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France

L’UIMM ne cède rien face au Medef

par Myriam Berber

Article publié le 04/03/2008 Dernière mise à jour le 05/03/2008 à 01:09 TU

Le bras de fer entre la puissante fédération nationale de la métallurgie et le Medef, le patronat français se poursuit. La découverte de caisses noires qui a conduit à la mise en examen de son président Denis Gautier-Sauvagnac et les indemnités de départ négociées par ce dernier ont déclenché les foudres du monde politique et syndical et la colère de la présidente du Medef, Laurence Parisot.

La tension entre le Medef, le patronat français et l’Union des industries et des métiers de la métallurgie (UIMM), sa principale fédération, est loin d’être retombée. La rencontre de mardi entre la patronne du Medef, Laurence Parisot, et le président de l’UIMM, Frédéric Saint-Geours, n’a pas été « satisfaisante » selon le Medef  pour qui  « la question des mandats reste ouverte ». Chacun campe donc sur ses positions. Les décisions prises par le bureau exceptionnel de l’UIMM ne correspondent pas complètement à la mise à plat que souhaite la présidente du Medef.

Le président de l'UIMM, Frédéric Saint-Geours.(Photo : Reuters)

Le président de l'UIMM, Frédéric Saint-Geours.
(Photo : Reuters)

Après les violentes attaques de Laurence Parisot, l’UIMM a, en effet, annoncé lundi une «réorganisation» de sa direction. L’ex-président Denis Gautier-Sauvagnac et son bras droit Dominique de Calan quittent leurs fonctions de délégué général et délégué adjoint. Le bureau de l’IUMM a également annoncé qu’il allait «réexaminer» les conditions de départ de Denis Gautier-Sauvagnac. Mis en examen en janvier dans l’affaire des 19 millions d’euros retirés en liquide sur les comptes de l’UIMM entre 2000 et 2007, Denis Gautier-Sauvagnac a discrètement reçu une prime de 1,5 million d’euros pour son départ prévu en avril et la prise en charge des éventuelles pénalités fiscales qui pourraient le frapper en cas de condamnation. L’homme qui a négocié ces indemnités de départ a, lui aussi, démissionné. Michel de Virville, le secrétaire général de Renault, membre influent de l'UIMM a quitté la présidence du régime de l’assurance-chômage, l’Unedic, et de la Commission relations du travail et emploi du Medef. La bataille entre la fédération et le Medef pourrait compliquer et retarder les négociations sociales, notamment sur la formation et l’assurance chômage. 

L’une des plus puissantes fédérations du patronat

En revanche, la fédération refuse, comme le demande la présidente du Medef, de renoncer aux mandats nationaux qu’elle exerce pour le compte du Medef. Sur 900 mandats nationaux du Medef, 101 sont, en effet, occupés par des membres de la puissante UIMM. Pas question de se soumettre aux desiderata de Laurence Parisot. Et l’UIMM de réaffirmer que « les postes laissés vacants par les partants seront pourvus par d'autres responsables de la métallurgie ».

Pour Laurence Parisot, c’est l’occasion de lancer une bataille décisive contre un pan du patronat traditionnel qui ne l’a jamais soutenue. Avec 45 000 entreprises employant au total 1,8 million de salariés, l’UIMM représente l’une des plus puissantes fédérations du patronat. Avec 11,1% des cotisations versées, la fédération est en effet le premier contributeur du Medef, bien devant les banques (7,7%), le bâtiment (5,25%) et les assurances (5,13%). Au sein même de l’UIMM, certains patrons dénoncent la façon dont est gérée la fédération de la métallurgie. Frédéric Saint-Geours, élu en décembre dernier à la tête de l’IUMM en remplacement de Denis Gautier-Sauvagnac, a d’ailleurs promis d’être «le président du renouveau ». Sa mission : redorer la réputation de la fédération en rénovant son fonctionnement et son financement, très opaques.

Pour l’heure, l’ancien président de l’UIMM Denis Gautier-Sauvagnac reste muet. Il refuse notamment de citer le nom des bénéficiaires de ses largesses au risque d’être condamné. Une enquête est en cours pour tenter de déterminer à qui était destiné cet argent et surtout à quoi des sommes aussi importantes ont servi. Denis Gautier-Sauvagnac a lui-même reconnu que l’argent avait servi à «fluidifier le dialogue social » suggérant un financement occulte avec les syndicats.

La piste politique

L’hypothèse de corruptions ponctuelles de délégués syndicaux en échange de la signature d’accords est examinée. De nombreux syndicalistes s’interrogent également sur d’éventuelles enveloppes destinées au monde politique. Le secrétaire général de la CFDT, François Chérèque et le président du syndicat CFE-CGC Bernard Van Craeynest ont suggéré lundi que la justice s'intéresse aux « pistes de financements politiques ». Et Bernard Van Craeynest de préciser que « certains parlementaires présentaient des amendements soigneusement rédigés par l’UIMM ».

La police a, en effet, constaté d’importants pics de retraits d’espèces au moment des élections présidentielles de 2002 et 2007. La convocation de l’ex-patron des Renseignements généraux Yves Bertrand confirme également la piste du financement politique. Ce dernier, directeur central des RG de 1992 à 2004, évoque dans son livre Je ne sais rien mais je dirai presque tout , sorti en septembre 2007, les largesses du patronat au monde politique qui ne sont pour lui qu’« un secret de polichinelle ».

Eric Branca

Auteur du livre d'entretiens avec Yves Bertrand «Je ne sais rien mais je dirai presque tout»

«Avant les lois de 1995, on était dans le cadre d'un financement direct des partis politiques par les entreprises.»

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04/03/2008 par Cyril Graziani