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Editorial politique

Immigration : les doutes et les peurs

Patrice Biancone 

		(Photo RFI)
Patrice Biancone
(Photo RFI)

Il est comme ça notre ministre de l'Intérieur. Ferme dans ses décisions. Ferme et juste, apprécie-t-il lui-même, ce que les sans-papiers voudraient bien croire sans y parvenir tout à fait, malgré la circulaire du 13 juin qui donne les conditions de l'obtention d'un titre de séjour sur le territoire français. Pourtant, depuis, et au-delà de leurs doutes et de leurs peurs, c'est portés par l'espoir que les uns et les autres déposent leur demande de régularisation. Depuis quelques jours, le mouvement s'est même accéléré. Les centres de réception des étrangers sont débordés, et en particulier depuis que la rumeur a couru que Nicolas Sarkozy allait régulariser tous les parents étrangers qui auraient des enfants scolarisés, ce qu'il s'est empressé de démentir malgré le mouvement de soutien qui s'est aussitôt organisé.

Pour le ministre de l'Intérieur, et il l'a répété hier, il y a des règles : toutes les familles qui dépendent de la convention de Dublin seront expulsées, la convention de Dublin prévoyant qu'un demandeur débouté dans un pays européen ne peut déposer une autre demande dans un autre Etat. Et toutes les familles qui ont des liens avec la France seront régularisés, les critères retenus étant je le rappelle «une scolarisation effective» depuis septembre 2005. La naissance en France ou l'arrivée de l'enfant, en France, avant l'âge de 13 ans. Et enfin l'absence de liens entre l'enfant et le pays dont il a la nationalité. Cela sachant que les familles sans-papiers d'enfants scolarisés bénéficiaient déjà d'un sursis à expulsion jusqu'à la fin de l'année scolaire, sursis qui a été prolongé jusqu'au 15 août ce qui a poussé les associations de défense des sans-papiers à se remobiliser tant est grande, chez elles, la crainte de l'arbitraire. Et tant est grande leur volonté de faire régulariser le plus de familles possibles, ce que ne veut et ne peut accepter le pouvoir pour au moins une bonne et une mauvaise raison. La bonne, selon le ministre de l'Intérieur, étant la volonté et la nécessité de ne pas être laxiste comme l'ont été en leur temps les socialistes. Et la mauvaise c'est que pour séduire les électeurs les plus à droite, il convient de tenir un langage de fermeté du genre : objectif 25 000 expulsions de clandestins en 2006 contre 20 000 en 2005, ce qui devrait leur prouver qu'il n'y a pas besoin d'aller chercher Jean-Marie Le Pen pour régler la question de l'immigration non souhaitée.

Prise de parole, manifestations, défilés, ces associations ont même relancé le «parrainage» des enfants « expulsables ». Un parrainage républicain qui tient sa légitimité de ce que faisaient les révolutionnaires de 1793 quand ils se groupaient par deux pour parrainer un troisième citoyen et l'accueillir ainsi au sein de la République française. C'est apparemment un vrai succès, tant auprès des hommes politiques que des « people » qui voient là une belle occasion d'être dans l'action et d'illustrer le symbole du soutien à la lutte des sans-papiers qui a été choisi et qui n'est autre qu'un nœud plat liant ensemble deux cordes de couleurs différentes. Un nœud bien connu des marins dont la particularité est de se resserrer lorsqu'on augmente la pression qui s'exerce sur lui. Mais cela n'inquiète pas le ministre. Pas plus que ne l'impressionnent les propos de Bertrand Delanoë qui a parlé d'une «forme de crime moral» à propos de l'expulsion d'enfants sans-papiers scolarisés.

par Patrice  Biancone

[05/07/2006]

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