse «pour une visite privée de quelques jours» et devrait «profiter» de ce séjour pour effectuer «des visites médicales».
Pourtant, les conditions dans lesquelles a eu lieu le départ de Lansana Conté laissent penser que ce voyage en contrées helvétiques n’était pas prévu. Le chef de l’Etat guinéen a embarqué dans un avion loué par la présidence en pleine nuit, vers 2 heures du matin. Il était accompagné de l’une de ses épouses, Henriette, du ministre de la Santé, Amara Cissé et de trois autres de ses proches. Le fait même que le communiqué de la présidence admette que Lansana Conté va subir des examens durant son séjour en Suisse fait penser qu’il n’était peut-être pas totalement conscient lors de son départ. Le président Guinéen a, en effet, toujours refusé d’être soigné dans un pays occidental. Jusqu’à présent, il s’est rendu au Maroc ou à Cuba lorsqu’il a dû être pris en charge. C’est d’ailleurs dans ce dernier pays qu’a été diagnostiquée la leucémie dont il souffre, lors d’un récent bilan.
Lansana Conté serait dans la même clinique qu’Houphouët-Boigny
Des sources proches du chef de l’Etat ont affirmé à l’Agence France Presse, que Lansana Conté avait été conduit dans la même clinique genevoise que celle où son homologue ivoirien Félix Houphouët-Boigny avait été soigné. Cette information n’a pas été confirmée. Ni du côté guinéen. Ni du côté suisse où le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Jean-Philippe Jeannerat, s’est contenté de confirmer la présence du président sur le territoire «à titre privé», tout en précisant malgré tout qu’il était venu «pour des raisons médicales».
A 72 ans, la santé de Lansana Conté, qui est arrivé au pourvoir en Guinée à la suite d’un coup d’état en 1984, est quoi qu’il en soit particulièrement fragile. Le diabète dont il souffre depuis des années le contraint à limiter toutes ses activités. Lors de la dernière campagne pour les élections présidentielles où il était candidat pour le Parti de l’unité et du progrès (PUP) -il a instauré le multipartisme en 1992 et a été élu pour la première fois président en1993-, il avait d’ailleurs renoncé à participer à des manifestations publiques en raison des douleurs qu’il ressentait dans le pied à cause du diabète.
Un président invisible
Depuis plusieurs mois, il semble que cette maladie ait provoqué des crises de plus en plus fréquentes. Une situation qui a donné lieu à la diffusion de rumeurs persistantes sur sa disparition. Le fait que Lansana Conté ait résidé la plupart du temps dans sa ferme à une quarantaine de kilomètres de la capitale Conakry et qu’il n’ait pas été visible très souvent, a aussi contribué à alimenter ces bruits. En n’étant pas physiquement présent là où les affaires se gèrent, le chef de l’Etat a d’autre part prêté le flanc à de vives critiques notamment de la part de l’opposant Alpha Condé, leader du Rassemblement du peuple de Guinée (RPG), qui a estimé que cela laissait le champ libre à «un Premier ministre n’ayant aucune autorité sur son gouvernement et une armée divisée entre généraux et colonels analphabètes et jeunes officiers intellectuels mis à l’écart».
par Valérie Gas
Article publié le 19/03/2006 Dernière mise à jour le 19/03/2006 à 13:06 TU