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Terrorisme

Enquête à Londres et Islamabad

Des policiers, devant le domicile de personnes arrêtées, au 386, Forest Road, à Walhamstow (nord de Londres). Les perquisitions se poursuivent. 

		(Photo: AFP)
Des policiers, devant le domicile de personnes arrêtées, au 386, Forest Road, à Walhamstow (nord de Londres). Les perquisitions se poursuivent.
(Photo: AFP)
Après la découverte de préparatifs d’attentats en série sur des vols transatlantiques, la Grande-Bretagne reste en alerte. Tandis que le trafic aérien est en train de revenir à la normale malgré des mesures de sécurité renforcées, l’enquête continue en Grande Bretagne, aux Etats-Unis et au Pakistan. C’est de ce dernier pays que l’alerte est venue, la semaine dernière.

Au lendemain de l’arrestation, en Grande Bretagne, de 24 personnes soupçonnées de préparer des attentats visant des compagnies aériennes américaines, les autorités pakistanaises ont indiqué que 7 personnes, dont deux Britanniques d’origine pakistanaise, ont été arrêtés la semaine dernière dans leur pays. «Les deux hommes sont des ressortissants britanniques d’origine pakistanaise, qui étaient des éléments clés du réseau basé à Londres», a expliqué un responsable ayant requis l’anonymat. Il a précisé que les cinq autres personnes arrêtées sont des Pakistanais, militants islamistes. Toutes ces interpellations entrent dans le cadre de l’enquête britannique sur cette tentative d’attentats avortée. Autre précision en provenance d’Islamabad : «Les arrestations ont eu lieu avant les opérations déclenchées à Londres. Les deux hommes [britanniques] étaient parfaitement au courant du complot visant à faire exploser des avions et les informations ont été transmises aux services de renseignements britanniques et américains», a encore expliqué ce même responsable. Les services de renseignement d’Islamabad indiquent également qu’au moins trois des Pakistanais arrêtés auraient des liens avec al-Qaïda.  

Le rôle décisif du Pakistan

Tasnim Aslam, porte-parole du ministère pakistanais des Affaires étrangères a pour sa part mis en avant le fait que «le Pakistan a joué un rôle crucial dans la mise au jour de ce réseau terroriste international, grâce à ces arrestations opérées en relation avec celles réalisées au Royaume-Uni».

La publication des noms de 19 personnes, sur les 24 arrêtées au Royaume-Uni, va permettre aux services d’immigration de faire des recherches croisées pour savoir si certains suspects ont fait des allers et retours au Pakistan ces derniers temps. A la suite des attentats de Londres de juillet 2005, ce type de recherche avait permis de découvrir que deux des quatre kamikazes avaient séjourné au Pakistan dans les mois précédents les attentats.

Comme la Banque d’Angleterre en a désormais la possibilité en cas d’enquête terroriste, elle a gelé les comptes bancaires de la majorité des suspects. La justice a également rendu public leurs noms. Les transactions financières effectuées par ces personnes entre les deux pays vont être épluchées. Une organisation humanitaire islamiste serait déjà repérée. Elle serait impliquée dans des transferts d’argent. Les services de renseignements n’ont pas donné son nom.

Les enquêteurs pakistanais sont à la recherche d’un militant islamiste, Matiur Rehman, qui est actuellement «l’homme le plus recherché du Pakistan». Il est considéré comme le chef d’al-Qaïda au Pakistan. La télévision américaine ABC parle de lui comme du chef présumé de l’attaque projetée à Londres.

La police britannique a pris la décision d’intervenir plus tôt qu’elle n’en avait l’intention pour démanteler ce réseau. Car après les interpellations au Pakistan, un message serait parvenu aux comploteurs, en Grande Bretagne, les encourageant à agir «maintenant», indique le Guardian. Le quotidien britannique explique que le message a été intercepté par des services de renseignement, britannique ou américain. Ce feu vert aurait poussé la police britannique à agir afin d’éviter un «massacre d’une ampleur inimaginable», selon les mots du chef de l’unité antiterroriste, Peter Clarke. Une autre source britannique a évoqué la possibilité d’attentats «dans les deux jours». Le plan d’attaque était dans sa phase finale, a pour sa part indiqué le secrétaire américain à la Sécurité intérieure Michael Chertoff.

Les plans prévoyaient de faire exploser, en une ou deux vagues, de six à dix-sept avions de ligne reliant la Grande-Bretagne aux Etats-Unis. Selon la chaîne de télévision américaine ABC, les terroristes avaient prévu de faire exploser trois avions toutes les heures durant trois heures. Les compagnies choisies étaient toutes américaines. Des billets d’avion ont été découverts au cours de l’une des perquisitions. Que ce soit à Londres ou à Washington, les autorités ont parlé de milliers de victimes potentielles. Le quotidien le Times rappelle que le Boeing 777, l’appareil le plus fréquemment utilisé pour les vols transatlantiques, transporte 385 passagers et 12 membres d’équipage.

Une enquête d’une ampleur inégalée

Les enquêteurs britanniques suivaient depuis un an une cinquantaine de suspects, aussi bien lorsqu’ils utilisaient internet que lorsqu’ils se réunissaient. Les mouvements sur leurs comptes bancaires étaient également surveillés. C’est ce qu’indique le Financial Times. Le quotidien britannique explique qu’il s’agit de la plus importante opération de surveillance anti-terroriste jamais menée en Grande-Bretagne.

Les experts estiment que seul le réseau al-Qaïda a les moyens de mener un projet aussi spectaculaire. L’ampleur du complot continue tout de même à surprendre les enquêteurs britanniques. La police a la possibilité légale de maintenir les suspects en garde à vue pendant 28 jours avant une éventuelle inculpation. L’enquête ne fait donc que commencer même si la police estime avoir arrêté les acteurs principaux du projet. John Reid, le ministre britannique de l’Intérieur a remercié le Pakistan pour sa coopération.

Le président Bush avait été informé «ces jours derniers» des préparatifs de ces attentats. Il en a parlé comme «le parfait rappel que cette nation [les Etats-Unis] et en guerre contre les fascistes islamiques». La presse britannique, dans ses éditoriaux de vendredi, demandait au gouvernement de ne pas profiter de cette incroyable tentative pour resteindre les libertés civiles.

    



par Colette  Thomas

Article publié le 11/08/2006Dernière mise à jour le 11/08/2006 à TU

Audio

Alain Marsaud

Député UMP, ancien directeur du service central de lutte antiterroriste

«L’ensemble des services de renseignement des pays concernés [par le terrorisme], ou susceptibles de l’être, sont en train de réviser leur stratégie de riposte.»

[11/08/2006]

Attentats déjoués à Londres (analyses)

Olivier Roy et Jean Guisnel

«Il faut sortir de cette idée que le terrorisme islamique est une importation de conflits du Moyen-Orient.»

[11/08/2006]

Friso Roscam Abbing

Porte-parole du vice-président de la Commission européenne chargé de la justice.

«La prévention constitue l'un des aspects les plus importants de la lutte contre le terrorisme.»

[11/08/2006]

George Bush

Président des Etats-Unis

«Notre nation est en guerre avec des fascistes islamiques, qui font tout ce qui est en leur pouvoir pour détruire ceux d’entre nous qui croient en la liberté.»

[11/08/2006]

Mariam Abou Zahab

Spécialiste du Pakistan, chercheuse au CERI

«Ces jeunes [anglo-pakistanais] sont radicalisés en Grande-Bretagne parce qu’ils sont dans une situation de marginalisation sociale très importante.»

[11/08/2006]

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