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Chronique des matières premières

Le soja à l’index en Amazonie

Dominique Baillard 

		(Photo : RFI)
Dominique Baillard
(Photo : RFI)

Les amateurs de hamburgers peuvent déjeuner en paix, ils ne dévoreront plus la forêt amazonienne. C’est en gros le sens de la communication de Mac Donald suite à la signature lundi au Brésil d’un accord entre négociants et producteurs de soja. L’oléagineux atterrit dans notre assiette via la viande sur patte (poulet ou porc) qu’on nourrit avec du tourteau de soja. Les multinationales exportatrices se sont engagées à suspendre pendant deux ans la commercialisation des graines poussées sur des terres nouvellement défrichées au détriment de la forêt amazonienne. Greenpeace, partenaire de ce contrat, se réjouit de voir que les grands du négoce comme Bunge, Cargill ou Dreyfus ont plié sous la pression des consommateurs défendus par la grande distribution et la restauration.

C’est vrai que sur le papier l’accord est du plus bel effet. Depuis les années 70, avec le développement de l’agriculture et de l’élevage  la déforestation a grignoté 16% de la superficie de la forêt amazonienne, soit l’équivalent de la France et du Portugal réunis, cet engagement pourrait être le début du coup d’arrêt à la destruction d’une forêt considérée comme le poumon vert de la planète. Sur le terrain on est plus circonspect. Le chercheur au CIRAD Patricio Mendez, qui va régulièrement au Brésil, fait d’abord remarquer que la durée du moratoire -deux ans- tombe à pic puisqu’en général une terre nouvellement conquise n’est pas semée en soja mais en riz pendant deux ans afin de préparer le sol avant de passer à l’oléagineux. Les fermiers soucieux de préserver l’avenir pourront donc continuer à défricher sans vergogne. L’organisation écologiste en est bien consciente mais elle préfère regarder devant elle, considérant que l’accord n’est pas une fin en soi mais une plate-forme pour négocier un protocole global plus contraignant. Deuxième réserve du chercheur sur les intentions des négociants : ils sont partie prenante dans la culture intensive du soja avec leurs unités de collecte placées le long de cette frontière agricole.

Comment remettre en cause des installations qui accompagnent le grignotage de la forêt ? Comment assurer la traçabilité du soja, combien cela coûtera-t-il? Des questions auxquelles les maisons de négoce n’ont pas de réponse pour le moment, l’un de leurs représentants avouant que les discussions ne font que commencer. Ces multinationales savent qu’il n’y a pas péril en la demeure, le soja planté sur les terres prises à la forêt ne représente que 5% de la production totale du Brésil. Il y a donc largement de quoi fournir ces clients européens devenus écologiquement sensibles tout en expédiant le soja politiquement incorrect vers des pays moins regardants, vers la Chine par exemple, le premier importateur mondial de soja.


par Dominique  Baillard

[27/07/2006]

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