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Liban

Nouvel attentat sur fond de crise politique

Un attentat à la voiture piégée dans un quartier résidentiel de la banlieue nord de Beyrouth a fait plus d’une dizaine de blessés.(Photo : AFP)
Un attentat à la voiture piégée dans un quartier résidentiel de la banlieue nord de Beyrouth a fait plus d’une dizaine de blessés.
(Photo : AFP)
Plusieurs personnes ont été blessées dans l’explosion d’une charge piégée placée sous une voiture, près de Beyrouth. Cet attentat intervient alors que le pays, sans gouvernement depuis trois semaines, traverse une grave crise politique depuis l’assassinat de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri.
De notre correspondant à Beyrouth

Plusieurs personnes ont été blessées lors d’une puissante explosion qui a secoué samedi à 0h35 le quartier chrétien de Jdeidé, près de Beyrouth. La chargée explosive était placée sous une voiture stationnée dans un secteur commerçant et résidentiel. La déflagration a provoqué d’importants dégâts dans un immeuble qui a été partiellement détruit et dont les vitres ont volé en éclats dans un rayon de 200 mètres. Les forces de l’ordre ont bouclé la région et les blessés ont été évacués vers les hôpitaux.

Cette explosion intervient un peu plus d’un mois après l’assassinat de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri, tué le 14 février dans un attentat à l’explosif contre son convoi -un attentat qui a plongé le Liban dans une crise politique profonde et multiforme qui se complique jour après jour. Le retrait des troupes et des services de renseignements syriens vers la plaine orientale de la Békaa, conformément aux exigences de l’opposition libanaise et de la communauté internationale, n’a pas décrispé la situation.

Omar Karamé ne parvient toujours pas à former un cabinet d’union nationale

Le pays est sans gouvernement depuis le 28 février. Le Premier ministre désigné, Omar Karamé, qui se succède à lui-même, n’arrive toujours pas à former un cabinet d’union nationale. Il se heurte à l’intransigeance de l’opposition qui réclame le limogeage des chefs des services de sécurité et la formation d’une commission internationale d’enquête pour faire la lumière sur l’assassinat de Hariri, avant d’accepter de participer à tout cabinet.

Dès sa désignation, Omar Karamé avait affirmé qu’il préférait rendre son tablier plutôt que de former un gouvernement monochrome. Il attend le retour des Etats-Unis du Patriarche maronite Nasrallah Sfeir, considéré comme le mentor de l’opposition, pour tenter de débloquer la situation. Mais de Washington, où il a été reçu par George W. Bush, le prélat a déclaré qu’il ne pouvait pas contraindre l’opposition à participer au gouvernement, même si, personnellement, il appuyait une telle option. Omar Karamé pourrait donc annoncer son échec dès la semaine prochaine et renoncer à former un nouveau gouvernement.

Une autre personnalité devrait alors être choisie pour lui succéder, au terme de consultations parlementaires menées par le chef de l’Etat Emile Lahoud. Mais, entretemps, on approche de la date-limite pour le vote par le Parlement d’une nouvelle loi électorale. Si celle-ci n’est pas approuvée dans la première semaine d’avril, les délais constitutionnels pour l’organisation du scrutin seront dépassés. Pour éviter un vide au niveau du pouvoir législatif, la Chambre actuelle n’aura d’autre choix que d’autoproroger son mandat. Les loyalistes essaient de faire assumer à l’opposition, qui refuse de participer à un gouvernement d’union nationale, la responsabilité d’un tel scénario. L’opposition, elle, soupçonne le pouvoir de laisser traîner les choses afin que la prorogation du mandat du Parlement, au sein duquel les pro-syriens restent majoritaires, devienne une nécessité.

Emile Lahoud isolé

A cet aspect, déjà compliqué, de la crise se greffe un autre élément. De plus en plus de voix réclament la démission du président de la République, Emile Lahoud. C’est Walid Joumblatt qui est le fer de lance de cette campagne virulente. Le chef druze ne se contente plus de réclamer la démission des responsables des services de sécurité. Il accuse Emile Lahoud d’être «la tête du régime sécuritaire instauré par la Syrie au Liban». «Pour sortir véritablement de la crise, il faut que Bachar el-Assad pousse Lahoud à s’en aller», a-t-il dit. Mais cette demande ne fait pas l’unanimité au sein de l’opposition, du moins pour l’heure.

