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Irak

Prisonniers irakiens : Rumsfeld au coeur de la tourmente

Donald Rumsfeld est accusé d'avoir autorisé les sévices infligés aux prisonniers irakiens. 

		(Photo AFP)
Donald Rumsfeld est accusé d'avoir autorisé les sévices infligés aux prisonniers irakiens.
(Photo AFP)
Le secrétaire à la Défense, Donald Rumsfeld, est de plus en plus pointé du doigt dans le scandale des sévices infligés aux prisonniers irakiens d’Abou Ghraïb. A en croire l’hebdomadaire américain New Yorker à paraître lundi, le numéro 1 du Pentagone aurait lui-même approuvé un programme destiné à autoriser l’usage des méthodes d’interrogatoire non-conventionnelles dans le but d’obtenir des renseignements au sujet de l’insurrection irakienne.

Quinze jours après avoir révélé l’existence du rapport confidentiel rédigé en février dernier par le général Antonio Taguba sur les sévices infligés aux prisonniers irakiens d’Abou Ghraïb, le journaliste d'investigation du New Yorker, Seymour Hersh, affirme dans un article que ces tortures sont la conséquence d’une décision approuvée secrètement en 2003 par le secrétaire américain à la Défense. Selon lui, «les racines» de cette affaire«ne reposent pas sur les penchants criminels de quelques réservistes mais bien sur une décision approuvée l’an dernier» par Donald Rumsfeld. Cette décision, affirme le journaliste vedette du New Yorker, visait à «étendre les limites d’un programme hautement secret, destiné à l’origine à la chasse d’al-Qaïda, aux interrogatoires de prisonniers en Irak».

Citant des officiers du renseignement encore actifs ou à la retraite, Seymour Hersh explique que le programme en question «encourageait la coercition physique et les humiliations sexuelles de prisonniers irakiens, dans une tentative d’obtenir plus d’informations sur l’insurrection grandissante en Irak». Selon lui, l’ordre de mission des militaires chargés des interrogatoires était: «Attrapez ceux qu’il faut et faites ce que vous voulez».

Elaboré par le sous-secrétaire à la Défense pour le renseignement, Stephen Cambone, ce projet a été approuvé par Donald Rumsfeld et par le chef d’état-major interarmes Richard Myers. «La solution entérinée par le secrétaire à la Défense était d’être plus dur avec les Irakiens qui se trouvaient dans le système carcéral et qui étaient soupçonnés de prendre part à l’insurrection», écrit notamment Seymour Hersh.

«Guantanamoïser» les prisons irakiennes

Le journaliste du New Yorker cite également le général Geoffrey Miller, encore récemment commandant du centre de détention et d'interrogation de la base navale américaine de Guantanamo. L'officier avait été dépêché en Irak en août dernier à l'initiative de hauts responsables du Pentagone frustrés par l'insuffisance des renseignements obtenus auprès des prisonniers irakiens. Il aurait à cette occasion recommandé de «guantanamoïser» le système des prisons en Irak.

Les informations du New Yorker ont été vivement démenties par le Pentagone qui a estimé que de telles affirmations étaient «saugrenues, dignes d'une conspiration et remplies de conjectures anonymes». «Aucun responsable du département de la Défense n’a approuvé quelque programme que ce soit conçu pour conduire à de tels abus comme ceux vus sur les photos et les vidéos récentes», a notamment affirmé la porte-parole du Pentagone, Lawrence Di Rita.

Les révélations de Seymour Hersh ne pouvaient tomber plus mal pour le secrétaire à la Défense, au centre de toutes les critiques depuis le déclenchement du scandale des sévices infligés aux prisonniers irakiens. Elles interviennent au moment où, soucieuse d’améliorer son image en Irak, l’armée américaine a annoncé avoir interdit les interrogatoires trop musclés. Un ordre d'abolir les pratiques les plus dures a ainsi été donné jeudi dernier par le général Ricardo Sanchez, chef des forces terrestres de la coalition en Irak, juste après la visite éclair à Bagdad de Donald Rumsfeld. La liste des techniques désormais interdites permettait notamment aux militaires interrogeant des détenus de modifier l'alimentation des prisonniers,

voire de les priver de nourriture, de les empêcher de dormir pendant plus de trois jours consécutifs et de les contraindre à des postures douloureuses pendant plus de 45 minutes. Les gardiens avaient en outre le droit de menacer des prisonniers avec des chiens et de les maintenir sous une cagoule pendant 72 heures afin de leur faire perdre leurs facultés sensorielles.



par Mounia  Daoudi

Article publié le 16/05/2004 Dernière mise à jour le 16/05/2004 à 15:23 TU