Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

XVème Conférence internationale sur le sida

La riposte passe par les femmes

En Thaïlande, une étude a ainsi montré que 75 % des femmes infectées l’avaient été par leurs maris contaminés lors de rapports sexuels extra-conjugaux. 

		Photo : AFP
En Thaïlande, une étude a ainsi montré que 75 % des femmes infectées l’avaient été par leurs maris contaminés lors de rapports sexuels extra-conjugaux.
Photo : AFP
Les dernières statistiques sur la pandémie de sida montrent que le virus frappe aujourd’hui de plus en plus durement la population féminine, notamment en Afrique subsaharienne. Les spécialistes réunis à l’occasion de la conférence de Bangkok ont donc mis en avant la nécessité de mener des actions à destination des femmes pour stopper la propagation du VIH dans les prochaines années.

Près de 60 % des personnes infectées par le VIH en Afrique subsaharienne sont des femmes. La féminisation de l’épidémie est une tendance lourde qui ne touche pas seulement ce continent. Entre 1997 et 2003, le taux de séropositivité dans cette catégorie de population est passé globalement de 41 % à 48 %. Du coup, le nombre d’orphelins du sida a fortement augmenté. On en compte plus de douze millions en Afrique subsaharienne sur un total de 15 millions. La transmission du virus de la mère à l’enfant est aussi devenue un problème majeur. Plus de 600 000 enfants ont, en effet, été infectés par le VIH en 2003, la plupart du temps pendant la grossesse, l’accouchement ou l’allaitement. Cette situation nécessite une réponse adaptée dans le cadre des programmes de prévention et de traitement élaborés pour lutter contre la diffusion du VIH. Les représentants de la communauté scientifique, réunis à la conférence de Bangkok, ont donc tiré la sonnette d’alarme dans l’espoir, notamment, de sensibiliser les élites nationales sur les raisons et les problèmes liés à la féminisation de la pandémie.

Car au-delà de l’existence d’une plus grande vulnérabilité biologique, la progression du virus du sida chez les femmes est en grande partie liée à la place qu’elles occupent dans les sociétés des pays en développement. Les femmes sont plus exposées que les hommes parce qu’elles sont plus souvent victimes d’abus, de violences. Elles ont aussi plus de difficultés à faire respecter leurs droits et ont moins accès à l’éducation. Pour Thoraya Ahmed Obaid, la directrice générale du Fonds des Nations unies pour la population (Fnuap), «le pouvoir social et économique est la clef de tout». Du coup, tant que les femmes resteront sous le joug familial et social qui leur impose des mariages précoces et une sexualité non protégée –l’usage du préservatif étant particulièrement délicat à imposer dans le couple-, il sera difficile d’empêcher une large transmission du VIH. Les femmes mariées ou qui ont une relation monogame stable ne sont, en effet, pas plus protégées que les autres. En Thaïlande, une étude a ainsi montré que 75 % des femmes infectées l’avaient été par leurs maris contaminés lors de rapports sexuels extra-conjugaux.

La crainte d’être exclue incite les femmes à ne pas se faire dépister

Dans le cercle vicieux de la violence et de la stigmatisation qui entourent le sida, les femmes sont aussi plus souvent victimes que les hommes des réactions de rejet. La crainte d’être immédiatement maltraitées ou exclues les incite d’ailleurs souvent à ne pas se faire dépister ou à dissimuler leur séropositivité au risque de propager l'infection. D’autre part, ce sont aussi les femmes qui subissent le plus les conséquences du sida, qu'elles soient contaminées ou pas. Car ce sont elles qui doivent, dans tous les cas, assumer la charge des malades et des enfants. Même lorsqu’elles sont très jeunes.

Pour toutes ces raisons, les femmes doivent être au coeur de la riposte à l’épidémie de sida qu’il s’agisse de la lutte contre la stigmatisation, de l’accès aux traitements antirétroviraux ou de la mise en œuvre de programmes de dépistage et de prévention. Dans ce dernier domaine, les difficultés rencontrées par les femmes pour imposer l’usage du préservatif pourraient peut-être être contournées par la mise au point de microbicides. Les scientifiques de l’International Partnership for Microbicides (IPM), présents à Bangkok, ont fait part de leurs espoirs concernant les recherches sur les gels ou crèmes à introduire directement dans le vagin qui pourraient empêcher la contamination. Selon une étude de la London School of Hygiene and Tropical Medicine, l’utilisation de tels produits serait susceptible d’éviter 2,5 millions d’infections sur trois ans. C’est pourquoi la directrice du programme, le docteur Zeda Rosenberg, a appelé, à Bangkok, à mettre les microbicides à la disposition des femmes des pays du Sud dès qu’ils seront au point. D’ici 5 à 7 ans.

par Valérie  Gas

Article publié le 15/07/2004 Dernière mise à jour le 16/07/2004 à 12:40 TU