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Union européenne

Constitution : 48 heures pour conclure

L'Irlandais Bertie Ahern pousse à un compromis sur la future constitution européenne. 

		(Photo: AFP)
L'Irlandais Bertie Ahern pousse à un compromis sur la future constitution européenne.
(Photo: AFP)
Rarement sommet des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union européenne aura revêtu une telle importance. Pendant deux jours, à Bruxelles, le Conseil européen doit, théoriquement, mettre un point final au projet de constitution et désigner un nouveau président de la Commission européenne.
Dans un climat marqué par l’échec électoral de nombre de gouvernements en place lors des élections au parlement européen, les dirigeants des 25 pays de l’Union européenne se retrouvent à Bruxelles avec un ordre du jour copieux. D’autant plus qu’ils doivent aussi prouver aux eurosceptiques, qui se sont largement exprimé dans le scrutin de la semaine dernière, que l’Europe à 25 est en état de fonctionner.

Premier enjeu de cette rencontre au sommet, pour la première fois à 25 depuis l’élargissement du 1er mai, l’adoption du projet de constitution européenne, après l’échec à trouver un compromis au précédent sommet de décembre 2003. Ce que la présidence italienne n’était pas parvenue à faire, la présidence irlandaise tente de l’obtenir, dans la dernière ligne droite. Le Premier ministre irlandais Bertie Ahern a fait, à la veille de l’ouverture de la rencontre, des propositions de nature, espère-t-il, à surmonter les oppositions persistantes au projet présenté il y a près de 18 mois par Valéry Giscard d’Estaing, président de la convention pour l’avenir de l’Europe.

Ainsi, aux petits pays de l’Union européenne qui s’insurgent contre la pondération des voix au conseil des ministres, la présidence irlandaise propose, dans le cadre de la double majorité, de relever à 55% des Etats membres et 65% de la population de l’Union le seuil requis pour adopter une décision. Et la minorité de blocage ne pourrait pas rassembler moins de quatre pays. Toujours pour apaiser les craintes de main mise des grands pays européens sur les autres l’Irlande suggère de maintenir un commissaire européen par pays jusqu’en 2014 et d’en réduire ensuite le nombre à 18 commissaires, en adoptant un système de rotation égalitaire. La proposition Giscard de diminuer le nombre des membres de la Commission européenne à 15, par rotation entre les 25 pays, avait déclenché un tollé. Cette proposition avait pour but de rendre plus efficace cette instance et de la déconnecter d’une représentation nationale stricte. Le compromis propose aussi de relever de 4 à 6 le nombre minimum de députés européens par pays.

Cette avancée de la présidence irlandaise n’est cependant pas assurée du succès car, déjà, Polonais, Hongrois et Tchèques, ont fait savoir qu’ils souhaitaient la parité dans la double majorité 55/55 ou 60/60 ou, à la rigueur, deux pourcentages proches. Les discussions s’annoncent donc serrées. D’autant que les questions institutionnelles ne sont pas les seules à créer des divisions dans l’Union européenne. Bertie Ahern, bien que responsable politique dans la très catholique Irlande, a choisi de ne faire aucune référence à l’héritage chrétien dans le préambule de la future constitution. Cette question est loin d’être anecdotique car elle a opposé de longs mois les laïcs (France, Belgique, Danemark, Suède, Finlande et depuis l’élection des socialistes, les Espagnols) à des pays comme la Pologne qui se prévalait du soutien du pape Jean-Paul II.

Grandes manœuvres pour la présidence de la Commission

Enfin, donnant satisfaction à la France, l’Allemagne et l’Italie, le projet de compromis réduit les compétences de la Commission européenne sur le sujet brûlant du respect du pacte de stabilité. Le projet initial donnait à la Commission le pouvoir de faire des « propositions » aux Etats contrevenant aux seuils d’endettement et de déficit publics. Elle ne pourrait plus faire que des « recommandations » et encore avec le feu vert des ministres européens de l’Economie et des Finances. Cette manière d’écorner le pouvoir de la Commission européenne risque de se heurter à l’opposition farouche des Pays-Bas notamment.

La tâche des chefs d’Etat et de gouvernement n’est donc pas mince et les plus pessimistes parlent déjà d’un ultime réunion en juillet. A cette séance de rattrapage pourrait aussi être reportée la désignation du successeur de Romano Prodi à la tête de la Commission européenne. Le temps presse car le parlement européen est appelé, selon le calendrier, prévu à ratifier cette désignation le 22 juillet. D’ici là, le parlement nouvellement élu aura procédé à l’élection de son propre président, le 20 juillet.

La désignation d’un nouveau président de la Commission européenne est rendue difficile par le refus du très consensuel Premier ministre libéral  luxembourgeois Jean-Claude Juncker de céder aux pressions. Il aurait présenté l’avantage de convenir à droite comme à gauche. Le parti populaire européen (PPE) qui regroupe les partis conservateurs de l’Union européenne, majoritaire au nouveau parlement, présente le conservateur britannique Chris Patten pour cette fonction. En revanche le PPE ne soutiendra pas le libéral belge Guy Verhofstadt, qui a pourtant les faveurs de Paris et Berlin. D’autres noms courent en attendant la décision du conseil européen dont celui du commissaire européen socialiste Antonio Vitorino ou du ministre français des Affaires étrangères Michel Barnier. Mais bien d’autres considérations que l’appartenance politique dans son pays peuvent faire pencher la balance en faveur d’un futur président de la Commission européenne.



par Francine  Quentin

Article publié le 17/06/2004 Dernière mise à jour le 18/06/2004 à 14:04 TU

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Daniel Gros

Directeur du Centre européen d'études politiques de Bruxelles

«Tous les sondages dont on dispose nous disent qu'il ya des domaines où les citoyens veulent plus d'Europe.»

[17/06/2004]

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