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Ukraine

Compromis au Parlement

Les Ukrainiens ont adopté la réforme constitutionnelle prônée par Léonid Koutchma et les modifications de la loi électorale lors du vote au parlement ce jour. 

		(Photo : AFP)
Les Ukrainiens ont adopté la réforme constitutionnelle prônée par Léonid Koutchma et les modifications de la loi électorale lors du vote au parlement ce jour.
(Photo : AFP)
Le président ukrainien Léonid Koutchma a finalement réussi à faire adopter par le Parlement son projet de réforme constitutionnelle visant à réduire les pouvoirs du chef de l’Etat. Les députés de l’opposition ont accepté de voter ce texte en l’échange de quelques concessions sur son entrée en vigueur et de l’adoption des modifications de la loi électorale nécessaires pour éviter de nouvelles fraudes lors du scrutin du 26 décembre. Reste à savoir si ce compromis va permettre d’apaiser les tensions et de préparer le nouveau second tour de la présidentielle plus sereinement, alors que la polémique autour d’un possible empoisonnement du candidat de l’opposition Viktor Iouchtchenko continue à semer la discorde.

Viktor Iouchtchenko a-t-il été empoisonné ? Cette question revient sans cesse depuis que le candidat réformateur à l’élection présidentielle ukrainienne a été foudroyé en pleine campagne électorale par une maladie inexpliquée qui l’a défiguré. Et la réponse, si elle finit par être donnée, risque d’avoir une influence sur le scrutin qui doit permettre de désigner le nouveau président ukrainien, le 26 décembre prochain. De rumeurs en accusations et en démentis, toutes les versions ont circulé ces derniers jours. Même le Haut représentant pour la politique étrangère de l’Union européenne, Javier Solana, a donné son point de vue sur cette affaire en affirmant qu’il «pensait qu’il [Iouchtchenko] avait été empoisonné». Une thèse confirmée par des propos du docteur Nikoleï Korpan, qui a examiné le candidat réformateur dans la clinique de Vienne où il a été soigné, publiés par le Times. Le médecin y affirme que Viktor Iouchtchenko a bien reçu des «substances» (chimique, biologique, poison rare ?) dans «un but précis», à savoir le tuer.

Viktor Iouchtchenko, le candidat de l'opposition à gauche en juillet 2004 et à droite lors d'une conférence de presse, en  octobre de la même année, deux jours avant l'élection présidentielle en Ukraine. 

		(Photo : AFP)
Viktor Iouchtchenko, le candidat de l'opposition à gauche en juillet 2004 et à droite lors d'une conférence de presse, en  octobre de la même année, deux jours avant l'élection présidentielle en Ukraine.
(Photo : AFP)

Après les déclarations du candidat de l’opposition lui-même qui avait promis, il y a quelques jours, de fournir rapidement les preuves de son empoisonnement, cet entretien semblait confirmer la thèse d’une tentative d’assassinat. Et pourtant, dès mercredi, Evhen Tchervonenko, un député de la coalition d’opposition Notre Ukraine, a minimisé l’impact de ces affirmations en précisant qu’il était «trop tôt» pour certifier quoi que ce soit. Dans le même temps, le docteur Korpan est revenu en arrière par rapport à ses déclarations au Times et a déclaré : «Jusqu’à aujourd’hui, les soupçons d’empoisonnement n’ont été ni confirmés, ni exclus».

Autant dire que sur ce sujet brûlant, personne ne veut s’avancer trop hardiment. Et pour cause, dans une ambiance aussi explosive que celle provoquée par les fraudes qui ont entachées le deuxième tour de l’élection présidentielle, la gestion de cette affaire est particulièrement délicate. Car elle est susceptible de provoquer des dérapages dangereux dans un pays où l’affrontement entre pro-gouvernementaux et opposition s’est radicalisé.

Iouchtchenko satisfait, Ianoukovitch isolé

Malgré cette polémique et le climat de suspicion qu’elle provoque, la situation a connu une amélioration grâce au compromis réalisé au Parlement mercredi. Après plusieurs jours de blocage durant lesquels ni le camp du président Koutchma, ni les membres de l’opposition ne voulaient céder, les députés ont accepté de voter conjointement deux textes qui permettent à la fois de faire passer la réforme constitutionnelle prônée par le chef de l’Etat et les modifications de la loi électorale nécessaires pour organiser le nouveau second tour de la présidentielle.

L’opposition a dit oui à la réforme qui va transférer une partie des prérogatives du président de la République au Premier ministre et au Parlement, en échange d’un engagement à ne pas la faire appliquer avant septembre 2005 ou janvier 2006. Elle a aussi obtenu le vote conjoint des aménagements du code électoral destinés notamment à éviter de nouvelles fraudes lors du «troisième tour» de la présidentielle, le 26 décembre. L’opposition est, d’autre part, parvenue à imposer la dissolution de la commission électorale qu’elle demandait depuis plusieurs semaines et la démission du procureur général Hennadi Vassiliev, accusé d’être un partisan du Premier ministre Viktor Ianoukovitch.

Par contre, le président Koutchma a trouvé une parade pour éviter de limoger son Premier ministre, comme l’exigeait l’opposition. Il a autorisé ce dernier, désireux de marquer une distance avec le pouvoir pour tenter d’améliorer son image, à se mettre «en vacances» pour préparer la campagne électorale. Cette disposition rend légalement impossible le renvoi du Premier ministre mais elle aboutit néanmoins dans la pratique à l’isoler, même s’il reste le candidat du pouvoir soutenu par la Russie. Car il ne dispose plus des mêmes ressources pour mener sa campagne, aussi bien dans l’appareil de l’Etat que dans les médias.

Viktor Iouchtchenko se trouve quant à lui dans une situation plutôt avantageuse. Il s’est d’ailleurs déclaré satisfait du compromis trouvé au Parlement. Il estime qu’il «ouvre la voie» à sa victoire dans une vingtaine de régions d’Ukraine. La conclusion de cet accord politique pré-électoral a d’ailleurs été saluée par la décision de l’opposition de lever le blocus sur les bâtiments administratifs dès mercredi soir.


par Valérie  Gas

Article publié le 08/12/2004 Dernière mise à jour le 08/12/2004 à 16:29 TU