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Mozambique

Maputo s’apprête à accueillir l’Union Africaine

C’est à Maputo, la capitale mozambicaine, que s’ouvrira le 4 juillet prochain le deuxième sommet de l’Union Africaine (UA). L’occasion pour le Mozambique de montrer à l’Afrique et au monde les résultats d’un processus de paix réussi et pour son président, Joaquim Chissano, de préparer son avenir international.
De notre correspondante à Maputo

Depuis plusieurs semaines, plus question de la nonchalance qui donne à Maputo sa douceur de vivre légendaire. À une quinzaine de jours de l’ouverture du deuxième sommet de l’Union Africaine (UA) dans la capitale mozambicaine, c’est l’effervescence qui prévaut. Entretien des routes et de l’éclairage public, répétition des cortèges, et dans l’ardeur du nettoyage, éloignement du centre ville des enfants des rues et des déficients mentaux.

C’est la première fois depuis l’Indépendance du pays en 1975 et depuis la fin de la guerre civile en 1992, que le Mozambique accueille une réunion d’une telle ampleur. Tous les ministères ont été impliqués dans la préparation de la rencontre et dans les bureaux de la Commission Interministérielle pour le Sommet de l’Union Africaine (CIUA), on ne compte plus ses heures supplémentaires pour que l’accueil des 5 000 visiteurs, délégués et journalistes, soit à la hauteur de l’événement.

L’enjeu est d’abord symbolique. Il y a 28 ans, l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) soutenait la lutte armée du Frelimo (Front de Libération du Mozambique) contre le régime colonial portugais. «Pour nous, c’est la première opportunité de ce genre que nous ayons pour exprimer notre gratitude en offrant l’hospitalité à tous les délégués de l’Union Africaine» souligne avec fierté le porte-parole de la Commission d’organisation, Manuel Lubisse.

Mais plus que le passé, c’est le futur que le Mozambique veut capitaliser à cette occasion. L’organisation du sommet doit aussi servir de vitrine à la success-story mozambicaine. Pour Manuel Lubisse, «le choix unanime porté par les membres de l’Union Africaine sur Maputo pour l’accueil d’un tel sommet reflète les progrès significatifs du pays depuis la fin de la guerre, notamment en terme de stabilité politique. Le Mozambique est aujourd’hui en condition pour accueillir dignement un sommet d’une telle importance».

Il est vrai que le pays cueille aujourd’hui les fruits d’un processus de paix engagé en 1992 et unanimement salué comme une réussite. Les deux anciens belligérants, le Frelimo (au pouvoir) et la Renamo (dans l’opposition) s’affrontent désormais au Parlement. Encadré par une aide internationale de 600 millions de dollars par an, et soutenu par des investissements étrangers croissants, le pays s’est relevé des graves inondations de 2000 et affiche un taux de croissance moyen de 10%. Signe de l’intérêt international pour le pays : le défilé diplomatique dans la capitale mozambicaine après le premier sommet de l’Union Africaine de Durban en juillet 2002, alors que le pays s’apprêtait à fêter les dix ans de ses accords de paix. Comme une revanche sur l’histoire, deux contingents mozambicains ont été intégrés cette année aux forces africaines de maintien de la paix au Burundi et en République Démocratique du Congo. À l’Afrique aujourd’hui, de venir se rendre compte in situ du succès mozambicain.

NEPAD encore et toujours

Mais le Mozambique est conscient de sa vulnérabilité. Pays le plus pauvre de l’Afrique australe, il milite depuis le début pour un développement régional équilibré. Son sésame : le Nouveau Partenariat pour le Développement de l’Afrique (NEPAD). Présent la semaine dernière au Forum économique pour l’Afrique de Durban, avec le sud-africain Thabo Mbeki et le sénégalais Abdoulaye Wade, Joaquim Chissano a rappelé l’importance du projet : «Le NEPAD n’est pas juste un autre plan économique. Les leaders et les peuples africains doivent comprendre que ce sont eux qui doivent être responsables de leur développement» a souligné le chef de l’Etat mozambicain, membre du comité de mise en œuvre du nouveau plan. «L’aide doit d’abord se faire sous forme d’investissements et le NEPAD doit être ce ballon d’oxygène à même de faire décoller les économies africaines».

Le NEPAD sera d’ailleurs l’emblème de ce sommet mozambicain. Une position très proche de celle de l’Afrique du Sud et de son président Thabo Mbeki. Sans surprise d’ailleurs, le grand voisin sud-africain a annoncé le 11 juin qu’il était prêt à assister le Mozambique pour assurer le succès du sommet.

Pour le Président mozambicain lui-même, l’enjeu de ce deuxième sommet n’est pas négligeable. Dans la lignée d’Alpha Konaré, l’ancien chef d’État malien, candidat à la présidence de l’UA, Joaquim Chissano ne se représentera pas à l’élection présidentielle de 2004 malgré une clause constitutionnelle qui l’y autorise. Poliçant son image internationale, le président mozambicain se fait aujourd’hui le chantre de la paix et de la démocratie. A Durban, il a clairement appelé à la fin des dictatures sur le continent.

Dans les milieux diplomatiques on reconnaît d’ailleurs la position favorable dont bénéficierait Joaquim Chissano, une fois son mandat terminé, s’il arrivait que l’élection du président de la Commission de l’Union Africaine n’ait pas lieu cette année. La présidence de l’Union Africaine qui sera assurée dès la fin du sommet par le Mozambique devrait de toute façon lui donner une marge de manœuvre supplémentaire.



par Jordane  Bertrand

Article publié le 27/06/2003