Invoquant les «dangers du vide constitutionnel» avec un pays sans président, sans gouvernement et sans chefs de services de sécurité, le Patriarche Sfeir et d’autres opposants chrétiens ne veulent pas entendre parler d’un départ d’Emile Lahoud avant les élections législatives. Le prélat craint par ailleurs qu’en cas de démission de Lahoud, le Parlement actuel, dominé par des pro-syriens, n’élise pour un mandat de six ans un président proche de Damas.

Affaibli, isolé, assommé par les coups de boutoirs d’une opposition qui a le vent en poupe, le régime vacille. La grande manifestation des loyalistes qui a rassemblé le mardi 8 mars des centaines de milliers de personnes lui a un peu remonté le moral. Mais sa joie fut de courte durée. Car six jours plus tard, l’opposition a rassemblé près d’un million de personnes dans le centre de Beyrouth. Le pouvoir a alors tenté une autre contre-offensive. Le directeur de la Sûreté générale, Jamil Sayyed, considéré comme l’éminence grise du régime, a donné une conférence de presse au cours de laquelle il a critiqué l’opposition avec des mots très durs.

Rappelant «les antécédents criminels de nombreux hommes politiques qui sont passés dans l’opposition après avoir pillé les institutions de l’Etat», il a annoncé que lui-même et les autres chefs des services de sécurité ne démissionneraient pas comme le réclame l’opposition. Mais, à peine avait-il terminé sa conférence de presse que plusieurs opposants se déchaînaient contre lui.

Le désarmement du parti islamique

Autre point central du débat politique, le sort du Hezbollah. Maintenant que la première exigence de la 1559 est en voie d’être satisfaite, avec la fin de la première phase du repli syrien et des assurances selon lesquelles le retrait complet aurait lieu avant le mois de mai, l’attention se porte sur le deuxième point de la résolution du Conseil de sécurité, c’est à dire le désarmement du parti islamiste.

Dans son discours officiel, l’opposition insiste sur le fait que cette question est une affaire interne libanaise et se déclare hostile au désarmement du Hezbollah. Mais dans le même temps, elle demande au parti chiite de clarifier ses intentions pour l’avenir et de prendre en considération les changements survenus au Proche-Orient. Certaines factions de l’opposition demandent carrément à la formation islamiste de remettre ses armes à l’armée libanaise. Pour le Hezbollah, cette option n’est nullement envisageable. Ces deux logiques contradictoires finiront par s’affronter. C’est seulement une question de temps.

Toute cette tension politique se traduit par des incidents de plus en plus nombreux sur le terrain. Il ne se passe plus un jour sans que des partisans des deux camps ne soient agressés à Beyrouth, au Liban-Nord, ou dans la Békaa où les troupes syriennes sont toujours présentes. Même au niveau des médias audiovisuels, des lignes de démarcations commençaient à apparaître. Une réunion a eu lieu entre les dirigeants des principales chaînes de télévision (al-Manar-Hezbollah; FTV-famille Hariri; LBC-pro-chrétienne) pour empêcher que la tension politique ne se transpose sur le petit écran.

Mais le danger le plus immédiat reste le spectre de la crise financière. Les experts sont unanimes: si la crise continue à ce rythme pendant quelques semaines encore, un effondrement monétaire majeur risque de se produire.


par Paul  Khalifeh

Article publié le 19/03/2005 Dernière mise à jour le 19/03/2005 à 10:32 TU

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Tristan Kayat

Reportage

«La Syrie est dans toutes les têtes. Personne ne prend la peine de considérer d'autres hypothèses.»

Frédéric Domont

Correspondant de RFI à Beyrouth

«L'explosion de cette voiture piégée intervient alors que certaines crispations apparaissent notamment entre le pouvoir et l'opposition libanaise.»

Frédéric Domont

Journaliste, correspondant de RFI à Beyrouth

«Rassemblement aujourd’hui à Beyrouth pour commémorer l’assassinat de Rafic Hariri, il y a un mois.»

Frédéric Domont

Correspondant de RFI à Beyrouth

«Une énorme démonstration de force parfaitement organisée»

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