par Myriam Berber
Article publié le 18/09/2008 Dernière mise à jour le 19/09/2008 à 03:13 TU
« Un discours bref qui énumère une par une les décisions prises par les pouvoirs publics pour tenter de limiter les dégâts. »
La Banque centrale européenne (BCE), la Banque d’Angleterre, la Réserve Fédérale (Fed) et la Banque du Japon ont, à elles quatre, mis en deux jours 144 milliards de dollars de liquidités à la disposition des banques. Ce jeudi, la Fed a fait un geste supplémentaire en apportant 180 milliards de dollars de liquidités aux marchés financiers internationaux, dans le cadre d'une action concertée des banques centrales mondiales. A cela s’ajoute le prêt de 85 milliards de dollars accordé au groupe d’assurances AIG, en échange de près de 80% de son capital. Si ces multiples interventions de la Réserve fédérale depuis le début de la crise sont bien comprises aux Etats-Unis, en revanche, la nationalisation d’AIG a suscité des critiques dans le pays de la libre entreprise.
« Les banques n'osent plus distribuer de crédit et surtout elles craignent de se prêter de l'argent de banque privée à banque privée, de peur que l'établissement emprunteur fasse défaut brutalement. »
Contrairement aux géants du refinancement hypothécaire, Fannie Mae et Freddie Mac, des compagnies quasi-publiques placées sous tutelle il y a dix jours, AIG est un groupe privé. Les médias s’interrogent sur le bien fondé de ce type de sauvetage public dans un pays aussi libéral que les Etats-Unis, en particulier sous administration républicaine. Dans la presse, certains experts ironisent sur « l’avènement de l'USSA, l’Union socialiste soviétique d'Amérique ». Plusieurs politiques ont mis en cause la décision de prendre l’argent du contribuable américain pour venir à la rescousse du secteur privé. « Un prêt de 85 milliards de dollars représente une somme faramineuse, et trop énorme pour que les Américains en supportent le risque », a dénoncé la présidente de la Chambre des Représentants, Nancy Pelosi, en plaidant pour de nouvelles régulations.
« Un Etat-privatisé au service des marchés »
La crainte que le sauvetage de l’assureur ne soit pas le dernier commence d’ailleurs à se profiler. Ce jeudi, George Bush a annulé deux déplacements à l'intérieur du pays. Le président américain veut rester à Washington, pour consulter ses principaux conseillers sur la santé de l'économie américaine pour ensuite faire une déclaration sur cette crise financière qui n'en finit pas. Barack Obama comme John McCain ont défendu l’intervention publique face à la débâcle financière. Les deux candidats à la présidentielle ont appelé à « une réglementation plus stricte des marchés financiers ». Une prise de position logique pour le candidat démocrate, mais pas pour le républicain qui a longtemps défendu des thèses libérales.
Cet interventionnisme du gouvernement fédéral marque-t-il le retour de l’Etat ? La réponse est non si l’on en croit l’économiste Jacques Généreux, professeur à l’Institut d’études politiques interviewé dans les colonnes du journal Libération. « Il n’y a pas de retour de l’Etat parce qu’il n’a jamais reculé. Son poids n’a pas cessé d’augmenter aux Etats-Unis. Ce n’est plus un Etat-providence qui redistribue, c’est un Etat-privatisé au service des marchés, des profits. Il n’a cessé de donner plus de liberté à la finance, aux entreprises. Quand celle-ci débouche sur la crise, il doit intervenir en urgence ».
Réguler les marchés
Même constat pour Liem Hoang-Ngoc, chercheur au centre d’économie de la Sorbonne, pour qui « l’Etat américain n’a jamais vraiment disparu dans son rôle de gendarme économique. On a déjà vu dans le passé, le gouvernement fédéral mettre son idéologie entre parenthèses pour soutenir des banques et des entreprises en difficulté. Ce n’est pas la fin du libéralisme, cette intervention est avant tout pragmatique ».
Reste que cet interventionnisme de l'Etat met en lumière l'absence de règlements internationaux en matière de régulation. Pour le Commissaire européen aux Affaires économiques, un effort doit être fait dans ce sens. « On ne peut pas tirer tout le temps sur la corde pour gagner de l'argent, faire gonfler des bulles et penser que ce sera sans conséquence », a déclaré, jeudi à Madrid, Joaquin Almunia. Avant d’ajouter « c'est toute une conception du développement des activités financières, de l'utilisation des actifs financiers, de la régulation financière qui est en crise... c'est une crise que nous pouvons appeler structurelle ».
« Depuis la chute de Lehman Brothers, plusieurs établissements français ont publié les chiffres de leurs engagements au près de la banque d'affaires américaine. »
« Les analystes financiers s'interrogent toujours sur la brutalité du choc, plus violent que dans les autres économies émergentes. »
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