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Turquie-Union européenne

Accord sur l’ouverture des négociations

L'Union européenne a conclu «à l'arraché» un accord de principe sur l'ouverture de négociations d'adhésion avec la Turquie le 3 octobre 2005. 

		(Photo : AFP)
L'Union européenne a conclu «à l'arraché» un accord de principe sur l'ouverture de négociations d'adhésion avec la Turquie le 3 octobre 2005.
(Photo : AFP)
Un accord de principe « à l’arraché » a finalement été trouvé en clôture du Conseil européen de Bruxelles. Les discussions, extrêmement serrées, auront duré jusqu’au dernier moment, témoignant que les sommets ne sont pas de simples chambres d’enregistrement de décisions longuement préparées en amont. Les discussions ont achoppé sur l’épineuse question de la reconnaissance de Chypre par la Turquie, posée comme condition à l’ouverture des négociation d’adhésion. Ce point a été la question centrale de cette dernière ligne droite bruxelloise. Le document final prévoit un engagement Turc « à signer le protocole sur l’adaptation de l’accord d’Ankara préalablement au début des négociations » d’adhésion que l’Union européenne propose d’ouvrir le 3 octobre 2005. La signature de cet accord d’association, conclu à Ankara en 1963, marque une entrée de la Turquie dans un processus de reconnaissance de Chypre.

La décision est le fruit d’une éprouvante négociation marathon dont le résultat a été salué par les applaudissements du Conseil. Elle s’achève sur un accord de principe qui reste à valider par les faits. Officiellement la Turquie est invitée à ouvrir des négociations d’adhésion avec l’Union européenne (UE) à la date du 3 octobre 2005. Mais l’accord stipule que l’ouverture de ces discussions est soumise à la condition que « le gouvernement turc confirme qu’il est prêt à signer le protocole sur l’adaptation de l’accord d’Ankara préalablement au début des négociations ».

La ratification par Ankara de cet accord d’association comparable à une union douanière, dont l’adoption s’étendra aux 10 nouveaux pays-membres de l’Union, marquera une première forme de reconnaissance de la République de Chypre par la Turquie, ce à quoi cette dernière s’était jusqu’à présent refusée. Néanmoins, c’est un demi-succès pour l’UE qui a échoué à « tordre le bras » au candidat turc, et à passer en force les revendications de l’Etat membre chypriote, à l’occasion de ce qui aurait dû être la dernière ligne droite avant négociations.

Chypre perturbe la mécanique

(Carte: SB/RFI)
Le dossier chypriote, en attente d’un projet de résolution depuis 1974, évacué des grands titres de l’actualité, vient donc de se rappeler brutalement au souvenir de la communauté internationale en menaçant de bloquer un processus à la fois historique pour l’UE et pour ce candidat turc si atypique. L’irruption de la question à ce niveau des relations internationales, capable jusqu’au bout de perturber la mécanique bien réglée des sommets, témoigne de l’extrême sensibilité des nations européennes à son égard et de la persistance de conflits historiques parmi les voisins.

Au cours de ces dernières heures, l’affaire a nécessité nombre de rendez-vous bilatéraux ou de rencontres en petits comités pour tenter d’infléchir les positions et de rapprocher les points de vue. La reprise des travaux du sommet, vendredi, a été retardée. De même que sa clôture a été différée en raison des détails à discuter. Certains pays, réputés pour leur influence et leur poids communautaire, ont été davantage sollicités. Les Pays-Bas évidemment, qui président l’UE, mais également la France, l’Allemagne, la Grande-Bretagne et la Grèce convoqués à l’aube pour des consultations privées avec le partenaire turc.

Affaire de souveraineté

Côté européen, l’épisode montre qu’avec l’affaire chypriote, l’Union abordait également un point particulièrement sensible et qu’elle ne pouvait s’exposer, sur un dossier de cette nature (traitant de cohésion et de souveraineté), à introduire le moindre risque de procès en légitimité de l’un de ses Etats membres. L’affaire n’est pas bouclée et ne le sera officiellement qu’une fois signée l’accord d’association en question, c’est à dire à l’échéance du 3 octobre, au plus tard. D’ici là, les autorités turques disposeront d’un délai d’une dizaine de mois pour convaincre leur opinion publique, leurs opposants, voire leurs militaires, de la nécessité de reconnaître Nicosie, dernier obstacle avant l’ouverture du chantier. Pour Ankara, il s’agit là aussi d’une affaire de souveraineté nationale.

Après la campagne d’opposition qu’elle a du affronter, l’épreuve a été rude pour la Turquie. Soumis jusqu’au bout à la pression, les diplomates turcs faisaient part de leur « déception » lors de la négociation, face à ce qu’ils considèrent comme une surenchère européenne. « Vous choisissez 600 000 Grecs (Chypriotes) contre 70 millions de Turcs et je ne peux pas expliquer cela à mon peuple », aurait notamment déclaré le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, selon des propos rapportés par un membre de la délégation d’Ankara présent à Bruxelles.

Marché du travail fermé

Pas de grosses surprises en revanche sur les autres conditions auxquelles la Turquie doit se soumettre. Elles sont drastiques, mais Ankara s’y attendait. Tout d’abord le document final lève toute ambiguïté sur la finalité de l’exercice : « l’objectif commun des négociations est l’adhésion ». Mais l’Union s’entoure de multiples précautions sous forme de clauses de sauvegarde. L’absence de garantie concernant une issue favorable du processus y est réaffirmée, mais cette hypothèse implique des devoirs à l’égard du candidat éconduit. « Si un Etat candidat n’est pas en mesure d’assumer toutes les obligations de l’appartenance à l’Union, il doit être fait en sorte que l’Etat candidat soit pleinement ancré dans les structures européennes avec le lien le plus fort possible », indique le texte.

Le processus de négociation prévoit la possibilité d’adopter de « longues périodes de transition, des dérogations, des arrangements spécifiques ou des clauses de sauvegarde permanentes ». L’unanimité sera la règle pour l’ouverture et la clôture de chacun des chapitres, qui dépendront de la mise en œuvre des réformes sur le terrain. Les pourparlers seront interrompus en cas de violation des droits de l’homme. L’adhésion ne sera pas conclue avant 2014, lorsque l’Union aura révisé son budget et, peut être, ses politiques communes. Enfin la question de la liberté de circulation des travailleurs turcs est soumise à de très fortes restrictions puisque les Etats membres conservent la possibilité de fermer leurs marchés du travail aux Turcs.



Article publié le 17/12/2004 Dernière mise à jour le 17/12/2004 à 15:57 TU

Audio

Mehmet Dülger

Président de la commission des affaires étrangères du parlement turc.

«L'importance de la question chypriote, à notre avis, ne devrait pas être si grande.»

[17/12/2004]

Ragip Duran

Professeur à l'université de Galatasaraï

«La demande d'adhésion à l'Union européenne est encore plus forte de la part des habitants venant des régions rurales de l'est et du sud-est de la Turquie.»

[17/12/2004]

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