Chronique des matières premières
Aujourd’hui tondre le dos des moutons peut rapporter gros : avec un kilo de laine à plus de 7 dollars australien, environ 5 euros, les éleveurs de l’hémisphère sud sont heureux. Cela fait bien une année qu’ils n’ont pas vu des cours aussi élevés, il y a à peine trois mois, la fibre était à son plus bas niveau depuis 6 ans. Alors que la demande de la Chine comme de l’Europe est pressante, la production australienne pourrait tomber en 2006 à son plus bas niveau depuis 50 ans. La laine profite aussi des cours élevés du pétrole peu favorables à la substitution avec le synthétique et de la bonne tenue du coton. Une situation qui rend plutôt optimiste mais pas encore euphorique, car la laine revient de loin selon Christophe Pothier, directeur du développement chez Chargeurs, un groupe leader sur le segment de la laine peignée, c’est-à-dire la fibre destinée à l’habillement.
Il était une fois les années 70, se souvient-il : l’Australie, premier producteur et exportateur mondial de laine avait un mécanisme de soutien des prix qui remplissait parfaitement son office. Jusqu’au jour où les autorités, dixit Christophe Pothier ont « pété les plombs » passant d’un prix de soutien à un objectif de prix, près de 9 dollars australiens le kilo, une initiative marketing qui rate sa cible : les éleveurs se mettent à tondre à tout va pour profiter de l’aubaine tandis que les clients américains, chinois ou européens se détournent de cette laine devenue hors de prix. Pour éviter l’effondrement du marché et la colère des fermiers, les autorités australiennes leur achètent massivement leur production, d’où les stocks gigantesques qu’elles vont devoir écouler progressivement sur le marché mondial dans un marché à nouveau connecté avec la réalité. Ces surplus vont peser sur les cours pendant toute la décennie des années 90. Mais depuis 3 ans les stocks sont épongés, les affaires ont repris sur des bases plus saines.
Pendant ce temps les éleveurs de moutons ne sont pas restés les bras croisés, ils sont aujourd’hui moins nombreux mais plus productifs en termes qualitatif et quantitatif. Grâce entre autres à la mise au point de nouvelles races de moutons développées en Australie, toujours numéro un pour la production comme pour l’exportation. « Maintenant la laine ne pique plus », résume Christophe Pothier. Par ailleurs la géographie du commerce de la fibre a bougé du côté de la demande : ce n’est plus l’Europe, et en particulier l’Italie célèbre dans le monde entier pour ses pulls multicolores, qui tient les aiguilles, mais la Chine : en 15 ans, elle a doublé sa consommation, elle achète aujourd'hui trois fois plus de laine peignée que la péninsule.
par Dominique Baillard
[09/03/2006]
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