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Nucléaire iranien

Téhéran relance l’enrichissement de l’uranium

Le président Khatami a réaffirmé la détermination de l'Iran à acquérir la technologie nucléaire. 

		(Photo : AFP)
Le président Khatami a réaffirmé la détermination de l'Iran à acquérir la technologie nucléaire.
(Photo : AFP)
Dans un signe de défi envers les pays occidentaux, le régime de Téhéran a annoncé mardi avoir commencé la conversion d’uranium à grande échelle. Cette annonce intervient quelques jours après le vote à Vienne par le conseil des gouverneurs de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) d’une résolution donnant à l’Iran jusqu’au 25 novembre pour clarifier son programme nucléaire. La République islamique qui a immédiatement rejeté cette demande a également menacé de suivre l’exemple de la Corée du Nord et de se retirer du Traité de non-prolifération (TNP) qui autorise l’agence onusienne à mener des inspections surprises sur les installations des pays signataires de ce texte.

Rien ne va plus entre Téhéran et les pays occidentaux, plus que jamais lassés par les tergiversations de la République islamique au sujet de son programme nucléaire. Après dix-huit mois de tensions, l’Allemagne, la Grande-Bretagne et la France –qui avaient pourtant adopté une position conciliante envers l’Iran privilégiant une politique de dialogue– ont choisi une attitude plus ferme comme en témoigne leur projet de résolution voté la semaine dernière par le conseil des gouverneurs de l’AIEA. Sans formuler d’ultimatum explicite comme l’aurait pourtant voulu Washington, ce texte donne à Téhéran jusqu’à la prochaine session de l’agence onusienne, prévue le 25 novembre, pour faire en sorte que tous les doutes soient levés sur la nature de son programme nucléaire. Il presse également l’Iran de suspendre toutes ses activités liées à l’enrichissement de l’uranium.

Réponse du berger à la bergère, la République islamique a immédiatement rejeté la résolution de l’AIEA, allant jusqu’à menacer de se retirer du Traité de non-prolifération si des sanctions venaient à être prises à son encontre. «L’Iran n’acceptera aucune obligation de suspension de l’enrichissement de l’uranium et aucune instance internationale ne peut le contraindre à le faire», a en outre affirmé Hassan Rohani en charge du dossier nucléaire iranien. Le régime de Téhéran estime en effet qu’il est seul habilité à décider ou non de la conversion d’uranium à grande échelle, préalable à son enrichissement. Un porte-parole du gouvernement a ainsi rappelé que «la suspension de l’enrichissement –obtenue en octobre dernier par les chefs de la diplomatie allemande, britannique et française– avait été un acte volontaire» de Téhéran. «C’est nous qui décidons quand nous la levons», a notamment insisté Abdollah Ramemanzadeh.

Mais les autorités iraniennes n’ont pas pour autant fermé la porte aux pourparlers avec l’agence onusienne qu’ils ont regretté voir céder «aux pressions politiques de certains pays», en premier lieu les Etats-Unis. Hassan Rohani, qui a vigoureusement exclu que son pays puisse accepter «sous la contrainte» de suspendre l’enrichissement de son uranium, n’a en effet pas écarté que cela puisse se faire «au travers de négociations».  

Démonstration de force

Soufflant le chaud et le froid, l’Iran a parallèlement annoncé mardi avoir commencé la conversion de quelque 37 tonnes de yellow cake –minerai concentré d’uranium naturel– en hexafluoride d’uranium gazeux (UF6). Ce gaz sert à produire de l’uranium enrichi  par séparation des molécules dans des centrifugeuses dont Téhéran a repris en juin dernier l’assemblage au grand dam de l’AIEA. «Une partie des 37 tonnes a été utilisée et les tests ont été positifs» a déclaré le chef de l’agence iranienne de l’énergie nucléaire. Sans rejeter la demande de suspension introduite par l’ONU, Reza Aghazadeh a rappelé que le Traité de non-prolifération n’interdisait pas à un pays d’enrichir de l’uranium. «L’Iran, a-t-il insisté, prendra sa décision en fonction de ses intérêts nationaux».

L’uranium enrichi peut servir de combustible nucléaire aussi bien pour l’énergie civile que dans le domaine militaire. Quand il est faiblement enrichi, il peut ainsi être utilisé pour alimenter des centrales électriques nucléaires telles que celle que la République islamique construit actuellement à Bushehr, sur sa côte sud. A un niveau plus élevé d’enrichissement, cet uranium peut servir à la fabrication d’armes atomiques, ce que l’administration Bush soupçonne Téhéran de faire malgré ses virulentes dénégations.

C’est dans ce contexte de fortes tensions que l’Iran a commémoré mardi la «Défense sacrée», appellation officielle de la guerre qui l’a opposé huit ans durant au régime de Saddam Hussein. Ces célébrations ont été accompagnées d’une parade militaire exaltant la puissance militaire de la République islamique avec notamment le déploiement d’une partie de son arsenal balistique flanqué de banderoles proclamant la destruction d’Israël et des Etats-Unis. Dans un geste de défi à l’Occident, le président Mohammad Khatami a réaffirmé que l’Iran était résolu à poursuivre son programme nucléaire. «Nous sommes déterminés à nous doter d’une technologie nucléaire même si cela doit entraîner l’arrêt de la surveillance internationale», a-t-il prévenu sous-entendant que son pays n'hésiterait pas à se retirer du Traité de non-prolifération qui autorise l'AIEA à mener des inspections surprises dans ses installations. Le chef de l'Etat iranien a également ajouté que son pays n’avait jamais voulu d’armes nucléaires. «Nous voulons de la technologie civile», a-t-il insisté appelant la communauté internationale à reconnaître enfin «le droit de l’Iran» à cette énergie.



par Mounia  Daoudi

Article publié le 22/09/2004 Dernière mise à jour le 22/09/2004 à 15:56 TU