Chronique des matières premières
Il n’y a pas que dans le golfe de Gascogne, en France, que la pêche de l’anchois est proscrite. C’est le cas également en ce moment au large des côtes du Pérou. Cela a fait exploser les cours des farines de poisson dont ce pays est l’un des principaux producteurs grâce à ses pêches massives d’anchoveta (petit anchois). Les prix grimpaient depuis une année. Ils ont carrément doublé au cours des six derniers mois. Actuellement une tonne de farine de poisson peut coûter jusqu’à 1400 dollars la tonne. Cette hausse vertigineuse est motivée autant par le dynamisme de la demande que par les limites de l’offre. La farine de poisson, très riche en protéine, constitue le menu quotidien des élevages de saumon et de crevettes, mais aussi un apport apprécié pour les poulets et les porcs. La Chine en est le premier importateur, surtout pour satisfaire son aquaculture. Entre 2003 et 2005, ses importations ont doublé. L’année dernière, elles atteignaient 1 million 500 000 tonnes, soit presque un cinquième de l’offre totale.
Pour la première fois cette année, les importations chinoises de farine de poisson sont en régression sur les six premiers mois de l’année. Et ce n’est pas la cherté du produit qui décourage les acheteurs mais la rareté du produit. Ce marché a fini par se heurter à la loi de la mer dont les ressources ne sont pas renouvelables à l’infini. L’année dernière, la production mondiale avait déjà marqué un repli, une tendance qui perdure en 2006 en raison de la suspension de la pêche décidée au Pérou. Le premier producteur mondial fournit en effet 30% de l’offre globale. Voyant qu’une proportion de plus en plus importante de jeunes anchovetas se retrouvaient dans les filets des pêcheurs, le ministère de la Pêche a décidé cette année de suspendre les prises jusqu’au mois d’octobre. Le réchauffement des océans, les prises des bateaux usines seraient les principales causes de cette raréfaction. Cette année le volume péruvien de la pêche diminuerait d’un tiers. Tous les acteurs de la filière saluent la sagesse de cette décision, ce qui ne les empêchent pas de s’interroger sur les alternatives aux farines. Les Chinois ont déjà recours aux tourteaux de soja pour l’aquaculture, une ressource bien meilleure marché, de l’ordre de 170 dollars la tonne, et surtout disponible. Des études sont menées actuellement sur l’impact de l’introduction du soja dans l’alimentation des saumons et des crevettes. Mais en Occident, toute modification du régime alimentaire des poissons d’élevage est soumise à des réglementations très strictes. Dans l’avenir proche, il faudra encore compter avec les farines de poissons et tant que les Péruviens ne repartiront pas en mer, les prix vont continuer à grimper et la farine à manquer.
par Dominique Baillard
[20/07/2006]
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