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Liban

La Syrie à nouveau épinglée à l’Onu

La frontière libano-syrienne : la nouvelle résolution du Conseil de sécurité «encourage fortement le gouvernement syrien à répondre positivement à la requête du gouvernement libanais de délimiter leur frontière commune, en particulier dans les zones où elle est incertaine ou disputée.»(Photo : AFP)
La frontière libano-syrienne : la nouvelle résolution du Conseil de sécurité «encourage fortement le gouvernement syrien à répondre positivement à la requête du gouvernement libanais de délimiter leur frontière commune, en particulier dans les zones où elle est incertaine ou disputée.»
(Photo : AFP)
Le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté, mercredi, une nouvelle résolution sur le Liban, la huitième en l’espace de 14 mois. Le texte demande à la Syrie d’établir des relations diplomatiques avec le Liban et de définir ses frontières avec le pays du cèdre. Pendant ce temps, Damas souffle le chaud et le froid.

De notre correspondant à Beyrouth

Proposée par la France, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, la nouvelle résolution du Conseil de sécurité «encourage fortement le gouvernement syrien à répondre positivement à la requête du gouvernement libanais de délimiter leur frontière commune, en particulier dans les zones où elle est incertaine ou disputée, et d'établir des relations diplomatiques complètes et ouvrir des ambassades réciproques». Le Conseil souligne que «de telles mesures constitueraient un pas significatif vers l'affirmation de la souveraineté, de l'intégrité territoriale et de l'indépendance politique du Liban et améliorerait les relations entre les deux pays, tout en contribuant positivement à la stabilité de la région».

La nouvelle résolution qui porte le numéro 1680 a été approuvée par 13 voix, alors que la Russie et la Chine se sont abstenues. Le texte s’inspire du rapport soumis en avril à Kofi Annan par son envoyé spécial Terje Roed-Larsen, qui se réfère lui-même aux décisions de la conférence du dialogue national libanais. Les quatorze participants au dialogue, dont de proches alliés de Damas comme le Hezbollah ou le mouvement chiite Amal, ont préconisé, fin mars, la délimitation des frontières communes et l’établissement de relations diplomatiques entre le Liban et la Syrie. Mais Damas avait adressé une fin de non recevoir à ces requêtes et avait refusé de recevoir le Premier ministre Fouad Siniora, mandaté par la conférence pour «normaliser les relations avec la Syrie».

Le Hezbollah n’a fait aucun commentaire

La résolution 1680 appelle également «tous les Etats et parties concernés à coopérer pleinement avec le gouvernement libanais et le Conseil de sécurité» pour une mise en œuvre totale des dispositions de sa résolution 1559. Adoptée le 2 septembre 2004 à la veille de la prorogation du mandat du président Emile Lahoud voulue par la Syrie, cette résolution exigeait, entre autres, le retrait des troupes et des services de sécurité syriens et le «désarmement des milices libanaises et non libanaises».

Par «tous les Etats et parties concernés», le texte désigne sans les nommer l'Iran, qui soutient le Hezbollah, et la Syrie, laquelle appuie des organisations radicales palestiniennes implantées au Liban. La résolution félicite par ailleurs le gouvernement libanais «pour avoir pris des mesures pour empêcher l'entrée d'armes en territoire libanais» et appelle Damas à «prendre des mesures similaires».

Damas a réagi sans tarder, qualifiant cette décision d'«ingérence dans ses affaires intérieures». «La résolution 1680 constitue un précédent dans les relations internationales du point de vue de l'ingérence dans les affaires intérieures d'un pays et les relations bilatérales entre Etats», a affirmé un responsable du ministère des Affaires étrangères syrien cité par la presse.

A Beyrouth, Fouad Siniora a salué la résolution qui sert, selon lui, «les intérêts du Liban et de la Syrie». Le Hezbollah n’a fait aucun commentaire dans l’immédiat. Mais des observateurs ont dénoncé un «précédent qui risque de nuire aux Arabes». «Le Conseil de sécurité pourrait contraindre, un jour, les pays arabes à établir des relations diplomatiques avec Israël avant qu’il ne restitue les territoires qu’il occupe», a dit Omar Bachir, un professeur de droit international.

De leurs côtés, Russes et Chinois ont estimé que cette résolution n'était pas nécessaire et constituerait même une ingérence de l'Onu dans les relations bilatérales syro-libanaises.

Signes contradictoires

Avant le vote de la résolution par le Conseil de sécurité, la Syrie avait émis des signaux contradictoires sur ses intentions à l’égard du Liban. Après avoir fait la sourde oreille pendant des jours aux demandes du Liban qui dénonçaient des empiètements sur son territoire, Damas a commencé, lundi, à démanteler des remblais de terre érigés en territoire libanais à Ersal, dans l’est du pays. Cette mesure avait été interprétée comme un signe de bonne volonté dans l’affaire du tracé de la frontière syro-libanaise, disputé en plusieurs endroits, notamment dans le secteur des « fermes de Chebaa ». L'occupation par Israël de ce secteur aux confins de l'Etat hébreu, du Liban et de la Syrie, est prise comme prétexte par le Hezbollah pour justifier la poursuite de la résistance armée.

Mais quelques heures avant le vote de la résolution, mercredi, des accrochages ont opposé l’armée libanaise et des miliciens du Fateh-Intifada, une organisation palestinienne radicale pro-syrienne, basée à Damas et dirigée par le colonel Abou Moussa. Les combats très violents ont eu lieu dans l’est du Liban, près de la localité de Wadi Assouad, à deux kilomètres de la frontière avec la Syrie. Un soldat libanais et un combattant palestinien ont été blessés. Un militaire porté disparu pendant quelques heures a été remis à l'armée.

Selon des sources militaires libanaises, l'accrochage a eu lieu après qu'une patrouille de l'armée eut essuyé des tirs en provenance d'une position du Fatah-Intifada nouvellement érigée. Cette position a été démantelée par les soldats et les armes qui y étaient stockées ont été saisies. L'armée a dépêché des renforts en armes et véhicules blindés dans cette région, où le Fatah-Intifada maintient plusieurs bases.

Ce nouvel accrochage intervient alors que les participants au dialogue ont convenu, en avril, que les bases militaires palestiniennes situées à l’extérieur des camps de réfugiés devaient être démantelées dans un délai de six mois. Il prouve, surtout, que l’influence de la Syrie au Liban reste grande. En politique à travers ses puissants alliés, et sur le plan militaire, par le biais de ses amis palestiniens.

par Paul  Khalifeh

Article publié le 18/05/2006 Dernière mise à jour le 18/05/2006 à 08:46 TU

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Adam Ajlani

Président du CEVIPOLS

«Le régime syrien traverse une période difficile. Donc pour montrer qu’il est encore dur et solide il se rabat sur ses opposants quitte à ce qu’ils soient les plus modérés et les plus sincères.»

[18/05/2006]

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