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Pétrole

Opep : un geste nécessaire mais pas suffisant

Le président de l’Opep, l’Indonésien Purnomo Yusgiantoro. L’organisation refuse de porter le chapeau pour les prix élevés du pétrole. 

		(Photo: AFP)
Le président de l’Opep, l’Indonésien Purnomo Yusgiantoro. L’organisation refuse de porter le chapeau pour les prix élevés du pétrole.
(Photo: AFP)
L'Opep a reporté au 3 juin prochain, à l'occasion de sa réunion plénière à Beyrouth, une éventuelle augmentation de ses quotas de production pour enrayer la hausse du pétrole. Mais ce geste de bonne volonté, s'il a lieu, risque d’être de peu d’efficacité car, pour l’essentiel, l’envolée du prix du baril tient à d’autres causes que le manque d’approvisionnement des marchés en brut.

Les ministres du pétrole des membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) ont décidé, lors de leur réunion ce week-end à Amsterdam (Pays-Bas), de reporter une éventuelle augmentation de leurs quotas de production. En marge d’un forum entre producteurs et consommateurs, ils ont étudié la proposition de l’Arabie saoudite, soutenue par l’Iran et le Koweït, d’augmenter de 1,5 million de barils par jour leur production actuelle, fixée officiellement à 23,5 millions de barils par jour. Mais ils ont finalement décidé d'attendre leur réunion plénière de Beyrouth, le 3 juin, pour émettre une éventuelle recommandation.

Il s’agirait là d’un geste de bonne volonté du cartel pétrolier envers les pays consommateurs qui craignent de plus en plus que l’envolée des prix du pétrole vienne casser la reprise de la croissance économique. Le baril à New York navigue, ces jours ci, entre 40 et 41 dollars, prix jamais atteint depuis 1990. Pour Claude Mandil, directeur exécutif de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) qui représente les pays consommateurs, un prix durablement élevé de 25 à 35 dollars entraînerait une perte d’un demi-point de croissance et jusqu’à un point de croissance entre 35 et 45 dollars. Les ministres des Finances du G7 (les sept pays les plus industrialisés) qui se retrouvent samedi et dimanche à New York ne manqueront pas d’exprimer leur «préoccupation» face à cette flambée des prix.

Ne pas porter le chapeau

Toutefois ni les pays de l’Opep, ni les consommateurs ni même les marchés financiers ne semblent vraiment croire à l’efficacité de cette mesure qui, en tout état de cause ne serait pas formellement arrêtée avant la réunion ministérielle de l’Opep le 3 juin à Beyrouth au Liban. En effet, selon le président de l’Opep lui-même, l’Indonésien Purnomo Yusgiantoro, la production totale du cartel est actuellement de 28 millions de barils par jour (mbj) soit de 85% à 90% de ses capacités. Aux 23,5 mbj des quotas officiels s’ajoutent les 1,5 à 2 millions de barils de dépassement que les pays membres s’autorisent traditionnellement, en dépit de leurs engagements, et la production irakienne, pays non soumis à quota en raison de sa situation particulière. C’est ce qui fait dire aux analystes du marché pétrolier que remonter les quotas officiels de 1 ou 2 mbj ne mettrait pas, dans la réalité, un seul baril de plus dans le circuit. Seule une augmentation effective de la production, selon l’AIE, peut enrayer la hausse du prix.

Et cela risque de ne pas suffire. L’Opep refuse de porter le chapeau pour les prix élevés du pétrole, estimant qu’une part de la responsabilité revient aux autres acteurs: pays producteurs non membres du cartel, consommateurs, courtiers et spéculateurs. Ce n’est pas tant le manque de pétrole disponible ou la peur de manquer qui fait monter les prix. La crise au Proche-Orient qui incite les intermédiaires à engranger de fortes primes de risque, l’incertitude géopolitique persistante, une demande supérieure aux prévisions en Asie et aux Etats-Unis poussent de leur coté les prix vers le sommet. Enfin, la part de l’Opep dans le total des exportations mondiales tend à se réduire pour ne plus représenter que 40% environ.

L’une des raisons principales de l’envolée des cours est liée non pas au manque de pétrole brut mais au manque de capacités de raffinage des Etats-Unis qui appréhendent une pénurie d’essence. Or, les Etats-Unis consomment 12% de la production mondiale de brut sous forme d’essence. Le secrétaire américain à l’Energie, Spencer Abraham, a annoncé qu’il étudiait les moyens d’augmenter les capacités de raffinage pour mieux approvisionner le marché. La saison estivale commence aux Etats-unis dans une dizaine de jours et correspond à un pic annuel de consommation d’essence ce qui a propulsé le cours à New York à un record historique mercredi, à 1,45 dollar le gallon (3,8 litres).



par Francine  Quentin

Article publié le 21/05/2004 Dernière mise à jour le 22/05/2004 à 14:01 TU