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France

Les chercheurs ont gagné

Alain Trautmann, le porte-parole du collectif «Sauvons la recherche», face aux militants, le 08 avril 2004 à Paris, à l'occasion du pique-nique organisé pour fêter l'annonce de la création de 550 postes de chercheurs. 

		(Photo: AFP)
Alain Trautmann, le porte-parole du collectif «Sauvons la recherche», face aux militants, le 08 avril 2004 à Paris, à l'occasion du pique-nique organisé pour fêter l'annonce de la création de 550 postes de chercheurs.
(Photo: AFP)
La débâcle de la droite aux élections régionales et le remaniement du gouvernement ont ouvert la voie au règlement du conflit avec les chercheurs. François Fillon, le nouveau ministre de l’Education nationale, et François d’Aubert, son ministre délégué à la Recherche, n’ont en effet pas perdu de temps : à peine installés, ils ont débloqué la situation en donnant satisfaction à toutes les revendications des scientifiques. Notamment sur la question clef du recrutement de postes statutaires. En échange, ils attendent la participation de l’ensemble de la communauté au processus de réforme de la recherche en France.

Ce que Raffarin II n’a pas pu faire, Raffarin III a eu les moyens de le réaliser. En moins d’une semaine, le nouveau gouvernement a répondu aux attentes des chercheurs auxquels la précédente équipe avait, de longs mois durant, opposé une fin de non recevoir. Le miracle du remaniement a opéré et François Fillon part sur de nouvelles bases de travail avec des interlocuteurs scientifiques comblés.

Ces derniers ont, en effet, obtenu la satisfaction de toutes leurs revendications. Les ministres ont ainsi affirmé que «550 postes statutaires seront proposés au concours dans les délais les plus courts», c’est à dire dès 2004. Deux cents de ces emplois seront attribués aux chercheurs et 350 aux ingénieurs et aux techniciens. Il s’agit là de la mesure la plus attendue par la communauté scientifique, qui avait lancé son mouvement de protestation essentiellement en raison de l’annonce de la transformation de ces postes fixes en contrats à durée déterminée. Cette décision avait été critiquée par les chercheurs qui s’inquiétaient de la précarisation de leur filière déjà pénalisée par l’insuffisance des budgets. François Fillon a, d’autre part, annoncé la création de 1000 nouveaux postes à l’université, dont 700 emplois titulaires d’enseignants-chercheurs et 300 de techniciens et d’administratifs, qui devraient être pourvus à partir de janvier 2005 dans un «plan de recrutement pluriannuel».

Cet «effort exceptionnel et immédiat» réalisé par le gouvernement est destiné à permettre de sortir de l’impasse et à rétablir la confiance avec les chercheurs pour permettre d’avancer sur la gestion du dossier de la recherche publique dans le long terme. François Fillon a été très clair sur ce point en indiquant qu’il avait obtenu «en échange» de ces concessions un engament de «l’ensemble de la communauté scientifique» à participer au processus qui doit aboutir à jeter les bases d’une «réforme profonde» du secteur d’ici la fin de l’année 2004. Le projet de loi d’orientation et de programmation, promis par Jacques Chirac, doit en effet être présenté d’ici le mois de décembre. Et le ministre attend la collaboration de tous pour trouver les moyens de donner «une nouvelle ambition» à la recherche publique hexagonale.

«Une crise a aussi des effets positifs»

Le gouvernement a donc pris le parti de créer un climat propice à une véritable réforme en cédant d’abord aux revendications urgentes. Comme l’a déclaré François Fillon: «Une crise a aussi des effets positifs, tout le monde aujourd’hui a envie que ça change, il faut en profiter… Ce qui m’intéresse, c’est l’avenir. Et l’avenir c’est que ce conflit réglé ne règle pas l’avenir de la recherche française, mais nous permet de rentrer dans une discussion qui n’a jamais été possible». Les problèmes du mode de financement des projets avec, par exemple, une plus grande participation de l’industrie dans certains secteurs, de l’évaluation des résultats pour le moment négligée en France, de l’évolution des statuts des chercheurs avec l’introduction de la notion de contrats de mission, vont être au centre des débats organisés durant les prochains mois, notamment dans le cadre du comité mis en place pour préparer les états généraux de la recherche, dirigé par les professeurs Etienne-Emile Baulieu et Edouard Brézin, respectivement président et vice-président de l’Académie des Sciences.

La balle est donc maintenant dans le camp des chercheurs qui sont dorénavant appelés à faire preuve de bonne volonté pour participer au débat public sur l’avenir de leur filière. Alain Trautmann, le porte-parole du collectif «Sauvons la recherche», grand organisateur du mouvement de protestation, qui s’est félicité des mesures de sortie de crise enfin adoptées par le gouvernement, est lui aussi conscient du fait que tous les problèmes de la recherche publique ne sont pas aujourd’hui résolus. Il a ainsi déclaré :«Nous avons obtenu tout ce que nous voulons sur les mesures d’urgence… Ce qui est sauvé, c’est cette situation d’urgence, on a arrêté une hémorragie, il faut maintenant transformer l’essai».

par Valérie  Gas

Article publié le 08/04/2004 Dernière mise à jour le 08/04/2004 à 14:38 TU