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Etats-Unis

Les cellules souches divisent les républicains

George Bush estime que le financement de la recherche sur les cellules souches par le gouvernement est inapproprié. 

		(Photo : IFA)
George Bush estime que le financement de la recherche sur les cellules souches par le gouvernement est inapproprié.
(Photo : IFA)
Le congrès défie George Bush sur la recherche sur les cellules souches. Le président américain menace de bloquer par son premier veto présidentiel un projet de loi sur la recherche sur les cellules souches issues de l’embryon.

De notre correspondante aux Etats-Unis

Aucun président américain depuis Thomas Jefferson n’a passé autant de temps à la Maison Blanche sans avoir recours au veto présidentiel face au Congrès. Après près de six ans à la présidence, ayant apposé sa signature sur 1 116 textes de loi adoptés par le Congrès, George Bush menace aujourd’hui d’utiliser son premier veto : adopté mardi par le Sénat, le texte qu’il veut bloquer vise à étendre le financement de la recherche sur les cellules souches embryonnaires, un sujet très sensible pour la droite chrétienne.

Le 9 août 2001, le président américain avait fait connaître sa politique en la matière : il envisageait de restreindre les financements fédéraux (38 millions de dollars l’an dernier) de la recherche sur les cellules souches tirées de lignes existantes avant ce jour de manière à s’assurer qu’aucun nouvel embryon ne serait détruit. Or le texte, approuvé par le sénat à 63 voix contre 37, accorde des financements fédéraux aux lignes de cellules souches issues d’embryons surnuméraires de traitements de fertilité.

Affrontement émotionnel

Pour George Bush, il n’en est pas question. Il estime « inapproprié de la part du gouvernement de financer ce que certains considèrent comme un meurtre », a expliqué le porte-parole de la Maison Blanche Tony Snow. Le président américain n’a pas été le seul à placer le débat sur le terrain des émotions. Sam Brownback, sénateur républicain du Kansas, également opposé à la loi, a pris la parole accompagné de parents d’enfants nés d’embryons surnuméraires adoptés. « Ma fille est restée dans un congélateur pendant quatre ans », a dit une de ces mères.

Face à eux, les partisans du projet de loi ont joué eux aussi sur la corde sensible pour souligner les espoirs placés dans la recherche contre certaines maladies comme le diabète, le cancer ou la maladie d'Alzheimer : la sénatrice démocrate Dianne Feinstein a fait référence au membre de sa famille atteint de la maladie de parkinson. Le démocrate  Byron Dorgan a évoqué sa fille morte d’une maladie cardiaque. Gordon Smith, un sénateur républicain d’Oregon a surenchéri en rappelant les souffrances de plusieurs membres de sa famille. Un sénateur républicain a tenté d’interrompre ce déluge dramatique en rappelant qu’il avait survécu à deux cancers et que ça ne l’empêchait pas de s’opposer au projet.

Ce veto marquerait la première fracture entre George Bush et un Congrès qui est pourtant majoritairement de son bord politique. Premier veto en deux mandats, il aurait une très forte charge symbolique : Bill Clinton et Ronald Reagan s’en étaient respectivement servi 38 et 78 fois pendant leurs deux mandats. Quant à Bush père, il y avait eu recours 44 fois en quatre ans. Mais contrairement à George Bush fils, eux n’ont pas toujours gouverné avec un Congrès qui leur était acquis. Jusque-là, les chefs de file républicains concoctaient des textes plus ou moins conformes aux idées du président.

Enjeux politiques

 Mais à moins de quatre mois des élections parlementaires de novembre, de nombreux élus représentants se sont rangés du côté de l’opinion américaine, favorable aux deux tiers à la recherche sur les cellules souches. Même Bill Frist, un pilier républicain qui s’était battu, en vain, avec la droite chrétienne pour maintenir artificiellement en vie Terri Schiavo, plongée dans un coma végétatif depuis 15 ans, a changé de camp sur le sujet l’an dernier et voté en faveur de la loi.

Le pari est politiquement audacieux pour le parti républicain : le veto de Bush peut lui donner l’occasion de se repositionner comme un homme de conviction en défendant une position impopulaire ; il peut galvaniser la base moralement conservatrice du parti, avec des arguments similaires à ceux de sa campagne pour sa réélection de 2004. Mais il risque aussi de s’aliéner les électeurs modérés. Célèbre républicain centriste, le sénateur Arlen Specter a par exemple critiqué l’attitude de Bush, le mettant dans le même sac que ceux qui avaient condamné Galilée, rejeté l’anesthésie, l’électricité et les vaccins : des attitudes, a-t-il dit, qui « rétrospectivement paraissent complètement ridicules. »



par Guillemette  Faure

Article publié le 19/07/2006Dernière mise à jour le 19/07/2006 à TU