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Législatives 2007

Bayrou joue le tout pour le tout

De gauche à droite, Jean Lassalle, Corinne Lepage, aux côtés de François Bayrou (centre) et Marielle de Sarnez, lors de la création du MoDem le 10 mai. 

		(Photo : AFP)
De gauche à droite, Jean Lassalle, Corinne Lepage, aux côtés de François Bayrou (centre) et Marielle de Sarnez, lors de la création du MoDem le 10 mai.
(Photo : AFP)
Le temps de l’enthousiasme est passé pour François Bayrou. Depuis le premier tour de l’élection présidentielle, la donne a, en effet, beaucoup changé. Il a certes lancé comme promis un nouveau parti, le Mouvement démocrate (MoDem), sous l’étiquette duquel plus de 500 candidats vont se présenter aux législatives. Mais il a aussi dû faire face aux défections de la plupart des élus centristes sortants, qui ont décidé de créer un autre mouvement -pour le moment sans nom de baptême- dans le sillage de l’UMP. Pas facile de s’y retrouver.

François Bayrou n’en démord pas. Il veut poursuivre coûte que coûte son parcours contre l’UMP de Nicolas Sarkozy mais sans le Parti socialiste de Ségolène Royal. En bref, il désire continuer à tracer sa voix à lui : celle d’un centre qu’il présente comme un contre-pouvoir éclairé et libre. C’est pour cela qu’il a lancé le Mouvement démocrate avant les élections législatives. Ce nouveau parti centriste a été fondé sur les bases de l’UDF mais avec la volonté d’élargir ses assises à tous ceux qui refusent le clivage gauche-droite et l’hégémonie de l’UMP et du Parti socialiste sur la vie politique. En fait, François Bayrou s’adresse aux quelque 7 millions d’électeurs qui lui ont apporté leur suffrage au premier tour de l’élection présidentielle et dont il espère qu’ils partagent son idéal de «résistance». Il a d’ailleurs choisi de réunir ses partisans au Zénith, à Paris, pour son premier grand meeting de campagne. Là même où il avait obtenu un beau succès avant le premier tour de la présidentielle, au moment où sa cote de popularité était au plus haut.

A en croire les chiffres avancés par le MoDem, cette initiative a séduit. Ils seraient 70 000 à avoir adhéré depuis le 10 mai. Un afflux de militants à première vue très encourageant puisque l’UDF ne regroupait, quant à elle, que 31 000 adhérents. Mais malgré ce sang neuf, le MoDem ne s’avance pas vers les législatives dans la configuration la plus favorable. Le divorce avec l’UMP est totalement et irrémédiablement consommé depuis que François Bayrou a affirmé, entre les deux tours de la présidentielle, qu’il ne voterait pas pour Nicolas Sarkozy. Au-delà des conséquences directes sur les relations avec le mouvement de celui qui est devenu ensuite le président de la République, cette déclaration a provoqué des réactions au sein même des centristes. La plupart des députés sortants de l’UDF ont annoncé qu’ils se ralliaient à Nicolas Sarkozy, estimant que c’est à droite que se trouve l’alliance naturelle de l’UDF. Du coup, c’est un MoDem privé des trois quarts de ses têtes d’affiche potentielles (24 sur 29 élus) qui se présente aux législatives.

Défections et ouverture

A ces défections en chaîne, se sont ajoutées d’autres mauvaises nouvelles. Comme celle de l’entrée dans le gouvernement de François Fillon, de l’un des proches de François Bayrou, le vice-président de l’UDF Hervé Morin. Même s’il est le seul centriste au gouvernement, il occupe un ministère important : celui de la Défense. Mais surtout, sa participation symbolise la volonté d’ouverture de Nicolas Sarkozy. Le nouveau chef de l’Etat a, en effet, pris soin de ne pas appeler que des fidèles UMP pure souche. Il a choisi d’élargir le recrutement de l’équipe des ministres en y intégrant des personnalités d’autres familles politiques, comme le socialiste Bernard Kouchner, nouveau chef de la diplomatie. Cette stratégie vise à jeter le trouble chez les socialistes. Mais elle est aussi destinée à démontrer que le discours de François Bayrou sur l’Etat, captif d’un camp, n’a pas lieu d’être.

Le MoDem doit, par ailleurs, faire face à l’émergence d’un nouveau courant centriste. Les parlementaires ralliés à Nicolas Sarkozy ont, en effet, décidé de créer leur propre mouvement. Il n’a pas encore, pour le moment, de dénomination définitive (elle ne sera annoncée que le 29 mai, mais on évoque le terme de «Nouveau centre»). Cela ne l’empêche pas d’exister et de présenter une centaine de candidats aux législatives. Ceux-ci ont été inscrits sur les listes en tant que membres du Parti social libéral européen (PSLE). Ils bénéficient de l’étiquette «majorité présidentielle».

Cette démarche a été dénoncée par le MoDem. Eric Azière, le responsable des élections et des Fédérations de l’UDF-Mouvement démocrate, a évoqué une «armée de figurants», en ironisant sur la présence sur les listes de nombreux membres des familles des députés sortants, comme l’épouse d’Hervé Morin dans les Hautes-Pyrénées. Une attaque qui a engendré une riposte immédiate de la part de Maurice Leroy. Le député du Loir-et-Cher a déclaré : «C’est vrai pour toutes les formations politiques, toutes autant qu’elles sont».

Il est vrai qu’en vertu de la loi sur le financement des partis, un mouvement peut recueillir 1,63 euro par suffrage exprimé en sa faveur, si tant est qu’il ait réalisé au moins 1% des voix dans 50 circonscriptions au premier tour. Et qui dit 50 circonscriptions, dit donc 50 candidats. C’est ce qui permet aux formations politiques de vivre, surtout aux plus petites d’entre elles. Dans le cas des deux nouveaux partis centristes, les législatives représentent donc de ce point de vue un enjeu vital.

Beaucoup de candidats, peu de sièges ?

Cela a certainement motivé, au moins en partie, la décision de François Bayrou de présenter le maximum de candidats. Le MoDem sera présent dans 535 circonscriptions sur 577. François Bayrou est candidat dans son fief des Pyrénées-Atlantiques, un département où se présente aussi Jean Lassalle, l’un des autres sortants de l’UDF. Anne-Marie Comparini (Rhône), Gilles Artigues (Loire) sont les autres députés restés fidèles au MoDem. Jean-Christophe Lagarde, qui est candidat en Seine-Saint-Denis, a obtenu l’investiture de ce mouvement mais préfère se présenter sous l’étiquette «Bobigny-Drancy». Quelques députés européens de l’UDF comme Marielle de Sarnez, Claire Gibault, Bernard Lehideux, Jean-Marie Cavada, Anne Laperrouze et Thierry Cornillet sont aussi venus étoffer la liste des candidats du MoDem. Cette forte présence n’est pas cependant, à en croire les sondages, une garantie de réussite. Le MoDem n’est pas crédité de plus de huit sièges dans les projections les plus optimistes et de zéro dans les plus pessimistes.

La plupart des candidats étiquetés PSLE ont, en revanche, de bonnes chances de remporter la victoire dans leur circonscription puisqu’ils bénéficient du soutien de l’UMP. Pour le MoDem, la stratégie du refus de l’alliance avec la droite risque donc de se traduire par un score très faible, voire une disparition de leur présence à l’Assemblée nationale.



par Valérie  Gas

Article publié le 24/05/2007 Dernière mise à jour le 24/05/2007 à 13:28 TU