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République démocratique du Congo

Le vieux Gizenga soutient le jeune Kabila

Le patriarche Antoine Gizenga a pris une décision historique en déclarant son appui à la candidature présidentielle de Joseph Kabila. 

		(Photo : AFP)
Le patriarche Antoine Gizenga a pris une décision historique en déclarant son appui à la candidature présidentielle de Joseph Kabila.
(Photo : AFP)
Antoine Gizenga, doyen des hommes politiques congolais et arrivé troisième au premier tour de la présidentielle, a appelé ses partisans à soutenir Joseph Kabila, lors du second tour prévu pour le 29 octobre. Il s’agit d’un soutien de grande importance pour le président sortant. Le PALU, le Parti lumumbiste unifié dirigé par Gizenga, troisième force politique de la RDC, va entrer dans une coalition avec l’Alliance pour la majorité présidentielle (AMP) de Kabila, qui bénéficie aussi du soutien des mobutistes.

Le patriarche Gizenga, 80 ans, a pris une véritable décision historique en décidant de soutenir la candidature de Joseph Kabila, 35 ans, à la présidence de la république. En effet, le secrétaire général et chef du Palu était connu comme étant un opposant systématique aux gouvernements qui se sont succédés dans ce vaste pays depuis plus de 40 ans. Gizenga, qui a exercé brièvement les fonctions de chef d’Etat dans les années 1960, est resté fidèle à l’héritage Patrice Lumumba, premier chef du gouvernement congolais issu de l’indépendance, arrêté par Mobutu et exécuté en 1961. Curieusement, le communiqué officiel signé par Antoine Gizenga signale que le siège du PALU est installé à Léopoldville, le nom que la capitale congolaise portait avant de devenir Kinshasa en 1966 par imposition de Mobutu, qui allait aussi remplacer la République du Congo par le Zaïre.

Dans son communiqué diffusé jeudi à partir de Kinshasa, Gizenga affirme que «le PALU donnera des consignes de vote dans ce sens à ses militants». Le président sortant, qui est arrivé en tête au premier tour de l’élection présidentielle, avec 44,81% des voix, bénéficie ainsi d’un soutien d’une importance stratégique. Gizenga est arrivé en troisième position avec 13,06% des suffrages, après le vice-président et ex-rebelle Jean-Pierre Bemba qui a obtenu 20,03%. Kabila dispose, du moins théoriquement, d’un potentiel de plus de 57% des votes, en comptabilisant les deux scores et en admettant un bon report des voix le 29 octobre prochain. Les observateurs belges affirment que les partisans de Gizenga sont habituellement assez «disciplinés».

Un programme commun pour éviter la balkanisation

Outre l’arithmétique électorale, il faut noter que le lumumbiste Gizenga est originaire de Bandunu, une province occidentale de la RDC. C’est important pour Kabila, lui qui est surtout soutenu par les électeurs de la partie orientale du pays, d’où il est originaire. Dans son communiqué, le parti de Gizenga «réaffirme qu’il ne s’est déterminé qu’avec la seule prise en compte de l’intérêt de la Nation qui, en tout premier lieu, est la non balkanisation du Congo». Un cadre du PALU, cité par l’AFP, s’est même permis de déclarer que le choix était difficile car «les deux candidats [au second tour] sont des prédateurs. Mais il fallait choisir le moindre mal et éviter la partition du pays entre l’Est et l’Ouest». Mais ce choix a sûrement rapporté des contreparties politiques importantes à Gizenga, d’autant plus que le parti lumumbiste a l’ambition de «jouer des rôles de premier plan». Des rumeurs circulent au sujet de nomination de Gizenga à la primature par Kabila, après l’élection de ce dernier.

Ce qui est sûr, c’est que le Palu a obtenu de solides garanties pour rejoindre l’Alliance de la majorité présidentielle (AMP), le parti de Kabila, dans le cadre d’une coalition parlementaire. Le parti lumumbiste affirme qu’il s’agit d’une décision «en vue de la mise au point d’un programme commun de gestion du pays, véritablement conçu pour une bonne gouvernance de la Nation et dans le but de garantir une stabilité suffisante et nécessaire aux institutions étatiques à mettre en place».

Première assemblée démocratiquement élue depuis 40 ans

Joseph Kabila disposera d’un groupe parlementaire important si l’on additionne les sièges conquis par l’AMP (entre 208 et 230, correspondant à plus de 42% des sièges) et ceux du PALU (34). Kabila disposera ainsi d’une majorité très confortable par rapport au Regroupement des nationalistes congolais (Renaco) du vice-président Jean-Pierre Bemba qui aura entre 100 et 113 parlementaires élus. L’Union des démocrates mobutistes (Udemo) dirigée par Nzanga Mobutu, fils de l’ancien dictateur zaïrois, a aussi décidé de se rallier au parti de Kabila. Les 9 mobutistes sont pour la plupart originaires de province de l’Equateur, située dans le nord-ouest de la RDC. Le futur gouvernement congolais pourrait ainsi avoir des ministres représentant l’essentiel du territoire national, à l’image du parlement.

438 des 500 députés de la nouvelle assemblée ont siégé vendredi à Kinshasa. Il s’agit d’un parlement plutôt jeune, issu des premières élections libres réalisées en RDC depuis plus de 40 ans. Le processus électoral, qui a débuté le 30 juillet pour s’achever le 29 octobre prochain avec le second tour de la présidentielle, marque la fin d’un processus de transition qui dure depuis bientôt trois ans, suite à une guerre civil qui a provoqué près de quatre millions de victimes directes et indirectes. Les Nations unies ont mobilisé près de 17 000 casques bleus et un millier de soldats européens (dans le cadre de l’Eufor), pour garantir la sécurité lors de la période électorale. Des incidents se sont produits lors de l’annonce des résultats du premier tour de la présidentielle le 20 août. La situation s’est apaisée mais le porte-parole de la force européenne, le colonel Thierry Fusalba, a déclaré jeudi que la situation peut s’embraser, car il y a beaucoup d’armes en circulation, notamment à Kinshasa.



par Antonio  Garcia

Article publié le 22/09/2006 Dernière mise à jour le 22/09/2006 à 18:38 TU