Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

France

Sans-papiers : 6924 régularisations, et c’est tout

Selon Nicolas Sarkozy, il n’est pas possible d’ouvrir «<i>un guichet public automatique</i>» pour que tous ceux qui veulent venir en France puissent le faire. 

		(Photo: AFP)
Selon Nicolas Sarkozy, il n’est pas possible d’ouvrir «un guichet public automatique» pour que tous ceux qui veulent venir en France puissent le faire.
(Photo: AFP)
Nicolas Sarkozy a annoncé le nombre définitif de régularisations de parents sans-papiers d’enfants scolarisés en France. Sur les quelque 30 000 dossiers de demandes déposés dans les préfectures, seuls 6 924 ont obtenu gain de cause en vertu de l’application de la circulaire diffusée le 13 juin dernier. Le fait que ce chiffre corresponde à celui annoncé par le ministre de l’Intérieur avant même que l’ensemble des demandes aient été enregistrées, provoque la colère des associations et de la gauche qui accusent Nicolas Sarkozy d’avoir appliqué purement et simplement des quotas prédéfinis.

Il avait dit 6 000, le chiffre «exact» et «final» sera de 6 924. C’est ce que Nicolas Sarkozy a annoncé le 18 septembre. L’application de la circulaire destinée à permettre l’examen de la situation des familles sans-papiers dont les enfants étaient scolarisés en France est terminée. Le ministre de l’Intérieur, qui a accordé une interview sur ce thème dans le cadre de l’émission de France 2 Complément d’enquête, a précisé que désormais «nous revenons à la procédure normale».

A en croire Nicolas Sarkozy, le nombre de régularisations n’a pas été établi avant l’examen des dossiers. S’il a pu donner ce chiffre dès le mois d’août, c’est simplement parce que les services préfectoraux avaient réalisé une «extrapolation» à partir du nombre de demandes enregistrées à cette date, à savoir 15 000. Depuis des semaines, le ministre de l’Intérieur est, en effet, accusé d’avoir décidé dès le départ du nombre de dossiers qui seraient acceptés sans tenir compte de l’examen des critères définis dans la circulaire pour évaluer le bien fondé des demandes.

Arbitraire ou pas ?

Son explication ne semble pas avoir convaincu ses détracteurs. François Hollande, le Premier secrétaire du Parti socialiste, a affirmé que la méthode employée par Nicolas Sarkozy était «détestable». Le député socialiste Jack Lang, qui est intervenu lui aussi dans l’émission Complément d’enquête, a parlé de «déni de justice». Ségolène Royal a accusé Nicolas Sarkozy de «mensonge public». Le secrétaire général de l’association œcuménique la Cimade, Laurent Giovanonni, a pour sa part estimé que l’annonce de ce chiffre représentait «une énorme déception» et que le ministère de l’Intérieur avait voulu «donner l’impression de régler le problème mais qu’il avait trompé les gens». Le Réseau éducation sans frontières (RESF) qui a soutenu de nombreuses familles concernées par le risque d’expulsion et a organisé les mouvements de protestation contre la politique de Nicolas Sarkozy, a dénoncé le fait que «non seulement les critères n’étaient pas satisfaisants» mais que «leur mise en application était d’un arbitraire total».

La circulaire définissait, en effet, plusieurs conditions à remplir pour pouvoir obtenir des papiers. Parmi eux, la scolarisation effective de l’enfant en France depuis au moins septembre 2005, la résidence habituelle depuis au moins deux ans en France, l’absence de lien avec le pays d’origine, une réelle volonté d’intégration. Si l’un des critères n’était pas rempli, la demande était rejetée. Le ministre de l’Intérieur a affirmé qu’il n’y avait eu aucun «arbitraire» durant l’examen des dossiers et que les fonctionnaires chargés de l’évaluation avaient fait un travail difficile au mieux. Notamment en évaluant le «désir de devenir Français» manifesté par les demandeurs, par exemple en fonction de leur maîtrise de la langue.

Pour Nicolas Sarkozy, il n’est pas possible de procéder à des régularisations massives sans créer un «appel d’air» qui induit «une explosion des demandes» car «les réseaux [de passeurs] exploitent ce filon». Il estime d’ailleurs que l’Espagne qui a régularisé environ 500 000 personnes est en train d’opérer un retour en arrière après avoir constaté les conséquences de cette politique.

Fidèle à sa ligne en matière de gestion de l’immigration, le ministre de l’Intérieur affirme que les accusations portées contre la politique d’expulsions des clandestins -qui devraient concerner environ 25 000 personnes en 2006- relèvent de la manipulation politique. Il a d’ailleurs dénoncé l’action des «associations d’extrême-gauche» qui ont influencé les expulsés du squat de Cachan (dont un nombre important ont des papiers), réfugiés depuis plusieurs semaines dans le gymnase de la ville, pour qu’ils n’acceptent pas les propositions de relogement qui leur ont été faites en solidarité avec les clandestins qui résidaient dans le squat.

Pas de «soutien populaire» aux sans-papiers, selon Sarkozy

Nicolas Sarkozy affirme qu’il n’est pas possible d’ouvrir «un guichet public automatique» pour que tous ceux qui veulent venir en France puissent le faire. Ni de récompenser ceux qui ont fraudé en leur donnant des papiers. C’est la raison pour laquelle il ne regrette pas d’avoir supprimer la régularisation automatique des clandestins au bout de dix ans de présence en France, une autre mesure décriée par les associations et la gauche. Nicolas Sarkozy estime d’ailleurs que malgré leurs discours, les socialistes en sont conscients, eux qui demandent aujourd’hui «du cas par cas» après avoir régularisé massivement (80 000 personnes en 1997). D’autre part, le ministre de l’Intérieur est d’autant plus sûr d’avoir raison qu’il n’y a pas eu de «soutien populaire» sur ces questions. Pour Nicolas Sarkozy, l’explication en est simple : «Les gens ont compris que ce que nous essayons de faire, c’est républicain, c’est honnête».

Reste que même si plus de 23 000 demandes de régularisation dans le cadre de la circulaire du 13 juin ont été refusées, cela ne signifie pas qu’il y aura autant d’expulsions de France. Le médiateur nommé par le ministre de l’Intérieur pour suivre ce dossier, Arno Klarsfeld, a calmé le jeu en confirmant qu’il n’était pas question de renvoyer tout le monde. Ce qui ne veut pas dire, non plus, que personne ne prendra l’avion du retour.



par Valérie  Gas

Article publié le 19/09/2006 Dernière mise à jour le 19/09/2006 à 11:31 TU