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Travail

Pas le droit d’être un enfant

Le Bureau international du travail (BIT) estime ainsi que «<I>les enfants employés à des travaux domestiques sont presque tous victimes de l’exploitation</I>». 

		(Photo: AFP)
Le Bureau international du travail (BIT) estime ainsi que «les enfants employés à des travaux domestiques sont presque tous victimes de l’exploitation».
(Photo: AFP)
A l’occasion de la journée mondiale contre le travail des enfants, l’Organisation internationale du travail a décidé de dénoncer l’exploitation dont sont victimes les quelque 10 millions d’enfants employés comme domestiques dans le monde. Sans protection, presque sans existence, ces bambins, parfois très jeunes, sont exposés à tous les abus.

Quand les employeurs de Gloria, petite Philippine de 13 ans, ont commencé à la fouetter, elle a compris que son emploi de domestique était un piège. Issue d’un milieu très pauvre, la jeune adolescente avait été placée comme bonne dans une famille plus aisée. Secrètement, elle espérait que son maigre salaire pourrait lui permettre d’aller, plus tard, à l’école secondaire. En fait, elle ne pouvait pas garder pour elle les quelques pièces durement gagnées et son labeur a, peu à peu, tourné à l’esclavage. Il a fallu que sa mère assiste aux brimades dont elle était victime pour qu’elle prenne conscience de l’enfer que vivait sa fille et qu’elle l’extirpe de cette famille de bourreaux avec l’aide d’associations locales de défense des droits des enfants.

Si Gloria a réussi à échapper à son triste sort, des millions d’autres enfants, surtout des jeunes filles, travaillent quinze heures par jour, sept jours sur sept, effectuent des tâches domestiques ingrates et fatigantes en échange d’un salaire misérable ou de pas de salaire du tout. Dans l’indifférence la plus totale. Et ce phénomène touche tous les continents. En Afrique du Sud, on dénombre plus de deux millions d’enfants domestiques, au Brésil près de 600 000, 260 000 au Pakistan, 250 000 en Haïti, 200 000 au Kenya, ou encore 100 000 au Sri Lanka.

Globalement, on estime que les enfants employés de maison sont au moins 10 millions dans le monde, sur un total de 250 millions d’enfants travailleurs. C’est pour dénoncer cette situation que l’Organisation internationale du travail (OIT) a choisi, cette année, d’attirer l’attention sur ces enfants domestiques à l’occasion de la troisième journée mondiale contre le travail des enfants qui a lieu le 12 juin.

Presque tous les enfants domestiques sont exploités

Car qui dit travail des enfants dit aussi abus. Le Bureau international du travail (BIT) estime ainsi que «les enfants employés à des travaux domestiques sont presque tous victimes de l’exploitation». Ils travaillent, en effet, dans «l’isolement et sont l’objet de violences verbales, physiques, psychologiques». Voire souvent d’abus sexuels perpétrés par leurs employeurs. Selon une étude effectuée au Salvador, 66,4 % des filles employées comme domestiques affirment qu’elles ont subi des sévices sexuels de la part de leurs employeurs. Et cette situation n’est pas exceptionnelle car pour le BIT, «la menace de harcèlement sexuel est toujours présente». Il est vrai que la majorité des enfants domestiques sont des filles. Cette activité est d’ailleurs la première occupation des jeunes filles de moins de 16 ans dans le monde.

A l’âge où les enfants doivent jouer et aller à l’école, ces bambins victimes de la pauvreté sont obligés de travailler pour survivre et aider leur famille à subsister. Ils sont donc privés de leurs droits essentiels en dépit des textes internationaux censés les protéger [Convention sur l’âge minimum du travail adoptée ne 1973, Programme international sur l’élimination du travail des enfants, en 1992]. Dans ce contexte, un représentant de l’OIT, Frans Roselaers, estime que leur «futur est brisé» dès le plus jeune âge, puisqu’ils ont souvent moins de 10 ans.

Bien sûr, des associations travaillent pour lutter contre ce phénomène et aider les enfants à se sortir de leur condition misérable. Au Sénégal, par exemple, ENDA, une ONG internationale, assure l’alphabétisation des enfants travailleurs qui le souhaitent et les aide à se reconvertir en leur offrant un appui financier pour démarrer une véritable activité professionnelle. Mais ces initiatives restent trop limitées. C’est pourquoi l’OIT appelle à une plus grande vigilance des Etats concernant le sort de ces enfants domestiques et demande l’application d’une convention, adoptée en 1999, qui préconise l’éradication des «pires formes de travail des enfants». Tout un sachant qu’il s’agit d’un vœu pieux.



par Valérie  Gas

Article publié le 11/06/2004 Dernière mise à jour le 11/06/2004 à 17:32 TU