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France-Turquie

Chirac demande des «clarifications» à Ankara

Le ministre des Affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy, déclarait ce mardi qu'&nbsp;«I<EM>l n’est guère envisageable qu’un pays </EM>(la Turquie)<EM> qui demande à entrer dans une communauté refuse de reconnaître l’un de ses membres</EM>».(Photo : AFP)
Le ministre des Affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy, déclarait ce mardi qu' «Il n’est guère envisageable qu’un pays (la Turquie) qui demande à entrer dans une communauté refuse de reconnaître l’un de ses membres».
(Photo : AFP)
Devant le corps diplomatique français réuni depuis lundi à Paris à l’occasion de la 13e conférence des ambassadeurs, le chef de l’Etat a évoqué les grands défis auxquels les représentants de la France à l’étranger doivent faire face. Jacques Chirac a lancé une mise en garde à l’Iran. Il a appelé les Ivoiriens à organiser un «scrutin présidentiel incontestable», à la date prévue du 30 octobre. Mais il a également saisi l’occasion pour se livrer à un recadrage de la position française à l’égard de l’entrée de la Turquie au sein de l’Union européenne, à un mois du début des négociations d’adhésion, le 3 octobre.

Les oreilles turques doivent siffler : les Français se distinguent encore sur le dossier de l’adhésion d’Ankara à l’Union européenne (UE), à un mois de l’ouverture des négociations à Bruxelles. En deux jours, à l’occasion de la réunion annuelle des ambassadeurs de France, les trois principaux personnages de l’Etat chargés de conduire la diplomatie française sont intervenus pour rappeler que rien n’était fait et que l’adhésion demeurait une hypothèse parmi d’autres.

C’est le président de la République qui, le premier, a évoqué la question, lundi, en réitérant se demande de «clarifications» à la Turquie, après que cette dernière eut souligné que l’accord étendant son union douanière à la République de Chypre, condition majeure fixée par Bruxelles à l’ouverture des négociations d’adhésion, ne valait pas reconnaissance formelle de Nicosie. Vendredi, lors d’un entretien avec le président de la Commission européenne, Jacques Chirac avait estimé que cette position n’était pas ce «qu’on attend d’un candidat à l’Union». De son côté la Commission soulignait que la Turquie n’était pas dans l’obligation de reconnaître Chypre pour entamer ses négociations d’adhésion avec l’UE. Ce serait utile, mais ce n’est pas nécessaire, suggère-t-on à Bruxelles.

«La Turquie n’a pas facilité les choses»

Lundi, devant les diplomates français réunis à Paris, souhaitant manifestement marquer une certaine prise de distance, le président français a rappelé que «l’ouverture de négociations avec la Turquie n’est que le début du long et difficile chemin, à l’issue incertaine, que va emprunter ce grand pays qui aspire rejoindre l’Union, c’est à dire adhérer à l’ensemble de ses valeurs et de ses règles». Mais M. Chirac a également indiqué que «des engagements ont été pris et la France s’y tiendra».

Mardi, ce fut au tour du ministre français des Affaires étrangères et de la ministre déléguée aux Affaires européennes de monter au créneau sur le dossier turc pour enfoncer le clou : la France «ne veut pas ouvrir une nouvelle crise en Europe», mais «la Turquie n’a pas facilité les choses : il n’est guère envisageable qu’un pays qui demande à entrer dans une communauté refuse de reconnaître l’un de ses membres», déclarait Philippe Douste-Blazy, tandis que Catherine Colonna rappelait aux ambassadeurs que «adhésion ou autre solution, son avenir avec l’Union européenne ne pourra être écrit qu’à l’issue d’un long processus», rappelant que si l’intégration était retenue, «les Français auront le dernier mot par référendum».

Volonté de recadrage

Au cours de ces derniers mois, Jacques Chirac avait semblé bien seul sur ce dossier. Rares, en effet, ont été les hommes politiques français à afficher clairement, comme il l’a fait lui-même, leur volonté d’intégrer la Turquie. Sans réserves, Jacques Chirac, lui, s’était à maintes reprises prononcé en faveur de l’adhésion d’Ankara à l’Union européenne, moyennant le respect des modalités et procédures. Contre l’avis de l’essentiel de ses amis de la droite française, contre une opinion publique rétive, face au silence obstiné d’une opposition divisée et calculatrice, le président, insensible aux critiques et aux sondages, ignorant toute démagogie politicienne, tenait le cap d’une vision européenne généreuse, capable de surmonter tous les chauvinismes et d’accueillir les Turcs.

Le président ne renonce à rien, mais ses dernières déclarations sonnent comme une volonté de recadrage, dans un contexte d’opposition quasi générale au projet, fut-il lointain. Peu à peu, au cours des derniers mois, le discours du chef de l’Etat avait évolué pour s’adapter aux contraintes politiques, particulièrement lorsqu’il avait fallu tenter de convaincre les Français de voter oui à un projet de constitution européenne qu’ils désapprouvaient, notamment en raison d’un élargissement dont la décision et le calendrier leur échappaient. Le discours est alors devenu plus rassurant et compréhensif à l’égard des adversaires : les délais d’adhésion ont été rallongés, pour bien montrer le caractère lointain de la perspective, et surtout il est désormais acquis que l’entrée de la Turquie au sein de la communauté sera soumise à l’approbation du peuple français par voie de référendum.


par Georges  Abou

Article publié le 30/08/2005 Dernière mise à jour le 30/08/2005 à 17:15 TU