Revue de presse des hebdomadaires du 18/6/2006

Alain Masson
(Photo RFI)

«Autonomie ou divorce» : telle est l'alternative posée par La Vie concernant la Catalogne qui se prononce ce dimanche sur son statut. Notre confrère note que «la question de l'identité régionale, du Pays basque à la Corse en passant par la Flandre, travaille les opinions publiques» sur tout le Vieux continent. Précisant le nombre d'électeurs conviés à ce référendum, (5,3 millions), la correspondante à Barcelone du Journal du Dimanche assure «qu'un oui massif au nouveau statut d'autonomie catalan cautionnerait (le) modèle d'une Espagne plurielle souhaité par le Premier ministre espagnol Zapatero». Tandis que les opposants redoutent «le démembrement, voire la balkanisation de l'Espagne». Concernant cette même nation, Politis publie le témoignage d'un militant basque qui a passé, il y a vingt ans, deux ans en prison. Dans ce livre, La nuque raide, Gabriel Mouesca «raconte son engagement et sa lutte contre le système carcéral». Pour lui, «la prison a fait la preuve de sa contreproductivité, voire de sa dangerosité sociale».

De l'autre côté des Pyrénées, «à l'heure de la mondialisation et de l'uniformisation, s'ouvre à Pau le Forum international des peuples autochtones». Occasion -pour le Figaro-Magazine- de «donner à découvrir une diversité et une vitalité extraordinaire». Des Papous aux chasseurs de caribous du nord canadien... des Tibétains aux Otomi du Mexique, avec les Touaregs du nord de l'Afrique, les chasseurs de baleines du détroit de Bering, en passant par les douze tribus des Rapa Nui. Deux mille citoyens «enfants de la mer polynésienne, qui va de la Nouvelle-Zélande à l'île de Pâques» et qui «demandent l'application d'un traité signé en 1888 avec le gouvernement chilien». Ces peuples autochtones «seraient 370 millions répartis dans soixante-dix pays et l'organisation des Nations-Unies a fait de leur protection l'une de ses préoccupations majeures pour le millénaire. Cherchant à garantir leurs droits sur leurs territoires et à éviter qu'ils ne soient traités comme des citoyens de seconde catégorie». «Peuplades du monde, unissez-vous !» s'exclame en écho Télérama, en soulevant quatre questions fondamentales à propos de ces «peuples indigènes : d'où tirent-ils leur sagesse ? D'où provient leur harmonie ? Pourquoi ne sont-ils pas entendus par le reste du monde ? (et enfin) que fait-on pour éviter leur disparition ?» Le porte-parole officiel des Papous déclare ici : «Rien qu'en Papouasie occidentale (annexée par l'Indonésie en 1969), nous comptons 250 groupes (ethniques) différents, avec chacun leur langue propre !»

«L'homme est miroir pour l'homme» : avec cette formule signée Merleau Ponty, Le Pèlerin offre à ses lecteurs une douzaine de «visages du monde». D'Afrique du Sud au Guatemala, en passant par la Thaïlande et le Pérou. Autre écrivain convoqué ici : Saint-Exupéry, affirmant : «Si je diffère de toi, loin de te léser, je t'augmente». «Catastrophe !», titre l'Humanité-Dimanche, «on ne sait plus d'où on vient. Sous la truelle des paléoanthropologues, les découvertes font en permanence évoluer l'histoire de l'Homme. Il est temps, désormais, de réviser nos manuels de Préhistoire». «Tout savoir sur nos origines» : c'est le titre-couverture-programme de l'Express cette semaine. Sont abordées ici de «nouvelles questions sur les notions de races et d'identité». Demeure toutefois cette certitude généalogique : «Au début étaient les Noirs».

Archipel du non-droit

«Salauds de suicidés !», lance Marianne après les trois décès de Guantanamo. Le chef de la rubrique étranger écrit : «Est-ce manifester une complaisance suspecte pour les djihadistes que de répéter qu'en violant ses propres principes, l'Amérique sert la soupe aux sergents recruteurs d'al-Qaïda ?» Le Nouvel Observateur se demande à son tour si «les suicides de trois détenus» peuvent provoquer la fermeture de cet «archipel du non-droit». «Conçue comme une arme dans la guerre mondiale contre le terrorisme, la prison-forteresse de l'île de Cuba s'est révélée inefficace dans la collecte du renseignement, détestable pour l'image de la justice américaine et funeste pour les valeurs que les Etats-Unis prétendent incarner. Certes, reconnaît Bernard-Henri Lévy en dernière page du Point, Guantanamo n'est pas Auschwitz», mais à la vérité, «il faut fermer d'urgence» ce centre. Et «sanctionner le sombre crétin, commandant» la prison, qui «n'a rien trouvé de mieux que de fustiger ces salauds de morts qui n'ont aucun respect pour la vie humaine». L'ambassade de Cuba à Paris intervient dans le courrier des lecteurs du Monde 2... afin de rappeler que «Guantanamo n'est pas loué. L'endroit est une partie du territoire national occupé illégalement en 1898 par les Etats-Unis. Depuis 1903, Washington a obtenu une concession perpétuelle sur la baie, octroyée par le président cubain de l'époque. Il fut établi que les Etats-Unis auraient le contrôle et la juridiction de Guantanamo, tout en reconnaissant que la République de Cuba y conservait sa souveraineté». Aujourd'hui, précise ce courrier, «le gouvernement cubain attend patiemment que la justice finisse par s'imposer».

Dans Challenges, le chroniqueur Colombani regrette «l'enfermement de Bush lui-même dans une prison mentale». Citant le New York Times, Courrier International observe que «de tels suicides étaient hautement prévisibles. Résultat inévitable de la création d'une prison où des centaines d'hommes sont détenus depuis des années sans aucun espoir d'être traités humainement, d'être jugés équitablement et d'être libérés un jour». Par ailleurs, note le Times, «dans le contexte actuel de djihad mondial, où les kamikazes sont considérés comme des héros, ces suicides peuvent facilement être instrumentalisés; et être présentés comme des actes de résistance». Conclusion du Courrier : «Le centre de détention de Guantanamo a beau être éloigné de l'Irak et de l'Afghanistan, il pourrait bien se transformer en un nouveau front dans la guerre contre le terrorisme». A lire enfin en Une du petit hebdomadaire Le Tigre, cette information émanant des geôliers guantanaméens : «Parce qu'ils ont grossi en moyenne de huit kilos et demi, les prisonniers sont considérés en bien meilleure santé en détention que lorsqu'ils étaient sur les champs de bataille !»

par Alain  Masson

[18/06/2006]