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Géorgie / Législatives

Election test

Article publié le 20/05/2008 Dernière mise à jour le 20/05/2008 à 23:56 TU

La petite République caucasienne élit ce mercredi son parlement. Un test démocratique pour un pays qui rêve d'entrer à l'OTAN afin de se protéger de son grand voisin russe. Une OTAN qui lui demande de faire un pas de plus vers la démocratie après les évènements de novembre 2007 où le pouvoir géorgien a réprimé violemment des manifestations de l'opposition et fermé la dernière chaîne de télévision qui échappait encore à son contrôle.
Un passant devant un abribus tapissé d'affiches des candidats aux législatives, le 20 mai 2008 à Tbilissi, capitale géorgienne. (Photo : Reuters)

Un passant devant un abribus tapissé d'affiches des candidats aux législatives, le 20 mai 2008 à Tbilissi, capitale géorgienne.
(Photo : Reuters)

De l'un de nos envoyés spéciaux en Géorgie, Régis Genté

L'OTAN, la population n'y songera peut-être pas ce mercredi, en votant, mais les dirigeants politiques géorgiens eux y penseront très fort. Adhérer au Traité de l'Atlantique Nord est leur vœu le plus cher. Pour eux, cela rime avec indépendance et sécurité nationale. Or, la Géorgie est toute proche de l'OTAN. Son entrée pourrait se décider en décembre prochain. Lors du sommet de Bucarest, en avril dernier, Condoleezza Rice, la secrétaire d'Etat américain, ne l'a pas exclu, rappelant toutefois l'échéance électorale du 21 mai. « Il y aura peut-être quelques indices à regarder de près », avait-elle alors averti.

« Si ces élections sont libres et équitables, nous pensons que la Géorgie » aura « le soutien de toute la communauté euro-atlantique », vient de renchérir Matthew Bryza, le vice-secrétaire d'Etat adjoint américain, dont chaque propos est très écouté dans un pays qui attend son salut des Etats-Unis et de l'Europe. Surtout à l'heure où Moscou et Tbilissi seraient aux bords de la guerre, à propos de la région séparatiste de l'Abkhazie, sur les bords de la mer Noire. La Géorgie sera donc sous la loupe de la Communauté internationale pour ces parlementaires, ou près d'un millier d'observateurs internationaux seront déployés.

Cinq mois après une présidentielle dont la réélection au premier tour de Mikheïl Saakachvili, avec un peu plus de 52% des suffrages, a laissé un arrière goût de victoire frelatée, le pouvoir géorgien promet une élection propre. Elles « seront les plus démocratiques que le pays ait jamais connues », a promis le jeune président. Une nécessité d'autant que son image à l'intérieur comme à l'extérieur a été écornée en novembre dernier après qu'il ait maté violemment des manifestations de l'opposition et décrété un état d'urgence lui permettant de fermer la seule télévision qui échappait encore à son contrôle.

Le président de la République, arrivé au pouvoir suite à la « révolution des roses » de novembre 2003, qui se voulait démocratique avant tout, et le ministre de l'Intérieur ont mis en garde les administrations du pays qui voudraient forcer la main des électeurs. Le rapport intermédiaire de la mission d'observation de l'élection de l'OSCE (Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe) a fait état ces derniers jours d'intimidations et d'usages avérés des « ressources administratives » dans la campagne.

« Nous avons aussi observé cela. Je ne crois pas que ce soit des cas isolés, mais cela semble souvent assez organisé. Les professeurs sont utilisés dans beaucoup d'endroits comme des outils électoraux », explique Sozar Soubari, le Défenseur des droits publics (ombudsman) de Géorgie.

Sans nier quelques imperfections, David Bakradze, le chef de file du Mouvement national uni, le parti présidentiel, met l'accent sur les progrès réalisés par ce jeune pays depuis l'arrivée au pouvoir de M. Saakachvili. « Pour la première fois, lors de la présidentielle de janvier dernier, la Géorgie a connu une élection réellement compétitive et ouverte. En outre, ajoute l'ancien ministre des Affaires étrangères, nous avons considérablement amélioré le cadre juridique. Nous avons abaissé le seuil pour entrer au Parlement, de 7 a 5 %, ce qui pourrait permettre à deux partis supplémentaires d'entrer au Parlement, nous avons diminué le nombre de signatures permettant à un parti de se présenter aux suffrages des électeurs, ou encore changé la composition du conseil d'administration de la première chaîne de télévision [publique]. Pouvoir et opposition sont à présent représentés à égalité dans celui-ci ».

Douze partis ou coalitions briguent les 150 sièges du Parlement, ce mercredi. Chacun s'accorde à penser que le parti au pouvoir devrait remporter la majorité, dans un vote mêlant scrutin de liste et élections de députés à la majorité.

Malgré les quelques gestes du pouvoir, l'opposition n'a guère confiance en sa bonne volonte. « Je reconnais qu'il y a quelques points positifs, explique Levan Berdzenishvili, du Parti républicain. (…) Pour une fois, nos soit disant démocrates de dirigeants n'utilisent pas les médias pour salir l'opposition. Cette fois, on ne m'a pas accusé d'être un agent russe ou je ne sais quoi. » Mais l'ex-dissident soviétique se dit loin d'être satisfait, dénonçant les multiples voies par lesquelles le pouvoir s'assure de façon non démocratique de rester en place. La Géorgie est encore loin d'être le « phare de la démocratie » de l'ancien espace soviétique que George W. Bush était venu célébrer à Tbilissi en mai 2005.