Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Editorial politique

Rainbow Warrior : fluctuat nec mergitur

Patrice Biancone 

		(Photo RFI)
Patrice Biancone
(Photo RFI)

Est-ce une manipulation ou un hasard ? Hier soir, ils étaient un certain nombre à se poser la question. Comment se fait-il que cette affaire du Rainbow Warrior, une affaire vieille de près de 20 ans, a ressurgi le jour même où les candidats socialistes à la candidature annonçaient leurs candidatures à la candidature ? «Je ne sais pas si c'est une coïncidence», a notamment commenté la socialiste préférée des sondages, alors que le rôle joué par l'un de ses frères, agent secret, était mis en avant. «Oui, c'est un hasard total», a souligné en écho, et ironiquement, Laurent Fabius qui était Premier ministre à l'époque de l'affaire du Rainbow Warrior, avant d'ajouter que «si l'on voulait arrêter les socialistes, ce n'est pas ainsi que l'on y arriverait». Le «on», visant la droite selon son entourage.

Gérard Royal, frère de Ségolène, est donc l'homme par qui le scandale arrive. Il a été officier dans les Services, comme on dit. Il a effectivement participé à l'opération Satanic, contre le Rainbow Warrior, sous le pseudonyme de Derrick avant de prendre sa retraite il y a une dizaine d'années. Son nom et sa participation étaient connus. Le capitaine Paul Barril l'avait déjà mentionné dans une interview donnée à L'Express. C'était en 1995. Le Canard Enchaîné avait même repris l'information sans pour autant provoquer un débat national, ce que nous risquons d'avoir aujourd'hui et pour cause. Curieusement, en effet, c'est Antoine, un autre frère de Ségolène, qui a abordé le sujet dans les colonnes du quotidien Le Parisien. C'est lui qui a précisé que Gérard, alias Derrick, son frère aîné, lui aurait avoué avoir posé la bombe qui a coulé le navire entraînant la mort d'un photographe qui se trouvait à l'intérieur, alors qu'auparavant il avait été dit qu'il pilotait simplement le canot pneumatique qui avait servi aux nageurs de combat.

Ségolène Royal et Laurent Fabius sont donc concernés très directement. Et sans doute Laurent Fabius un peu plus que Ségolène Royal, puisque par définition si nous ne sommes pas responsables des fautes de nos pères et de nos frères, nous le sommes des nôtres. A la lumière de cette vérité première Laurent Fabius est donc plus exposé au nom du principe de responsabilité, parce qu'il occupait Matignon : on comprend donc qu'il cherche à savoir d'où vient le coup. Un coup qui montre bien, dans tous les cas, que le renouvellement politique dont parlent tous les candidats, est avant tout une affaire de mots et qu'il faut se méfier du commerce des lèvres qui ne sert la plupart du temps qu'à embrouiller ou endormir ceux que l'on veut convaincre.

On notera d'ailleurs que les responsables de Greenpeace ne s'y trompent pas. Ils ont immédiatement expliqué qu'ils connaissaient le rôle joué par Gérard Royal dans l'affaire du Rainbow Warrior, et que ce qui les intéressait et les intéresse toujours c'est la responsabilité de l'Etat français, l'affaire ne devant pas devenir, selon eux, un sujet de politique électorale. Finalement, c'est peut-être ça le vrai renouvellement. La société civile qui tente de rééduquer les politiques en leur donnant des leçons. La preuve qu'elle a mûri, cette société civile, et qu'elle n'est plus victime de la plus commune des illusions qui consiste à croire que la sagesse peut s'imposer de sa propre autorité.


par Patrice  Biancone

[02/10/2006]

Editorial politique : les précédent(e)s








Les derniers éditos et chroniques (texte)

Chronique des matières premières


Chronique des médias


Chronique ACP


Chronique armée-défense