Santé
Soins gratuits pour les malades du sida au Cameroun
(Photo : AFP)
«Sur hautes prescriptions du chef de l’Etat, le gouvernement de la République du Cameroun a décidé ce jour [19 avril 2007], la gratuité des traitements par les antirétroviraux pour toute personne vivant avec le VIH/sida éligible à ce type de traitement. Cette décision (…) s’inscrit dans la droite ligne du plan stratégique national de lutte contre le VIH/sida 2006-2010», selon les déclarations d’Urbain Olanguena Awono citées par le quotidien All Africa. Une décision que le gouvernement a pu prendre, précise le journal, «grâce aux apports de partenaires tels que la Fondation Clinton ou encore Unitaid».
Le Cameroun a déjà fourni des traitements gratuits et des tests de dépistage du sida aux femmes enceintes, aux enfants, aux malades de la tuberculose, ou aux prisonniers. Elargir la mesure à l’ensemble de la population était chose envisagée par les autorités camerounaises depuis l’attribution, au début du mois, d’un peu plus de trente-trois milliards de francs CFA (soit 50 millions d’euros) par le Fonds mondial contre le sida pour la période 2007-2009, à Genève (Suisse). Désormais, quarante-trois mille adultes dont le sida est déclaré -sur un million de personnes infectées- (soit 5,5% de la population adulte, selon les statistiques de l’Onusida), vont donc bénéficier de médicaments antirétroviraux ainsi que quatre mille enfants contaminés par le virus du sida.
Depuis 2001, le Cameroun a conduit une politique favorable à l’initiative Access to treatment. En effet, il y a six ans, les antirétroviraux (ARV) mensuels coûtaient alors six cent mille francs CFA et seuls six cents malades bénéficiaient de ces traitements onéreux. En 2002, la chute des prix a été spectaculaire grâce à l’introduction du médicament générique, passant à quelque 21 000-22 000 francs CFA. Puis le gouvernement a conduit une politique de subvention directe d’aide aux malades et, en décembre dernier, les prix des traitements ARV étaient divisés par trois et celui des examens semestriels de suivi biologique des séropositifs ramené à sept mille francs CFA soit 10,5 euros, permettant ainsi à trente mille personnes contaminées de se soigner.
Mais toutes les unités de prise en charge ne sont pas opérationnelles…
Le docteur Charles Kouanfack est chef de service de l’hôpital central de jour de Yaoundé (HCY), le plus gros centre de prise en charge du pays qui accueille actuellement entre 150 et 200 patients par jour. En janvier 2006, ce médecin confiait alors au site d’information internet Plus news que : «La baisse significative des prix des examens biologiques pour les patients sous traitement antirétroviral au Cameroun [avait] provoqué une hausse de la demande pour ces actes de laboratoires, indispensables au suivi des patients vivant avec le sida». Le praticien attestait par ailleurs que «beaucoup de patients ont demandé à faire ces examens dès le premier jour d’application du nouveau tarif». Selon le praticien, cette politique de baisse des prix allait permettre d’«améliorer sensiblement la prise en charge et surtout le suivi des patients qui sont sous ARV».
Un bémol toutefois : les associations camerounaises de défense des malades déplorent l’indisponibilité des médicaments dans certaines unités de prise en charge. Selon le Fonds mondial, dans les seuls centres de suivi biologique en mesure de proposer des examens complets aux personnes sous antirétroviraux -situés à Yaoundé et Douala- (Centre), trois des douze unités de prise en charge (Upec), mises en place en 2005, ne sont toujours pas opérationnelles.
Il n’en demeure pas moins que la décision de pratiquer une politique de gratuité permettant à tout malade d’accéder aux soins constitue un «pas en avant» encourageant dans la lutte contre la maladie. Dans les pays en développement, la prise en charge financière de ces thérapeutiques onéreuses n’est pas fréquente. Le Cameroun, qui compte dix huit millions d’habitants, est le dernier pays en date à assurer la gratuité des ARV. Il n’est cependant pas le premier. Avant lui, le Brésil, le Sénégal, l’Ethiopie, la Tanzanie et la Zambie ont déjà pris cette disposition, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Le Nigeria et le Congo Brazzaville ont annoncé leur intention d’en faire autant.par Dominique Raizon
Article publié le 20/04/2007 Dernière mise à jour le 20/04/2007 à 15:35 TU